Durlinsbach, mardi 8 septembre 2020
Ils se garèrent devant la mairie.
— Donc Bruno, tu vas voir ton témoin pendant que nous retournons au moulin et on se retrouve ensuite ici, expliqua Geneviève.
— OK, elle est prévenue, elle sera chez elle, répondit-il en sortant du véhicule.
— Je vais chercher les clés, dit Sébastien.
Sébastien stoppa le véhicule juste avant les rubalises. La météo apportait un léger avant-goût d’automne, avec un ciel plombé qui conférait une atmosphère lugubre au tableau. La bise qui soufflait à travers les grands frênes faisait murmurer les feuilles autour de la bâtisse, comme si elles portaient en elles le désir de garder un secret. Alors qu’ils s’approchaient des marches, un coup de vent soudain fit tourbillonner les premières feuilles mortes. Le moulin avait perdu son air insouciant de maison de vacances pour devenir le cadre sinistre d’une scène de crime.
Geneviève fit sauter les scellés avant d’ouvrir lentement la porte. Elle resta quelques secondes sur le seuil à observer la pièce dans la pénombre. Elle voulait voir Léa, imaginer ce qu’elle faisait, quelle pouvait être son occupation, ici, loin de tout ? Elle entra doucement, Sébastien sur ses talons, gardait le silence. Elle jeta un regard circulaire. Elle le savait, la pièce sans âme ne lui donnerait aucune indication. Elle soupira et se dirigea vers la cuisine. Machinalement, elle porta les quelques restes de nourriture qui traînaient sur la table, dans la poubelle.
— Inutile que ça moisisse là.
Elle regagna la pièce centrale alors que Sébastien était monté à l’étage. Elle resta immobile à fixer la cheminée. Une violente bourrasque cingla la vitre. Un frisson la parcourut et elle crut percevoir un murmure. Elle balaya de nouveau la pièce du regard. Une mélancolie sournoise s’insinua en elle. Un sentiment de tristesse inexplicable tenta de s’emparer de son âme. La voix de Sébastien l’extirpa de ce gouffre vers lequel « quelque chose » essayait de l’entraîner.
— Ça va madame ?
Elle sursauta presque en se retournant.
— Euh, oui… enfin, je ne sais pas. Finalement, cet endroit est sinistre, non ?
Il fit la moue comme pour lui donner raison par politesse. Il haussa les épaules.
— Sans doute subjectif, parce que l’on sait ce qu’il s’est passé ici. En tout cas, je n’ai rien trouvé de plus là-haut.
Elle souffla.
— Rien non plus ici. Bon, on y va.
Comme prévu, ils retrouvèrent Bruno qui les attendait sur le perron de la mairie.
— Alors, du neuf ? lui demanda Geneviève.
Il hausa les épaules.
— Pas beaucoup, elle m’a bien confirmé qu’il y a une légende qui coure sur ce moulin au sujet d’une malédiction. Il y aurait plusieurs affaires sordides. Elle m’a conseillé de voir un habitant du village ; Serge Ketterlé. Il était prof d’histoire-géo au collège de Ferrette et il est passionné d’histoire. Il semblerait qu’il connaisse tout sur ce moulin.
— Bien, on va faire ça.
— Et vous ? relança Bruno.
— Bof, rien, éluda Geneviève. Allez, on rentre.
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