Saint-Louis, jeudi 10 septembre 2020
Vers la fin de l’après-midi, Geneviève laissa partir une bonne partie de son équipe, seul restaient le major Jean Wolff et le lieutenant Sébastien Amiot, chacun occupé à mettre à jour leurs PV en retard. Le téléphone de Geneviève sonna, c’était le procureur.
— Oui monsieur le procureur.
— Nous avons une nouvelle disparition à Mœrnach. Une femme qui n’est pas rentrée de son jogging. C’est le mari qui a appelé les gendarmes. Je devrais leur laisser l’enquête, mais avec cette affaire de Durlinsbach, je veux que ce soit vous qui la repreniez. Je vous envoie les données.
— Vous craignez une série ?
— Impossible à dire pour le moment, mais je préfère prendre les devants.
— Entendu, monsieur le procureur.
Elle sentit un gros coup de fatigue l’envahir en même temps qu’elle raccrochait. Ce n’était pourtant pas la première fois qu’elle se retrouvait confrontée à une série d’événements graves, mais ces temps-ci, elle avait l'impression que le poids des événements était plus lourd à porter. Elle se redressa et alla prévenir ses deux collègues.
— Eh bien allons-y, lança Sébastien avec un grand sourire.
Il ne le saura jamais, mais cette simple réponse enthousiaste la revigora. Malgré tout, un silence lourd d’inquiétude accompagna les premiers kilomètres. Je jour déclinant, ajoutait à la gravité du moment. Ce fut Jean Wolff qui rompit le silence.
— Une deuxième disparition sur la commune voisine, curieux. Une coïncidence ?
— On est payé pour savoir que les coïncidences, ça n’existe pas, lui répondit Sébastien.
— Attendez déjà, pas très professionnel tout ça, les coupa Geneviève.
Ils entrèrent dans le village et tout de suite trois voitures de gendarmerie leur indiquèrent l’adresse sans aucune ambiguïté. La nuit était tombée. Ils furent accueillis dès le perron par l’adjudant-chef Bossert. La maison cossue trahissait un bon niveau de vie.
— Bonjour, madame la commandante, je ne pensais pas que l’on se reverrai sitôt.
Elle lui rendit son salut. Plus loin, dans le salon, une gendarmette s’entretenait avec un homme effondré, sans doute le conjoint.
— On peut faire le point ?
— Tout à fait.
Il lui désigna une pièce sur le côté.
— Il s’agit de Madame Charlotte Wasser. Elle a passé un coup de fil à son mari vers 16 h 30 pour lui dire qu’elle partait faire son jogging. Elle n’est toujours pas rentrée alors que normalement elle revient au bout d’une heure. Son téléphone ne répond plus. Geneviève regarda sa montre.
— Il est 20 h 30 en gros. Bon, quatre heures.
Son mari s’est inquiété de ne pas la voir à la maison vers 19 h. il nous appelé tout de suite
— C’est pas un peu précipité quand même ?
Le gendarme soupira.
— Vous savez avec cette disparition de Durlinsbach, le capitaine n’a pas hésité. Il a appelé le procureur tout de suite, la suite vous la connaissez. J’ai quatre gendarmes qui parcourent le village en ce moment pour des témoignages éventuels. D’après le mari, elle allait dans la forêt au-dessus. J’ai déjà joint le préfet pour organiser les recherches. Je vous enverrai le rapport ce soir.
— Avec la nuit, je vous rejoins, c’est inquiétant. Et pour les recherches ?
— Normalement c’est prévu pour demain matin dès 6 h. Le maire et le conseil municipal sont déjà en train de recruter des volontaires.
— Qu’elle est sa profession ?
— Elle est institutrice à l’école primaire de Vieux-Ferrette. Voilà, c’est tout ce que l’on a pour le moment.
Elle le remercia et se tourna vers Jean et Sébastien.
— Bon, on ne peut pas faire grand-chose de plus pour l’instant. Ils font déjà l’investigation. On va les laisser finir leur travail. Jetez un coup d’œil dans le jardin. Qui sait !
Dans la cuisine, une femme s’occupait des deux enfants. Elle rejoignit l’étage. Deux chambres d’enfants donnaient à droite et à gauche du palier. En face, la salle de bain et la chambre parentale. Elle y pénétra. Elle y découvrit les habituelles photos de familles qui ne lui apportèrent aucune information. Son cœur se serra devant les clichés représentant la famille réunie avec le visage rayonnant d’enfants. C’est vers eux qu’allaient ses pensées. Elle dû lutter pour ne pas laisser une tristesse l’envahir.
Je me demande si je suis encore faite pour ce boulot !
Elle redescendît. La gendarmette avait fini d’interroger le mari. Geneviève ne voulait pas en rajouter. Elle se présenta et l’informa qu’elle serait en charge de l’enquête.
— On va la retrouver, les recherches vont commencer dès le lever du jour, on n’a pas perdu de temps.
Il la regarda avec désespoir.
— Je ne peux pas m’empêcher de penser à cette fille de Durlinsbach, vous savez. Elle a été brûlée.
Il acheva avec quelques mots incompréhensibles.
— Ne pensez pas à ça, il faut garder espoir, c’est important.
Jean l’appela. Elle laissa le pauvre homme sans avoir pu lui apporter un réconfort impossible, elle le savait.
— Rien dehors et puis les gendarmes font le boulot.
— OK, on rentre. On va faire un débrief rapide, mais on ne peut pas faire beaucoup plus pour ce soir. Je pense recevoir le rapport de la gendarmerie ce soir ou demain matin au plus tard.
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