Saint-Louis, samedi 26 septembre 2020
Éric était au bureau avant Geneviève. Il lui fit signe.
— Alors, tu as eu des infos ?
— Plutôt oui.
Sébastien les rejoignit. Ils s’assirent dans un coin de la grande table.
— Je me suis fait passer pour un privé qui travaillait pour Charlotte Wasser et qui avait besoin de renseignements pour clôturer le dossier des assurances.
Geneviève sourit intérieurement en faisant le rapprochement entre Éric et le petit bonhomme grassouillet qu’ils avaient interrogé la veille.
— J’ai rapidement appris que Charlotte Wasser voulait quitter la société et reprendre ses parts. Cela faisait quinze jours que l’ambiance était détestable au sein de la boîte. Il était évident qu’il y avait un clash profond dans le couple Wasser. Et c’est arrivé brusquement. J’ai eu la chance de coincer un bavard qui s’est épanché. Il en avait gros sur la patate.
Il finit son café avec une grimace.
— Merde, il est froid. Bon ! donc ce gars m’a dit avoir entendu une discussion, enfin une engueulade entre eux deux. Il était dans le bureau à côté.
« Toujours la précision chez Éric » soupira-t-elle.
— Il a entendu Charlotte Wasser lui dire qu’elle ne le reconnaissait plus. Il était question d’argent retirée sans l’avoir avertie. Et puis, elle a parlé du pompon avec cette fille, que c’était dégueulasse. Et là elle lui a dit clairement qu’elle le laissait tomber et qu’elle pourrait même inciter cette gamine à porter plainte, qu’elle allait le quitter et reprendre ses parts. Le gars était blême car reprendre ses parts ça représentait un million de francs suisses au moins, de quoi largement couler la boite.
— C’est sûr que c’est une sacrée culbute, de cinquante mille francs passer à plus d’un million ! convint Geneviève. Donc c’est tout.
— Oui, Pierre Wasser est arrivé et j’ai préféré m’éclipser.
Elle se cala au fond de sa chaise avec un soupir.
— Bon, il s’est manifestement passé quelque chose avec une fille, enfin une gamine même, si on comprend bien.
— Je pense à une agression sexuelle, intervint Sébastien. C’est ce qui semble le mieux coller avec les faits.
Elle le regarda.
— Et faire taire la famille avec deux cent mille francs suisses, compléta-t-elle.
Il hocha la tête.
— L’agression a eu lieu en juin, voilà comment je vois les faits. Elle s’est aperçue en juin du mouvement d’argent et elle a contacté ce privé. Mais elle n’a été au courant de l’agression qu’il y a un peu plus de quinze jours. Mais alors pas par ce privé car il dit ne pas avoir eu le temps de chercher.
— Dit-il la vérité ? dit Geneviève.
— Ce petit salopard aurait gardé une bille pour faire chanter Pierre Wasser ? remarqua Éric.
Geneviève fulminait intérieurement. Elle avait nettement sous-estimé cet homme et ça ne lui ressemblait pas.
— Il ne perd rien pour attendre. Bruno et Éric, vous vous en occupez ?
— Pas de problème, une petite intervention dans son bureau, ça va le secouer.
— Parfait, ça avance.
— En tout cas, voilà de beaux mobiles, jubila Sébastien.
— Tout à fait, cher lieutenant, mais n’oublions pas que Pierre Wasser a un solide alibi au moment où sa femme a été tuée.
Il se levèrent.
— C’est vrai, mais on va peut-être se repencher sur son emploi du temps à ce moment-là, déclara Sébastien.
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