Chapitre 32 - Admiration

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***

Il reste figé, en extase devant cette beauté, cette déesse qu’il vénère désormais totalement.

Il a croisé son regard. Et il a senti la fierté dans ses yeux. C’est la première fois qu’il la voit si libérée depuis son retour. Entourée de ses amis, elle est elle-même, elle ne joue pas un rôle. Il a enfin devant lui la femme qu’elle est réellement aujourd’hui.

L’armoire à glace qui lui sert de copain l’aide à descendre en la prenant par la taille, et soudain son cœur chute de dix étages. La vision de ces mains sur son corps le ramène immédiatement sur terre.

Il se racle la gorge avant de s’approcher, se frayant difficilement un chemin entre ces nouveaux admirateurs.

***

Je le cherche des yeux dans la salle, mais il n’est déjà plus à l’endroit où j’ai croisé son regard. J’enlace encore quelques amis qui me félicitent.

Puis en me retournant, je me retrouve brusquement nez à nez avec lui. Nous nous sommes presque rentrés dedans !

« - Oups ! Désolé… je souffle en m’écartant rapidement de son torse à l’odeur enivrante.

- Je… Euh… bredouille-t-il en retour. Hum, hum. Wow ! Tu as une voix magnifique ! Félicitations !

- Merci ! »

Je me sens de nouveau rougir, mais de fierté cette fois. Subitement intimidée, je replace une mèche de cheveux derrière mon oreille.

« - Je ne savais pas que tu chantais, continue-t-il, lui aussi un peu gêné.

- Oh ! Oui ça m’arrive, en effet… Comme ça, pour m’amuser… »

Une sorte de gêne mutuelle s’installe entre nous. Il me sourit, je lui souris. Nous restons face à face, à nous regarder en silence, comme les deux adolescents que nous étions il y a plus de quinze ans.

« - LOLO ! s’écrit Gwendoline en me faisant signe de venir. Tes fans te réclament ! »

Je ris doucement d’un air embarrassé, avant de m’excuser auprès de Tristan.

« - Bon… Bah… Désolé, je… Euh… Je crois qu’il faut que j’y aille…

- Oui, bien sûr. On se voit plus tard. »

Je lui souris, presque en minaudant, et m’éloigne à reculons lentement avant de finalement rejoindre mon amie, lui tournant le dos. En arrivant à la hauteur de Gwen, je jette un rapide coup d’œil derrière moi, et constate qu’il ne m’a pas quitté des yeux. Son regard est pétillant, presque admiratif. Il me dévore littéralement des yeux. Et je ressens soudain une vague de satisfaction et un frisson d’excitation.

***

Il ne peut décrocher son regard d’elle.

Elle l’impressionne de plus en plus, par sa confiance en elle, son courage, sa prestance. Elle n’est décidément plus du tout la même qu’à ses dix-huit ans, mais elle le séduit encore plus aujourd’hui.

Il remarque ses petits regards réguliers en arrière, à son attention. Il croit bien l’avoir vu rougir légèrement, à la limite entre la timidité et l’allumeuse. Et son sourire charmeur lorsqu’elle s’aperçoit qu’il la regarde toujours. Il est persuadé qu’elle se sent flattée. Elle peut ! Car ce qu’il ressent en ce moment même, c’est bien une profonde admiration pour la femme merveilleuse qu’elle est désormais.

Il se demande alors si elle serait cette femme s’il ne l’avait pas quitté à l’époque. Peut-être est-ce parce qu’il l’a abandonné qu’elle a pu devenir si belle, charmante, séduisante, forte et indépendante ?

A cette pensée, son cœur se serre. Il est à la fois fier et triste. Fier, car ce serait finalement un peu grâce à lui qu’elle a tant évoluée, jusqu’à être la femme fatale qui plait tant aux hommes à ce jour. Mais en même temps, il se sent triste de ne pas avoir été à ses côtés pour l’aider dans cet accomplissement. Et que cela signifie que c’est son absence qui l’a le plus aidé à murir. A-t-il définitivement laissé passer sa chance avec elle ?

Toutes à ses réflexions, il ne la voit pas remonter sur l’estrade pour entonner un autre morceau, en duo avec le fameux « armoire à glace », jusqu’à ce que le son de sa voix lui parvienne à nouveau. Il se décale alors pour mieux l’admirer.

Elle chante toujours divinement bien, et semble dans son élément. Elle joue avec le public et avec son partenaire. Son déhanché le met en émoi. Il la regarde onduler, grâcieuse et excitante. Elle est sexy, en plus d’être douée.

La jeune femme qui s’est glissée à côté de lui danse et encourage nos chanteurs d’un soir avec enthousiasme.

« - Elle est douée, hein ?! s’exclame Gwendoline, en lui tendant un verre.

- Oui, en effet ! lui répond-il avec un large sourire niais, en prenant une gorgée du punch qu’elle lui offre. Je ne lui connaissais pas ce talent.

- Ah oui ? s’étonne-t-elle. Tu la connais depuis longtemps ? »

Devant son air soudain crispé, elle tente de creuser encore un peu plus. Elle doit probablement sentir qu’il y a quelque chose de louche entre ces deux-là.

« - Non, parce que nous, on n’avait jamais entendu parler de toi, pour être franche. Et pourtant, moi, je la connais depuis quelques années maintenant !

- Euh… Oui, euh… On se connait… Enfin non, on ne se connait plus vraiment pour être honnête… Enfin, je veux dire… bafouille-t-il, se sentant pris au piège face à la mine curieuse de son excentrique interlocutrice. On s’est rencontré il y a très longtemps, et cela faisait un bail qu’on ne s’était pas revu. On s’est perdu de vue quand j’ai déménagé pour poursuivre mes études. Voilà…

- Ah, ok… »

Elle ne semble pas tout à fait convaincue. Cependant, elle n’insiste pas sur le sujet, à son plus grand soulagement.

« - Tu dois la trouver changé, par rapport à quand tu l’as connu, non ?

- Oh oui ! lâche-t-il malgré lui.

- Ha ha ! C’est ce qui s’appelle de la franchise ! s’esclaffe-t-elle.

- Oui… Euh… Pardon…

- Non, mais je t’en prie ! Dis m’en plus maintenant !!

- Elle est euh… Plus… Sûre d’elle ! Et euh… Plus…

- Séduisante ?! »

Il manque de s’étrangler avec sa boisson. L’aurait-elle pris en flagrant délit de contemplation ?

« - Hum… Euh… Oui, euh… C’est vrai aussi… »

Il ne sait plus où se mettre. Il est certain qu’elle l’a démasqué. Il est bien obligé de l’avouer, nier serait vouer à l’échec. Et cette Gwendoline qui le regarde en biais et lui sourit d’un air malicieux…

Pourvu qu’elle ne lui en parle pas…

***

Après ce duo mémorable, je redescends de l’estrade avec Maxime, tous deux hilares. Près du bar, j’ai aperçu Gwendoline en grande conversation avec mon ex. Ce qui m’inquiète un peu, je dois avouer. Elle est parfois d’une curiosité un peu excessive, et peut se montrer très convaincante quand elle veut.

Alors que Maxime me dépose un tendre baiser sur la joue pour me remercier de ce moment complice, elle revient vers moi avec un verre, un large sourire aux lèvres. Qu’a bien pu dire Tristan qui la mette de si bonne humeur ? Je jette un petit coup d’œil dans sa direction, et je constate que lui, en revanche, parait perturbée et un peu embarrassé.

« - Alors ? je tente comme approche auprès de mon amie, toujours flanquée de son air malicieux. Ça va ?

- Parfaitement bien ! Et toi ?

- Oui, merci ! Je m’amuse bien, je dois avouer ! Toi aussi, a priori, non ?

- Oui, c’est vrai ! » me répond-elle, une lueur de mystère dans les yeux.

J’avoue que cela m’intrigue…

« - Tu… as fait plus ample connaissance avec Tristan, à ce que je vois, je tente de feinter la confidence. Alors ? Ça donne quoi ? Y’a moyen ou pas ??

- Je ne crois pas, non… me réplique-t-elle, sur un ton à la fois amusé et mystérieux, mais pas du tout déçu, ce qui ne présage rien de bon.

- Comment ça ??

- Je crois bien que je ne suis pas son genre, en fait !

- Ah ? Et pourquoi tu dis ça ? Ne me dis pas qu’il t’a rembarré ??

- Non, pas du tout. Mais j’ai bien compris qu’il en pince pour une autre, c’est évident, ajoute-t-elle, encore plus espiègle, avec un petit sourire en coin. Ce n’est pas moi qui l’intéresse…

- Ah bon ?? … Et euh… Qui donc, alors ?

- Une certaine « amie d’enfance », je pense, me réplique-t-elle, l’index sur le menton. Mais je crois que, ça, tu l’avais déjà deviné, non ? ajoute-t-elle en se tournant vers moi, les yeux emplis de perfidie.

Je ne sais que répondre à cette réflexion, et j’en reste bouche bée…

Elle sourit d’un air narquois à la vue de ma mine déconfite, avant de se diriger vers Maxime, toute guillerette, me laissant en plan, moi et ma stupéfaction.

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