30. Maître et disciple - Partie 3

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La lumière matinale perçait par le dôme vitré du plafond de la bibliothèque, projetant des motifs complexes sur le sol de pierre. Amos, désormais âgé de neuf ans, se tenait dessous avec une détermination farouche. Ses mouvements, plus assurés et précis, tentaient de reproduire les techniques d'autodéfense qu'il avait lues. Sans validation de son maître pour le contrôle émotionnel, il restait bloqué à cette étape. Mais les livres et parchemins qui l'entouraient témoignaient de sa discipline quant à ses leçons ainsi que des connaissances accumulées.

Mezhelan, adossé à un mur, observait son disciple s'entraîner dans la quiétude de la bibliothèque. Il voyait en lui une promesse d'avenir, une flamme à nourrir et guider. Le garçon grandissait à toute vitesse, il était courageux et ne ménageait pas ses efforts.

Un matin, alors qu'il était plongé dans ses notes sur la téléportation, Mezhelan entendit des pas dans son bureau. Il touchait au but et compilait progressivement ses découvertes pour les transmettre aux générations futures. En levant les yeux, il aperçut Amos qui attendait pour parler, preuve de ses progrès en termes de patience.

"Maître, pouvons-nous discuter ?" demanda Amos, d'un ton calme et mesuré.

Mezhelan posa sa plume pour observer son jeune disciple avec une curiosité bienveillante : "Bien sûr. De quoi veux-tu me parler ?"

Amos prit une profonde inspiration avant de dire : "Je souhaiterais t'accompagner lors de ta prochaine mission. Je me suis beaucoup entraîné et je suis convaincu que je peux être utile."

Mezhelan resta silencieux un moment en évaluant sérieusement la demande : "Tu as montré beaucoup de progrès, mais une mission comporte des risques que tu n'as jamais expérimentés."

Amos hocha la tête, résigné : "Je comprends, Maître. Mais je suis prêt à apprendre, même face au danger. Et je promets de rester calme et de suivre tes instructions en toutes circonstances."

Mezhelan sourit légèrement, reconnaissant la détermination dans ses yeux : "Entendu, je vais y réfléchir."

Le reste de la matinée passa sans incident. Amos, fidèle à ses habitudes, se plongea dans ses leçons, répétant inlassablement les mêmes mouvements.

Le mage, quant à lui, se perdit dans ses réflexions en l'observant. Son garçon mûrissait si vite, mais il hésitait encore à l'exposer à des situations périlleuses : 'Peut-être…' pensa-t-il en silence, lorsqu'un tourbillon d'énergie familière vint finalement interrompre la quiétude des lieux.

Soren déboula dans la salle de nulle part, un sourire espiègle aux lèvres : "Allez, montre-moi ce que tu as dans le ventre, sale gosse !" provoqua-t-il en ramassant dans ses mains, le livre qu'Amos était en train d'étudier.

Mezhelan s'approcha, puis s'appuya contre une étagère pour surveiller la scène, empli d'une douce satisfaction. Soren adorait chambrer son disciple, c'était plus fort que lui, mais c'était de bonne guerre car le garçon ne manquait pas de répondant.

Amos serra les dents entre amusement et ruse, puis tenta de récupérer son livre par la technique.

Soren, se défendant avec un rire effronté, leva l'ouvrage au-dessus de sa tête : "Il va falloir grandir ou sauter plus haut ! Ahah."

"Un objectif plus réaliste que d'empêcher ta sénilité grandissante !" provoqua Amos.

Choqué un instant, Soren éclata de rire bruyamment. Sa baisse de concentration l'empêcha de remarquer immédiatement qu'Amos prenait appui sur une pile de livres pour lui sauter sur le dos : "Argh !" s'écria-t-il sous le coup de la surprise.

Amos, le bras rapidement tendu en équilibre sur l'épaule de Soren, et les jambes pendues le long de son dos, referma les doigts sur la reliure du grimoire avec un grand rire plein de satisfaction.

Ils se chahutèrent les minutes qui suivirent de plus en plus bruyamment, puis Mezhelan intervint pour solliciter vers son disciple d'un ton extrêmement calme : "Cesse de rire." Il voyait là une bonne occasion de le tester.

Amos, toujours souriant, répondit avec amusement : "Hé, mais c'est sa faute ! Il est insupportable !"

Mezhelan répéta doucement : "Cesse de rire."

Amos parvint à effacer son sourire en une seconde en le regardant résolument droit dans les yeux.

Soren était toujours hilare, mais parut rapidement tout aussi choqué que confus par la tournure des choses et les secondes de calme qui s'ensuivirent.

Ce fut au tour de Mezhelan de retrousser légèrement les lèvres, laissant apparaître une pointe de fierté : "J'ai de la chance…" murmura-t-il pour lui-même, avant de dire plus fort : "C'est d'accord. Tu m'accompagnes."

Amos voulut confirmer qu'il avait bien compris : "Vraiment ?"

"Oui." affirma Mezhelan en l'approchant pour taper deux doigts dans son front, une expression taquine éclairant ses traits. La décision était prise, mais il restait beaucoup d'aspects à réfléchir.

Les jours suivants furent bien remplis. Amos se préparait déjà au départ avec entrain, alors que Mezhelan terminait un maximum de tâches en cours pour partir l'esprit serein. Le moment venu, ils se dirigèrent ensemble vers la salle du conseil, où se trouvait le roi accompagné de son sénéchal et quelques autres personnes.

Mezhelan reconnut rapidement l'un des hommes, inclinant légèrement la tête en guise de salut : "Monsieur Lyseria."

L'architecte se retourna pour s'incliner respectueusement : "Maître Mezhelan, je suis honoré que vous vous souveniez." Puis, ses yeux se tournèrent vers Amos avec curiosité.

Le roi parut embarrassé et intervint pour remarquer : "Mezhelan, tu es en avance."

Ce dernier vérifia sa montre à gousset avec une légère surprise pendant que monsieur Lyseria précisait : "C'est plutôt nous qui avons tardé, Majesté." Puis, il présenta naturellement le garçon à côté de lui : "Maître, voici mon aîné, Hassan."

Mezhelan fit preuve d'une attention bienveillante envers son fils, dont l'expression semblait brûlante d'admiration : "Tu ne dois pas être beaucoup plus âgé qu'Amos." remarqua-t-il en encourageant son disciple à se présenter.

"Bonjour, je suis Amos." se présenta celui-ci de façon concise.

Les deux garçons échangèrent un bref contact visuel empreint de réserve, tandis que le roi lançait un regard significatif à l'architecte.

Ce dernier fronça légèrement les sourcils, regarda Mezhelan et Amos avec une expression peinée, puis sembla dire à regrets : "Pardonnez-moi, je ne souhaite pas imposer notre présence plus longtemps, nous nous retirons."

Après leur départ, le roi étala rapidement une vaste carte des contrées connues sur la table : "Ce sera une mission diplomatique, Mezhelan." annonça-t-il : "L'aîné de la reine régente de Westanie a été couronné, et il souhaite rencontrer nos représentants. Sa cour est en pleine réorganisation et nous avons été conviés, il est crucial de montrer notre soutien pour maintenir de bonnes relations. Vous partirez donc là-bas."

Mezhelan inclina respectueusement la tête : "Entendu, votre Majesté." C'était une très bonne nouvelle pour lui, car cette mission offrait un cadre assez sûr pour une première expérience : "C'est idéal pour la première mission d'Amos, je vous remercie. C'est une excellente occasion pour lui d'apprendre." poursuivit-il.

"Parfait." dit le roi en observant la réaction d'Amos quelques instants tout en hochant la tête : "Je ne peux pas quitter le royaume comme je l'entends, mais c'est primordial que la famille al'Cynan soit représentée. Ainsi, mon deuxième fils, le prince Tarian, vous accompagnera avec la personne de son choix. Il a toujours eu le goût de l'aventure et doit lui aussi apprendre… comprendre les complexités de la diplomatie. Ta mission sera avant tout de l'escorter à bon port et de veiller à sa sécurité et à celle de nos intérêts."

Ces dernières années, Mezhelan n'avait toujours pas fait la rencontre de l'un des enfants du roi, ça allait donc être une première. Même s'il ne savait pas à quoi s'attendre le concernant, il savait quand même que le prince Tarian était plus jeune que lui de huit ans.

"Je sais que ce n'est pas une mission habituelle pour toi, mais elle est d'une importance capitale." poursuivit le roi : "La stabilité de nos relations avec la Westanie dépend de notre capacité à montrer un front uni et à soutenir le nouveau roi dans sa transition. Vous devrez observer et rapporter tout ce qui pourrait affecter notre alliance."

Le mage hocha la tête avec sérieux.

Les pensées d'Amos, elles, semblaient toutes autres. Il regarda son maître avec une excitation palpable et tira sur sa robe en questionnant : "Papa, c'est bien à la cour de Westanie que vit la Magicienne de la mer ?"

Mezhelan sentit ses cils frémir légèrement en étant appelé Papa devant le roi, mais en croisant les yeux bleus de ce dernier, il n'y lut qu'une légère surprise, mais aucune trace de jugement ou d'autre chose. Le mage se pencha pour répondre : "Oui, c'est bien là-bas." puis poursuivit vers son souverain : "Nous aurons sans doute beaucoup à apprendre d'elle, voilà une chance de renforcer nos relations."

Le roi acquiesça : "Vous partirez demain matin." Il passa le doigt à la frontière des royaumes sur la carte en expliquant : "Comme tu le sais, la Westanie est notre voisine de l'ouest, et elle est bordée par un fleuve imposant. Seuls trois ponts le traversent, et le passage central est le plus direct pour rejoindre leur capitale. Mais il s'agit tout de même de dix jours de voyages, rien que pour l'aller."

"Depuis tout ce temps, j'ai l'habitude des longs voyages, ne vous inquiétez pas. Et nous veillerons à nous arrêter dans un maximum d'auberges pour minimiser les risques concernant le prince." assura sereinement Mezhelan.

Le roi fixa quelques secondes son mage avec une expression indéchiffrable : "Bien… Mais je n'étais pas vraiment inquiet à ce sujet. Y a-t-il une escorte plus efficace que toi dans tout le royaume ?" remarqua-t-il.

Mezhelan s'inclina en signe de reconnaissance. Puis, il retourna aux quartiers magiques avec son jeune disciple dès la fin de l'entrevue.

Amos avait du mal à tenir en place et son enthousiasme se ressentait derrière chaque geste. La minutie nouvelle qu'il apportait à ses préparatifs témoignait de l'importance qu'il accordait à cette première mission.

Mezhelan trouva ça adorable et posa une main rassurante sur son épaule, partagé entre fierté et appréhension : "Rappelle-toi, Amos : ce voyage est une opportunité d'apprendre et de grandir. Mais il sera aussi surmonté de défis. Tu devras rester calme et vigilant en toutes circonstances."

Amos hocha la tête, déterminé : "Je ne te décevrai pas !"

"Pour ma première mission, on m'avait offert quelque chose. Je veux faire la même chose pour toi… alors tiens." dit Mezhelan en tendant un poignard rangé dans un élégant fourreau.

Amos fixa l'arme un bon moment avec surprise, avant de la prendre pour l'inspecter : "Je ne suis pas certain… d'avoir le courage de m'en servir." avoua-t-il en contemplant la lame.

"C'est en dernier recours, mais promets-moi de t'en servir si ta vie devait être menacée." sollicita Mezhelan.

"La mission risque-t-elle d'être dangereuse ?" interrogea Amos avec hésitation.

"Je ne pense pas, car je resterai constamment à tes côtés." expliqua Mezhelan avant d'insister : "Mais promets-moi."

"Je promets." assura Amos avec un sourire.

Sur le départ à l'aube, Maître et Disciple se tenaient à l'entrée des écuries, leurs montures prêtes pour le voyage. C'est alors qu'ils virent approcher Edyrn, le chef de la garde royale, accompagné d'un jeune homme à l'attitude partiellement condescendante.

"Maître Mezhelan." salua respectueusement Edyrn en s'inclinant légèrement.

"Edyrn." salua le mage en inclinant la tête en retour. Le capitaine de la garde, un quarantenaire à la carrure robuste, était spécialisé dans le combat à l'épée et au bouclier. Mezhelan connaissait bien ses solides compétences, particulièrement défensives, grâce à la démonstration de Johannes quelques années auparavant. Même s'il ne le connaissait pas personnellement, il le croisait souvent. Edyrn inspirait le respect de ses hommes et avait la réputation d'être loyal et expérimenté.

"Voici Son Altesse le prince Tarian. Nous voyagerons tous les quatre pour cette mission diplomatique." annonça Edyrn en introduisant immédiatement le prince à la conversation.

Ce dernier s'inclina courtoisement sans un mot, semblant juger et inspecter la moindre de leurs paroles, le moindre de leurs mouvements. Il avait dix-sept ans et des yeux bleus d'une clarté aussi envoûtante que ceux de son père. Ses cheveux mi-longs, clairs, brillaient sous le soleil, et son regard se posa sur Amos avec une curiosité teintée d'insolence : "Alors, c'est toi, le jeune disciple du Grand Mezhelan. J'espère que tu es à la hauteur de sa réputation."

Mezhelan ne prit pas ses paroles à cœur, bien qu'il pût lire à travers elles. Il jeta surtout un rapide coup d'œil sur son disciple en espérant qu'il résisterait à la provocation.

"Je ferai de mon mieux, Votre Altesse. Je suis ici pour apprendre et pour aider." répondit Amos, parfaitement calme et respectueux.

Mezhelan nota sa maîtrise de soi avec satisfaction : "Amos apprend encore, Prince Tarian, mais je pense qu'il saura vous surprendre."

Edyrn, observant la scène, parut légèrement soulagé : "Bien. Mettons-nous en route, alors. Un long voyage nous attend."

Sur ces mots, ils montèrent à cheval, prêts à partir vers la Westanie.

Amos, contrairement à Mezhelan au même âge, savait déjà parfaitement monter. Et tandis qu'ils quittaient l'enceinte familière du château, l'excitation du garçon était évidente : l'aventure les attendait.

Les premiers jours de voyage furent longs et monotones, mais aussi très instructifs pour Amos. Mezhelan profitait du trajet pour enseigner à son disciple des leçons de diplomatie, de stratégie et de maîtrise de soi. Et ce dernier écoutait attentivement, absorbant chaque parole comme une éponge.

Le prince Tarian, bien que faisant mine de ne pas s'en soucier, écoutait également avec beaucoup d'attention. Derrière son attitude désinvolte, il jetait souvent des regards furtifs à Mezhelan, comme s'il cherchait à le jauger. Son attitude initiale faisait lentement place à une forme d'intérêt : "Je dois admettre…" commença-t-il après une légère hésitation, lors de leur premier repas autour d'un feu de camp : "…que je pensais que ce voyage serait d'un ennui mortel, mais vous avez toujours des choses intéressantes à raconter, Maître Mezhelan."

D'abord surpris, le mage inclina rapidement la tête : "Bien que ce ne soit pas le domaine dans lequel j'excelle le plus, Votre Altesse, la diplomatie reste un art subtil qu'il est bon de connaître."

Amos regarda la scène avec intérêt, avant de s'adresser à Edyrn : "Monsieur, j'ai cru comprendre que vous donniez des leçons d'épée à Son Altesse le Prince, est-ce que vous accepteriez de m'apprendre aussi deux ou trois choses durant le voyage ?"

Edyrn jeta un coup d'œil sur Mezhelan, puis sourit pour répondre : "Je ne suis pas sûr que le combat à l'épée te sera très utile à l'avenir."

"Pour l'instant, je n'ai pas le droit d'apprendre la magie. Je ne souhaite pas étudier le maniement de l'épée, mais apprendre à me défendre !" répondit le garçon avec résignation.

Edyrn croisa le regard de Mezhelan en concédant : "Eh bien, si ton maître est d'accord, je n'y vois pas d'inconvénients…"

"Je n'en vois aucun, ça ne peut pas lui faire de mal." accepta Mezhelan : "Je sais qu'il a déjà étudié quelques mouvements de défense dans les livres de notre bibliothèque, mais les mettre en pratique face à un adversaire est diamétralement différent."

Edyrn sourit en commençant à détacher des parties de son armure : "La théorie et la pratique sont deux choses très différentes, en effet. J'imagine que les combats au corps à corps ne sont pas votre point fort, Maître, si vous souhaitez me refiler les leçons." plaisanta-t-il.

"Effectivement." confirma le mage sans honte. Il regarda son disciple avaler une portion de sa gamelle, visiblement satisfait qu'il ait dit oui tout en se dépêchant de finir de manger : "Si j'ai accepté que tu m'accompagnes en mission, Amos, c'est parce que je pense que tu es prêt. Je t'initierai aussi à la méditation le soir."

Amos manqua de recracher sa nourriture, puis se tapa sur la poitrine en s'exclamant : "Vraiment ? Je commence la prochaine étape ?"

Mezhelan répondit d'un doux mouvement de tête, imprégné d'une bienveillance silencieuse.

C'est ainsi que le voyage entama un nouveau rythme, parsemé de leçons de défense et de méditation pour Amos.

Quant à Mezhelan, il peaufinait son sort de téléportation en le stabilisant. À ce rythme, il avait bon espoir de s'épargner le retour en se téléportant directement à Dafan.

Le prince était sans doute celui qui s'ennuyait le plus, bien qu'il parlait maintenant avec tout le monde.

Durant leur cinquième jour de voyage, ils atteignirent le passage reliant la Centralie à la Westanie au centre des royaumes, celui-ci portait également le nom de Pont de la confluence, mais ils y furent surtout confrontés à leur première difficulté. Car lorsqu'ils arrivèrent à proximité, ils constatèrent par là même qu'un regroupement bloquait le passage. Un homme avec une cargaison se trouvait encerclé par une quinzaine d'hommes. Et au plus ils s'en approchaient, au plus il était évident que c'était un marchand victime de bandits.

L'un des vagabonds se tourna en entendant les sabots, et ouvrit alors les bras dans un geste théâtral : "Les gars, matez-moi ça !" s'exclama-t-il. Plusieurs de ses camarades se tournèrent à ses paroles, tandis qu'il désignait les quatre personnes s'approchant : "Ça sent la noblesse !"

Edyrn descendit de sa monture pour passer en tête, espérant sans doute que sa carrure et son équipement soient suffisamment dissuasifs à eux seuls : "Nous voulons simplement traverser." dit-il d'une voix grave.

L'homme ricana avec ses acolytes : "Oh ouais, bien sûr, vous pouvez y aller !" Puis, il renifla en passant la langue sur ses dents : "Mais y'a une taxe à régler, d'abord !" déclara-t-il.

Edyrn leva un sourcil en regardant le marchand qui semblait en mauvaise position : "De combien ?" questionna-t-il.

Mezhelan était tout aussi curieux de savoir combien ils extorquaient aux voyageurs, et resta sagement sur sa selle.

L'escroc jeta un regard en arrière, semblant réfléchir à la somme : "Cinq pièces d'or… par tête." annonça-t-il.

C'était une somme énorme, puisqu'une seule pièce d'or représentait un peu plus de deux mois de labeur d'un homme du peuple. Ils demandaient quasiment une année de salaire pour le passage d'une seule personne.

Edyrn lâcha un ricanement méprisant en regardant ses compagnons de voyage, puis remarqua : "Je ne pense pas que beaucoup de monde soit capable de payer autant."

Le bandit avait perdu son sourire dès l'instant où Edyrn lui avait ri au nez avec mépris : "C'est le prix pour les trous d'cul de nobles nés avec des cuillères en argent dans la bouche." grogna-t-il entre ses dents.

Edyrn souligna avec moquerie : "Je ne suis pas noble, j'ai droit à une p'tite ristourne ?"

Une ombre de moquerie traversa discrètement le visage de Mezhelan avant qu'il ne remarque les expressions inquiètes de Tarian et d'Amos. Lui et Edyrn étaient sans doute les seuls à ne pas prendre ça très sérieusement.

"Non, mais tu travailles pour eux." cracha le brigand, avant de provoquer : "T'as p't'être l'air de savoir te battre, mon gars, mais c'est pas leur cas ! Tu penses vraiment pouvoir te frotter à nous tous en même temps ?"

Edyrn jeta un nouveau coup d'œil derrière lui pour constater que Mezhelan était descendu de son cheval afin de le rejoindre : "C'est pas leur cas ? Tu inclus les trois ? Parce que ce n'est pas moi le plus dangereux ici." affirma-t-il.

Mezhelan s'arrêta devant l'homme et joignit calmement les mains au-dessus de sa tête avec un niveau de calme et de concentration exemplaire.

Le bandit le fixa avec incrédulité, ne comprenant pas ce qu'il était en train de faire ainsi, à brasser de l'air.

Dès que Mezhelan put confirmer l'ouverture d'une porte dans le dos du type, il lui flanqua un coup de pied aussi soudain que brutal pour l'expédier dedans. L'homme disparut immédiatement dans les ténèbres.

Ses acolytes s'alarmèrent dans un mélange d'exclamations de surprise et d'angoisse, paniquant à la scène à laquelle ils venaient d'assister.

Et parallèlement, un hurlement très peu viril retentit en fond sonore, accompagnant la chute de l'homme du ciel dans le fleuve, en contrebas.

Mezhelan sourit de toutes ses dents, se tourna vers Amos et s'exclama fièrement : "Fils, tu as vu !? J'ai réussi !"

Amos, la bouche grande ouverte de stupéfaction, n'en croyait pas ses yeux. Face au visage fier et dépourvu de la moindre inquiétude de son maître, il ne put s'empêcher de sourire avec lui et hocha vigoureusement la tête, toute peur envolée.

Prochainement : Amos

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