36. Fin d'une ère - Partie 1
Mezhelan contemplait les jardins des quartiers magiques depuis son bureau, une légère brise caressant son visage. À trente-et-un ans, il se sentait plus confiant dans ses pouvoirs que jamais, et il était solidement ancré dans ses responsabilités et son rôle de mentor. Son moment de sérénité fut interrompu par des pas précipités. Il se tourna pour apercevoir son disciple, une expression de préoccupation sur le visage, tenant à la main une lettre scellée par le sceau des consuls d'Iserlohn.
Amos avait bien grandi, tant en taille qu'en assurance, et son potentiel magique s'était épanoui d'une manière qui dépassait toutes ses attentes. Le maître et le disciple partageaient un lien profond, fondé sur des années de mentorat et de confiance mutuelle. À quinze ans, le jeune apprenti suivait son propre chemin et avait désormais ses propres aspirations concernant la magie : "Maître, j'ai reçu ceci des consuls d'Iserlohn. Ils ont insisté pour que tu la lises au plus vite." annonça-t-il en tendant la lettre, le regard brillant d'une inquiétude contenue.
Mezhelan la prit pour briser délicatement le sceau. En dépliant le message, il lut les lignes avec une concentration intense, ses sourcils se fronçant progressivement. La mention des phénomènes étranges au-dessus du lac promettait de nouveaux mystères à résoudre : "Merci, Amos." dit-il en la repliant : "Tu en connais déjà le contenu, j'imagine ?"
"Oui, ça fait suite aux rumeurs racontées par le croque-mort, et les consuls m'en ont aussi brièvement parlé." répondit le jeune homme : "Ils craignent un danger imminent. Les phénomènes sont de plus en plus fréquents. C'est plutôt troublant." déclara-t-il.
Mezhelan saisit sa veste et posa une main sur l'épaule de son garçon : "Allons-y." dit-il en quittant la pièce. Il avait entièrement confiance en son jugement, alors il alla chercher Hans dans la bibliothèque : "Nous allons à Iserlohn. Prends cette lettre et remets-la au sénéchal du roi de ma part, s'il te plaît."
"Bien, Maître." répondit ce dernier.
Le mage tendit la main à Amos, qui l'attrapa aussitôt, et ils traversèrent le portail pour se retrouver devant la maison de Missan Ferrand, l'un des consuls. Il lâcha la main de son disciple pour toquer à l'entrée.
Missan ouvrit presque immédiatement, son visage montrant un soulagement palpable : "Maître ! Vous êtes déjà là ! Merci infiniment !"
"Seriez-vous disposé à nous accompagner jusqu'au lac pour nous parler des éventuelles choses qui n'auraient pas été mentionnées dans la lettre ?" interrogea Mezhelan sans tergiverser.
"Bien sûr, je vous accompagne et je vous raconterai tout ce que je sais en chemin !" affirma-t-il en les rejoignant à l'extérieur pour verrouiller derrière lui.
La maison de Missan, située non loin du lac, n'était qu'à quelques minutes de marche. En chemin, il raconta : "La première rumeur d'un phénomène étrange a émergé il y a plusieurs années, mais à l'époque, personne ne la prenait au sérieux. Des témoins, plus ou moins fiables, parlaient de lueurs violettes filant à grande vitesse sur le lac… Puis, cela a empiré plus récemment avec des voix entendues sur l'eau ou aux abords. Peu à peu, ces rumeurs se sont multipliées, bien que les témoignages restaient rares…"
"Des lueurs violettes ?" répéta le mage, intrigué.
"Oui, je ne les ai jamais observées moi-même, mais ça ressemblerait un peu à la couleur de vos portails magiques, si j'en crois les témoins." poursuivit Missan.
Mezhelan ne put s'empêcher d'échanger un regard avec Amos avec un léger froncement de sourcil.
"Tous les pêcheurs que nous avons interrogés disent avoir vus ou entendus des choses étranges au moins une fois au cours du dernier mois…" poursuivit le consul.
"Pourquoi ne pas avoir demandé de l'aide avant aujourd'hui ?" questionna le mage.
"Personne n'était blessé, alors personne ne s'en inquiétait vraiment. Les gens d'ici n'ont plus peur de tout comme auparavant, beaucoup pensaient même que l'un de vous était à l'origine de ces phénomènes…" confia Missan.
Amos précisa spontanément : "Toi ou Dame Eärwen…"
Mezhelan était un peu perplexe, il savait que la magicienne de la mer avait ses propres compétences, mais elle n'avait aucune raison de créer ce genre d'illusion : "Je sais que Dame Eärwen et moi avons tenté des choses sur le lac, mais nous ne pourrions pas être liés à des voix entendues." affirma-t-il.
"Votre apprenti a dit la même chose, et c'est bien ce qui m'inquiète. Qu'est-ce que cela pourrait être ? Un magicien inconnu ? Nous ne vous aurions probablement toujours pas dérangé si cela s'était arrêté à ça. Mais ce matin, des habitants se sont pressés devant chez nous et ont rapporté avoir vu quelque chose dans la forêt de l'autre côté du lac." déclara le consul.
"Qu'ont-ils vu ?" demanda Mezhelan.
"J'aurais du mal à vous le répéter fidèlement, mais ils en parlaient comme d'un passage… Ils disent qu'une forme ovale se tient dans les airs, et que des bruits préoccupants en sortent." dit Missan, alors qu'ils s'arrêtèrent enfin sur le port, aux abords de l'eau. Le vent du lac était frais, apportant avec lui une odeur humide de bois mouillé et de poisson. Il pointait l'autre rive en précisant : "C'est là-bas."
Mezhelan observa l'endroit indiqué par Missan, tentant de discerner quelque chose à travers la brume du lac.
"Nous y allons par la terre ferme." déclara le mage, avec son calme habituel, en se tournant vers son disciple.
Les réactions de ce dernier, en revanche, témoignaient d'une légère nervosité.
Ils se mirent en route tous les deux, longeant d'abord le port, puis un sentier sur la rive, et enfin la lisière des bois. Le chemin était accompagné du bruissement du vent dans les arbres et des stridulations distinctives des cigales, parsemé de feuilles mortes et de branches craquantes sous leurs pas.
"Tu ne trouves pas que la description ressemble à notre magie de téléportation ?" interrogea soudainement Amos, enjambant un tronc d'arbre couché : "Monsieur Ferrand a d'ailleurs comparé ça à nos portails. Ça pourrait être lié à ceux que nous ouvrons ?"
"Possible, mais peu probable." répondit Mezhelan en se retournant pour l'attendre. Son ton calme contrastait avec celui du jeune homme : "J'ai entièrement inventé ce sort, personne en dehors de ceux à qui je l'ai appris ne pourrait en être capable, et ça se résume à toi et Eärwen."
Amos se figea tout à coup, et leva une expression perplexe vers son maître en questionnant : "Qu'est-ce que tu viens de dire ? Je… Je n'ai pas compris ?"
"Comment ça, tu n'as pas compris ?" répéta Mezhelan en levant un sourcil.
Amos regarda nerveusement autour de lui en réalisant : "Tu n'as pas entendu ?"
Le mage fronça profondément les sourcils en le fixant.
"Une voix incompréhensible. J'ai d'abord cru que c'était toi, mais tes lèvres ne bougeaient plus…" dit Amos, s'arrêtant pour inspecter la colline des yeux.
"Je n'ai rien entendu. Reste près de moi." ordonna Mezhelan, avançant avec prudence tout en s'assurant qu'il le suivait de près. Chaque pas semblait les rapprocher de l'origine de ces phénomènes étranges, mais il ne se sentait soucieux que pour Amos : 'J'aurais peut-être dû le laisser à la maison.' pensa-t-il. Ils continuèrent d'avancer, et peu de temps après, l'homme entendit à son tour une voix grave, résonnant à travers les arbres. Il marqua calmement une pause, et scruta les environs pour analyser la situation : "Tu l'as encore entendue ?" demanda-t-il.
"Non…" répondit Amos en scrutant son visage : "Toi oui, n'est-ce pas ?"
Mezhelan se contenta de lui hocher la tête. Il devait bien l'admettre, entendre des voix, c'était nouveau. Il savait qu'il ne devait plus être très loin de l'endroit indiqué par Missan, et il se remit en marche en réfléchissant à toutes les légendes des créatures mythologiques qu'il avait lues au cours de sa vie. Qu'est-ce qui pourrait en être à l'origine ?
Ils continuèrent à avancer, et bientôt, une lumière vacillante apparut entre les arbres. Mezhelan leva la main pour signaler à Amos de s'arrêter : "Nous y sommes presque." murmura-t-il. Il ressentait une puissance étrange et chaotique qui émanait de là.
L'apprenti se pencha de côté afin de regarder dans la même direction.
En approchant, ils discernèrent des lueurs pourpres formant un ovale flottant à deux pieds au-dessus du sol, cela se rétractait et pulsait faiblement, comme une respiration. Des crépitements et des bruits sourds en émanaient, comme si l'espace se déformait près de cette anomalie. Une chaleur tout sauf naturelle semblait de plus émaner du sol, alourdissant l'air ambiant.
Amos, les yeux écarquillés, murmura : "C'est… c'est exactement comme il l'a décrit."
Mezhelan préservait une posture assurée : "Reste près de moi, je vais examiner ça de plus près." Il pouvait sentir une énergie disparate aux alentours. Ça ressemblait à un portail, mais c'était également différent. Les voix graves s'intensifièrent, mais le mage resta concentré, cherchant à comprendre la nature de cette singularité. Elle différait sans conteste de ce qu'il connaissait, par son apparence instable et légèrement transparente, comme si elle oscillait entre deux dimensions.
"Papa… je n'aime pas ça…" marmonna le jeune homme.
Mezhelan tourna la tête vers son disciple. Il la percevait sur son visage : l'inquiétude. Mais il ne le lui avouerait jamais, puisqu'il ne lui permettait pas d'avoir peur depuis qu'il était enfant : "Reste où tu es, c'est à moi de m'en occuper. Je vais identifier l'origine de cette anomalie, comprendre son fonctionnement et la refermer." Il continua de s'approcher en contournant légèrement, notant une seconde différence majeure : leurs portails de téléportation paraissaient plats vus de côté, mais celui-ci restait ovale qu'importe l'angle. Ainsi, lentement et prudemment, il approcha la main.
"Tu as toujours été bien meilleur que moi pour ressentir l'énergie, mais cette fois, je la sens sans méditer ! Tout est complètement perturbé ici, ce n'est pas normal ! Ça pourrait être dangereux…" intervint Amos, le visage empreint d'une préoccupation sincère.
Le mage, la main suspendue dans les airs, sourit à son attention : "Qui va s'en occuper si ce n'est pas moi ?" interrogea-t-il sérieusement.
Amos fronça les sourcils, ne sachant que répondre à ça.
"Ne t'inquiète pas, je vais y arriver." assura Mezhelan, se concentrant pour analyser sa structure énergétique. Il s'approcha encore, essayant de stabiliser la singularité sans entrer en contact direct. Il discerna les flux turbulents autour de lui et tenta de les aligner sur sa propre énergie pour les soumettre. Cependant, ses mains s'approchèrent de plus en plus, comme aspirées par une force invisible. Il fit un nouveau pas en avant, réalisant qu'il était entré en contact sans le vouloir. Il ne paniqua pas pour autant et lutta pour rester ancré, mais l'attraction était malheureusement trop forte.
Amos cria "Papa !", tendit la main pour l'attraper, mais son maître était déjà entraîné à l'intérieur, le laissant seul derrière.
Dans le noir quelques instants, Mezhelan n'avait aucun contrôle sur sa destination. Et rapidement, il se retrouvait dans un environnement totalement différent. Légèrement désorienté, il se tourna vers l'anomalie derrière lui, maintenant parfaitement statique, qui ressemblait à s'y méprendre à ses portails magiques.
Il ne parvint pas à s'orienter immédiatement, observant le paysage désolé qui l'entourait. Le ciel était d'un noir d'encre, dépourvu d'étoiles et de lune. Mais tout était bien plus clair qu'une nuit habituelle et baigné dans une lueur rougeâtre et intimidante provenant de flammes éparses. Le territoire devant lui ressemblait étrangement à un miroir de son monde, mais dépourvu de vie. Le sol sous ses pieds était craquelé et brûlant, irradiant une chaleur oppressante. Une odeur âcre de soufre flottait dans l'air et irritait ses narines. La colline forestière dans laquelle il se trouvait était calcinée, parsemée d'arbres morts et tordus, lui permettant de voir au travers sur une longue distance.
Mezhelan prit une profonde inspiration pour s'aider à rester calme, mais une sensation dérangeante s'abattit sur sa poitrine, comme si l'oxygène se raréfiait. Un air sec et lourd lui emplit les poumons, mêlé au sentiment qu'il ne lui appartenait pas. Déjà perturbé, sa peau se mit à frémir.
Tous les quatre à l'unisson, à des milliers de lieues les uns des autres.
L'environnement surréaliste lui donnait le sentiment d'être plongé en plein cauchemar et, dans un état second, il commença à descendre prudemment la colline jusqu'à atteindre le lac. Ou du moins ce qui ressemblait au lac qu'il connaissait. Il n'y avait pas une goutte d'eau, juste une étendue de cendres, et sur l'autre rive il ne voyait aucune trace d'Iserlohn. L'atmosphère était lourde et suffocante, comme si l'air lui-même était chargé de cendres.
Son regard chercha spontanément la météorite au fond du cratère, mais un frisson glacial lui parcourut l'échine lorsqu'il eut la soudaine intuition d'être observé. Se retournant lentement, il sentit son cœur s'emballer en voyant l'ombre massive qui se tenait dans son dos.
Imposante et menaçante, la créature se redressa, dépassant largement les deux mètres cinquante. Elle surpassait en stature même les hommes les plus grands que Mezhelan ait connus, comme Johannes. Sa peau nue d'un noir charbon donnait l'impression d'absorber la lumière, et des cornes torsadées s'élevaient de son crâne. Ses bras musculeux, aussi longs que ses jambes, semblaient conçus pour courir à quatre pattes et se terminaient par des griffes acérées, contribuant à son aspect bestial. Ses jambes arrière n'étaient clairement pas humaines non plus, mais ressemblaient plutôt à celles d'un animal. Quant à ses canines inférieures et supérieures, elles se croisaient sous ses lèvres retroussées, formant une grimace sinistre.
'Un démon…' pensa immédiatement Mezhelan, reconnaissant en lui les représentations des livres. Et le regard rougeoyant de cette entité ne présageait rien de bon. Une vague d'adrénaline le traversa, mais ses réflexes furent trop lents, il fut violemment attrapé à la gorge et écrasé contre une souche d'arbre. La rapidité et la force de cette chose étaient démentielles, et une douleur fulgurante se propagea dans ses os lorsque son dos heurta brutalement le bois. Il tenta de se concentrer, réfléchissant à une issue, mais la poigne du démon était implacable. Son visage s'approcha du sien, et le mage inhala malgré lui son haleine chaude.
Il leva les yeux vers ses pupilles rouge vif fendues comme celles d'une bête, et pour une raison quelconque, le souvenir de la vampire d'Iserlohn lui revint en tête. Les griffes s'enfonçaient dans la peau de son cou et ses mains montèrent instinctivement vers les siennes pour essayer de s'en défendre. Pourquoi l'avertissement de cette femme, des années auparavant, ne lui quittait plus l'esprit ? : La menace, c'est toi.
"Ƭu əƨ ʌənu ɉuƨɋu'á ɯoı." grogna la créature, sa voix résonnant comme un écho dissonant dans l'air brûlant : "Ɋuəllə ɕħɐnɕə…"
Mezhelan, malgré la douleur, tenta de saisir les propos de cette chose, mais ce langage lui était totalement étranger. Que disait-il ?
"Ƭu əƨ ʌʁɐıɯənʇ ʌənu ɉuƨɋu'á ɯoı…" répéta le démon, cette fois avec une intonation presque moqueuse, ses lèvres formant un rictus grotesque : "Ƿɐuʌʁə pəʇıʇə ɕʁęɐʇuʁə ɋuı uʇılıƨə ınɕonƨɕıəɯɯənʇ ləƨ ęnəʁƃıəƨ ɯʎƨʇıɋuəƨ…"
Sa magie, pourtant si instinctive, échappait à Mezhelan à mesure que le mal irradiait dans son corps. Mais la souffrance et la peur se transformèrent en une solide détermination tandis qu'il mobilisait toute sa concentration pour tenter d'invoquer son feu. Ses mains, toujours cramponnées aux poignets de son assaillant, commencèrent à produire de la lumière, puis des flammes jaillirent de ses doigts, enveloppant les bras monstrueux qui l'agrippaient.
La créature rugit de fureur, mais paraissait davantage irritée que blessée. Sa prise se resserra brusquement, coupant le souffle du magicien, tandis que son autre main saisit celle qui produisait des flammes. Elle fit craquer son articulation sans hésitation, savourant tout cela comme un jeu sadique.
Une douleur aiguë traversa Mezhelan au moment où il sentit son os se briser, mais son cri de supplice fut incapable de quitter sa gorge. Il manquait de plus en plus d'oxygène et perdit peu à peu le fil de ses pensées, qui convergèrent vers Amos.
Le démon approcha à nouveau son visage terrifiant, forçant subitement son front contre le sien.
Une sensation désagréable traversa immédiatement le mage, comme une infection sournoise s'infiltrant dans ses veines, rendant chaque battement de cœur douloureux. Ce calvaire lui provoqua des larmes le long des joues, mêlées à une profonde confusion, mais il refusa d'abandonner sans se battre : 'Mon garçon m'attend, il a besoin de moi.' pensa-t-il distinctement en rassemblant ses forces.
Il concentra son pouvoir sur le vent, cherchant à créer une rafale suffisamment puissante pour se dégager. La bourrasque les percuta tous les deux, soulevant impétueusement les cendres et les débris à son passage, mais son adversaire y résista.
Le visage de ce dernier se crispa dans une expression cruelle, et il enserra encore davantage son cou.
Mezhelan éprouva un craquement sous la pression, et aussitôt, du sang lui coula de la bouche : 'Je vais mourir…' réalisa-t-il, sentant sa fin venir.
La créature se mit à lécher le sang couvrant son menton et ses lèvres, savourant chaque goutte avec un plaisir palpable. Ses pupilles rougeoyantes s'animèrent d'une lueur plus intense, comme si ce goût éveillait une fascination perverse, tel un prédateur s'amusant avec un gibier encore vivant.
Ce geste amplifia la nausée de Mezhelan, dont l'horreur se mêlait au dégoût. Jamais il n'avait ressenti une telle impuissance, une terreur aussi viscérale, alors même que la vie s'échappait peu à peu de son corps.
Le démon fit une pause, presque théâtralement, avant de passer à nouveau sa langue chaude sur le visage de sa victime pour s'en délecter.
Utilisant son poignet encore valide, le mage saisit le poignard à sa ceinture d'une main tremblante : 'Pas sans tout tenter… nom d'un chien !' s'encourageait-il, parvenant à le dégainer pour planter la lame dans le flanc de cette chose.
La créature le lâcha dans un mouvement de surprise en rugissant : "Ƈoɯɯənʇ oƨəƨ-ʇu, ʌəʁɯınə ?!"
Le mage, glissant le long de la souche, savait que ce serait son unique chance et qu'il n'avait pas beaucoup de temps. Totalement focalisé sur l'ouverture d'un portail à ses côtés, il en oublia de respirer. Aux premières lueurs éthérées, il réunit toutes ses forces pour se jeter à travers sans hésiter, mais sentit une nouvelle fois la main impitoyable du monstre, percutant cette fois sa tête. Il fut projeté sur le côté, tombant les pieds en avant dans sa porte inachevée. C'était une nouvelle fois violent, la douleur irradia dans tout son corps et il perdit connaissance en sombrant dans le vide.
Son esprit oscillait entre semi-conscience et inconscience totale. Cet espace ne lui permettait pas de s'oxygéner correctement, et ces ténèbres froides ne laissaient pas non plus ses blessures coaguler. Cela dura peut-être une éternité, il n'avait plus la notion du temps. Il erra ainsi sans parvenir à ouvrir le chemin, perdu et incapable de distinguer les rêves de la réalité, tant son esprit était brumeux. Lorsqu'inconscient, le visage souriant d'Amos lui apparut, il se crut mort. Mais l'instant d'après, il percuta des pierres froides, face contre terre.
Prochainement : Amos
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