Prologue

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La mort.

Ce mot nous fait peur, nous tétanise, nous offre des nuits blanches.

Il est redouté, craint et, malgré toutes nos prières, il nous rattrape toujours, quoi que nous fassions. Nous regardons les autres traverser ces épreuves parfois avec empathie, parfois en jugeant, ou en s'éloignant mine de rien. Le malheur des autres nous rappelle que tout un chacun est vulnérable, que personne n'est à l'abri. Souvent, nous préférons nous enfuir plutôt que de nous faire éclabousser par les larmes de nos congénères. Sait-on jamais, cela pourrait être contagieux et faire exploser la bulle de faux-semblants que nous nous efforçons de maintenir autour de nous.

Le déni.

Cette fonction particulière que nous activons pour tenter de nous protéger.

Mettre des œillères, fermer les yeux, ignorer les signes, faire comme si cela ne pouvait jamais arriver…

Cependant, vous pouvez édifier autant de barrières que vous le voulez, que vos murs soient en paille, en bois ou en brique, la grande faucheuse viendra souffler sur vos maisons et vous vous retrouverez seule face à elle.

Moi-même j’ai vécu une bonne partie de ma vie de ce côté de la barrière, les yeux fermés sur la réalité, paupières closes, hermétiques. J’étais obsédée par le besoin de créer une illusion parfaite du bonheur. J’ai partagé à outrance des photos souriantes de vacances sur mes réseaux sociaux, des vidéos d'anniversaire, chapeau pointu vissé sur la tête, soufflant des bougies chaque année plus nombreuses. J’ai affiché les sorties poney avec mon rayon de soleil, nos séances d'éclaboussures dans la piscine avec des brassards roses, ses premiers pas, ses premiers tours de pédales toute seule sur son vélo, sa première récitation où elle écorche certains mots.

Tous ces souvenirs...tout ce temps qui ne reviendra pas...tous ces moments qu'elle ne vivra pas.

J'ai voulu croire que cela durerait toujours, sincèrement convaincue que je la protégerais contre vents et marées. En même temps, comment aurait-il pu en être autrement ?

L’illusion.

Nous croyons profiter de chaque instant alors que la plupart du temps nous courons dans la mauvaise direction, frôlant juste l'essentiel.

Son sourire innocent, ses yeux rieurs, son besoin de moi quand elle était triste; c'était ça, simplement ça, le sens de toute ma vie. Pas ma carrière, pas mes amies, pas ma famille, pas le nombre de mes followers. Juste ELLE.

L’éveil.

Ma seconde vie a commencé quand je suis morte de chagrin la première fois. Au moment où j'ai réussi à renaître car je n'ai pas simplement « continué à vivre » , je suis devenue une tout autre personne.

Dans ces épreuves il y un avant et un après, jamais d'entre deux, pas de retour possible. Le chemin ne continue pas devant nos pieds, nous tombons dans un ravin infini !

Il ne tient qu'à nous de nous rattraper, de trouver un autre chemin ou de dévaler la pente infernale.

La douleur insurmontable.

J'ai perdu ma fille. Le seul être qui me donnait envie de me lever tous les matins. Elle s'appelait Rose, elle avait six ans.

Une boule de douceur, un caractère un brin autoritaire, elle voulait devenir maîtresse ou chanteuse. Très original pour une fille de son âge !

Elle mettait un désordre indescriptible dans la maison et ne se contentait jamais de la tonne de jouets qu'elle avait déjà. Je haïssais les publicités de chaînes pour enfants car je craquais toujours devant sa moue quand elle me réclamait quelque chose. Je sais ce que la plupart des gens pensent, ce n'est pas bien de céder aux caprices d'un enfant et c'est vrai. Mais ce qu’ils ne prennent pas en compte, c'est que moi je savais qu'elle ne deviendrait jamais une adulte, pas même une adolescente, une fichue épée de Damoclès au-dessus de sa tête sans cheveux.

Je ne donnerai pas tous les détails des deux années qui ont suivi l'annonce de son cancer. Je me contenterais de dire que ce soir de Janvier, quand son corps a lâché prise, elle a emporté avec elle toute envie de vivre, tout ce qu'il y avait de plus beau dans le monde; les couleurs, les odeurs, les mélodies harmonieuses, les sensations divines. Il ne restait plus que du vide en moi. Un cœur desséché par les épreuves, une âme tourmentée par les « et si j'avais fait ceci ou cela ».

Je suis morte aussi à cet instant et personne ne pouvait comprendre !

La rupture

Les mois qui ont suivis ont mis fin à ma relation avec le père de Rose. Tout s'est mis à battre de l'aile entre nous dès que nous sommes sortis de l'hôpital, le diagnostic posé et nos cœurs broyés.

Non pas que je veuille le critiquer, mais il n'avait pas les épaules pour surmonter ces épreuves. Lui le fêtard, le gentil garçon qui faisait rire tout le monde. Au début nous avons fait front ensemble, même si je sentais qu'il tentait de fuir. Puis les jours ont passé, installant un fossé de plus en plus grand entre nous. Il faisait tout pour rentrer le plus tard possible, éviter d’affronter cette vérité terrible qui le foudroyait quand il était à la maison.

Au bout des deux ans, nous étions devenus des étrangers sous le même toit. Moi qui ne m'occupais plus que de Rose et lui qui nous évitait à tout prix.

Notre séparation fût tellement naturelle que je n'en ai même pas été attristé. Cela peut paraître étrange, mais je l'ai réellement aimé pourtant. Nous étions si heureux avant tout ça. Il me faisait rire, me surprenait, avant…

Je ne lui en veux pas, même si je crois que lui est rongé de remords de ne pas avoir été là pour elle. Il a cru se protéger en s'éloignant alors qu'il n'a fait que se voiler sa face.

Il prend souvent de mes nouvelles. Nos échanges sont brefs, chargés de trop d'émotions partagées et de non-dits. Que pourrait-on se dire ?

L'élément déclencheur.

Mon chemin sinueux m'a mené jusqu'à cet homme mystérieux et tout a basculé. TOUT !

Mes convictions, mon coeur, mes croyances, tout a été mis à mal, tout a vrillé. Il a été mon sauveur et la cause de ma folie. Il a réveillé ma vie et étouffé mes doutes, pourtant notre histoire est loin d'être un doux conte de fées.

L'histoire que je vais narrer commence donc ici, un an après le drame de ma vie.

Bonne plongée dans notre folie !

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