Chapitre I - la chute (partie 2/2)
Extérieur du Monastère * Planète Lanh-Yakéa
Le vaisseau venait de se poser, une dizaine de soldats en sortit. Ils étaient là, immobiles, à observer le monastère avec des lentilles à puissant zoom numérique.
- Soldat ? Que voyez-vous ? demanda le colonel Delapynsse.
- Je vois le monastère de Lanh-Yakéa. Il ne semble y avoir personne pour le moment.
- Très bien ! Faisons sortir ces rats d’humains de leur terrier.
En prononçant ces mots, le colonel Delapynsse hurla un ordre en langue des officiers, le vaisseau s’envola et commença à tirer sur le Monastère. Un champ d’énergie se matérialisa autour du bâtiment et amortit les tirs.
- Le tir ne semble pas concluant mon colonel.
- Soyez un peu positif, nous avons au moins une idée des défenses du monastère. Il va falloir agir de façon plus violente du coup.
- Je reçoit un message de l’amiral Péréion mon colonel.
- Que dit-il soldat ?
- Il semblerait que deux faisceaux de téléportations aient été interceptés à partir du monastère jusqu’à un point du vide en orbite autour de la planète.
- Ces humains sont donc bien aussi lâches que les légendes le disaient.
La petite troupe de soldats Langoustiens progressait lentement vers la montagne, tous admiraient ce paysage si étranger. Ils n’avaient pas l’habitude de voir de telles choses. Leur monde étant majoritairement couvert par un océan global.
- Un peu de nerfs les petites larves ! On doit avoir rendu un rapport dans une demi-heure au roi. Hurla le colonel à ses troupes.
Le colonel et sa petite troupe s’étaient agglutinés devant la porte principale. Le champ d’énergie protégea vraiment chaque parcelle du Monastère. Une question venait à l’esprit du colonel mais fut explicitée par un de ses subordonnés.
- Colonel ? Si leurs défenses sont si résistantes, pourquoi se sont-ils téléportés ?
- C’est une bonne question soldat. Il va falloir trouver une façon d’entrer. Répondit le colonel. Déployez-vous dans le périmètre et trouvez une issue.
- A vos ordres mon colonel.
- Et appelez aussi les ingénieurs, qu’ils nous trouvent une idée depuis le vaisseau pour ouvrir une brèche dans ce champ de force.
- Tout de suite
Le soldat prit en compte l’ordre et prit contact avec le vaisseau. La conversation fut brève, les ingénieurs arrivaient avec une brillante idée.
Dans les couloirs du monastère
J’étais là seul, je me tenais dans le couloir sans les deux humains qui m’avaient jusque-là accompagné. Ils avaient, si l’on puis dire, déserté à leur devoir envers moi. Mes pattes étaient bloquées, j’essayais d’avancer mais sans succès. Que se passait-il ? mes pattes refusaient de bouger. Alors qu’une drôle de sensation montait en moi, Blue réapparu devant moi. Elle venait de se téléporter de nouveau.
- Viens là le chat ! fais vite ! s’énerva t-elle
Voyant que je ne bougeais pas, elle s’avança et me saisit. Elle activa de nouveau son téléporteur et nous rejoignirent instantanément Yanh. Nous étions dans un drôle de pièce avec un gros tube penché.
- Merci Maitre Blue !
- Allez maintenant tu n’abandonnes pas ton chat, tu me le tiens fermement. Ordonna-t-elle. Il va falloir qu’on retrouve Nikola.
- Ne devrait-il pas être ici ? lui demanda Yanh.
Tandis qu’ils prononçaient ces mots, la porte dans le coin de la pièce s’ouvrit : Nikola entra. Il avait beaucoup sué, il était essoufflé : il avait couru.
- Je suis là. Répondit-il entre deux respirations
- Que faisiez-vous Nikola ? demanda Blue.
- J’ai été activer le générateur de champ de force. Et visiblement, j’ai été plutôt bien inspiré.
- En effet, je dois vous remercier au nom du grand Esdraël. Il vous remerciera pour votre action envers lui.
A la mention de mon nom je m’immobilisais : ils parlaient de moi ? Ils avaient donc conscience de mon existence ? Mais comment … ? Je ne savais pas trop quoi faire, j’étais là dans cette pièce et ces petits êtres fragiles parlaient de moi comme si je n’étais pas là. C’est à cet instant que Yanh fit un pas sur le côté pour regarder par la fenêtre.
- Euh … Maitre, Monsieur Nikola ? dit en hésitant Yanh devenu livide.
- Yanh s’il te plait laisse nous discuter. ordonna Nikola.
- Pourquoi ils ont amené ce gros disque devant la porte principale ? demanda Yanh.
- Quoi ? de quoi parles tu ? demanda Blue.
Elle s’avança vers la fenêtre, bientôt elle devint livide à son tour, à l’extérieur des soldats Langoustiens se hâtaient autour d’un disque de lumière.
- Ce sont des …
- Des quoi ? Enfin Maitre Blue, dites le ! fit Yanh
- Des ennuis ? tenta Nikola
- Oh que oui … ce sont des soldats Langoustiens. Ils tentent de défoncer le champ de force à l’aide d’un bélier magnétique. Ces appareils sont de mini-pulsars artificiels, et ils vont détruire complètement le champ. Il faut les persuader d’arrêter.
Devant la porte principale
Deux ingénieurs militaires étaient arrivés avec leur idée : défoncer le champ grâce à leur bélier-pulsar. Les soldats partis en exploration revinrent à l’entrée.
- Combien de temps pour défoncer ce champ de force ? demanda le Colonel
- Il va falloir compter une bonne minute, l’énergie solaire n’est pas parmi les plus intéressantes, surtout quand on considère l’épaisse atmosphère et la présence en abondance de nuages. Répondit un des ingénieurs.
- Soldats ! qu’ont donné vos explorations du périmètre ? les interrogea le colonel.
- Pas grand-chose colonel le champ couvre bien tout le monastère et se termine sur la montagne.
- Très bien, prenons contact avec eux le temps de permettre le chargement du bélier. Fit le colonel.
A l’intérieur
- Que font-ils ? demanda Nikola.
- Je ne sais pas trop, on dirait qu’ils sortent un amplificateur de son. Expliqua Blue.
- Pourquoi ne pas simplement dire qu’ils sortent un mégaphone ? demanda Yanh au Maitre.
Le silence se fit, le Maitre Blue avait été corrigé par son élève. Je trouvais cela très drôle tout en craignant qu’un jour quelqu’un ne me corrige moi-même. Je sentais quelque chose me démanger. Sans aucune volonté de ma part, ma patte arrière droite partit commencer à gratter.
- Tu as des puces pépé ? demanda Yanh
- Il ne va pas te répondre tu sais … fit le Maitre en soupirant.
- Si ! il le fera, mais il faut d’abord trouver l’appareil de communication animale de Dany.
- De quel appareil parles-tu ? de celui-ci ? demanda Nikola en présentant une sorte de bague.
- Exactement ! donnez-le-moi s’il vous plait, ou bien mettez le lui. Fit Yanh
Les humains avaient donc un moyen de communiquer avec moi ? Il fallait qu’ils s’en servent. Que je puisse leur apprendre comment traiter leur créateur, et accessoirement, leur demander un peu plus d’Orbitine… j’aime vraiment beaucoup cette substance, j’ai tellement bien fait de la créer. Les mains de Nikola s’approchaient, il me saisit la patte et me passa la bague autour de la patte. Cela me fit très bizarre, j’avais la patte toute serrée dans ce ridicule petit anneau. J’allais prononcer quelques mots quand tout à coup une brosse voix se fit entendre.
- Sortez de là immédiatement et il ne vous sera fait aucun mal.
- Comme si vous pouviez nous faire du mal ! hurlais-je.
Ce fut la surprise générale. Le Maitre, Nikola et Yanh me fixaient comme si j’avais d’un coup changé de visage. Ils semblaient surpris.
- Cessez de me regarder comme cela bande d’humains. Leur dis-je en les regardant. Laissez-moi m’occuper de ces andouilles.
- Pépé ? tu … pourquoi tu parles comme ça ? demanda Yanh
- Où as-tu trouvé ce chat Yanh ? Demanda Nikola.
- Il est tombé du ciel devant moi quand je rentrais au Monastère hier. C’est pour ça que je suis arrivé en retard.
- Je vois. Mais dans ce cas, qui es tu ? et d’où viens-tu pépé ? demanda Blue
- Je suis Esdraël, grand créateur de cet univers et je vais vaporiser ces abrutis.
- On vous entend ! Qui ose blasphémer ainsi ? demande la grosse voix.
La surprise grandissait, à chaque phrase que je prononçais les humains semblaient perturbés. J’espère qu’ils vont comprendre rapidement, je ne voudrais pas avoir à en annihiler certains. Même si ça m’était déjà arrivé par le passé. La grosse voix reprit.
- Moi, le colonel Delapynsse, serviteur du grand roi Gry’Had je vous somme de sortir et de vous rendre, sinon je vais ordonner la destruction du champ et venir vous chercher.
- Venez donc ! Je vous attends bande d’écrevisses mal léchées ! répondis-je en prenant une voix encore plus grosse que la voix amplifiée du colonel.
Pour qui se prenait cet abruti de colonel Delapynsse ? Il osait parler ainsi à son créateur tout puissant ? Mes nerfs de chat commençaient à fatiguer. Il faudrait vite annihiler cette vulgaire écrevisse bipède pour que je puisse retourner à ma recherche de solution pour redevenir moi. Je n’aurais pas dû donner un tel égo aux Langoustiens. Au moins quand j’avais conçu les Homarsiens j’avais pensé à leur donner le respect d’autrui. Aurais-je commis une erreur ? Non, il me suffirait de les annihiler pour régler cela.
- Ceci était une insulte colonel ? demanda un des soldats.
- Oh que oui ! Lancez l’assaut ! Ingénieurs ! Ouvrez-moi ce champ de force, c’est un ordre.
Le colonel Delapynsse devenait rouge de colère, il n’aurait pas fait bon être devant lui et lui redire cette insulte. Les Ecreviciens étaient un peuple rival depuis des milliers d’années. Jamais une guerre n’avait pu conclure à la supériorité d’un camp ou de l’autre. Il était inacceptable cependant pour un digne Langoustien d’être traité comme un vulgaire Ecrevicien.
- Attendez colonel ! C’est notre chat ! Il ne sait pas ce qu’il dit ! Fit Blue un peu paniquée.
- Mais bien sur que … commençais-je avant d’être interrompu par Yanh qui me fixait. Je ne l’entendis pas parler mais je compris ce qu’il voulait dire. Il me fixait avec un regard qui signifiait « tais toi s’il te plait on est déjà dans une situation pourrie alors ne va pas empirer la situation ».
- Sortez et présentez-nous vos excuses ! ordonna le colonel.
- Nous sortons, pas la peine de vous énerver. Répondit Nikola.
La petite troupe d’humains se mit en marche vers la sortie, Yanh me tenant toujours dans ses bras, je n’arrivais pas à savoir si c’était pour me protéger ou pour le protéger lui. La traversée des couloirs se termina rapidement. La grand porte était devant nous, Yanh me posa sur le sol derrière lui.
- Reste là Esdra’
- Ne me donne pas d’ordre s’il te plait.
- Ce n’était pas un ordre sale bête ! c’était une recommandation. Cria Blue.
- Ouvre cette porte ! cria le Colonel au travers de la porte. Sortez de là !
Le Maitre ouvrit la porte, et tous trois franchirent le seuil, le champ se désactiva à la demande du Maitre. Tous étaient désormais face aux soldats langoustiens. Ils étaient assez étranges, les humains n’en avaient vus que dans les livres d’Histoire Galactique. En effet ils s’étaient déjà retrouvés opposés lors de la guerre de la nébuleuse de la chaussette. Les Avezéens et les Langoustiens étaient alors alliés. Suite à la trahison du prince Avézée XXI, la guerre s’était retrouvée menée par trois camps différents et allègrement gagnée par les humains. Mais depuis, il était bien rare de voir les Langoustiens, dont l’égo avait été détruit par cette défaite. Seuls les biologistes en avaient vu, en effet leurs larves étaient de bons modèles d’études. C’était d’ailleurs là la cause de la guerre, les Avezéens trouvaient injuste que les humains se servent des œufs de leurs cousins aviens en cuisine et les Langoustiens eux, prônaient la fin de l’expérimentation sur leurs larves élevées et clonées en laboratoire. La guerre n’avait conduit à rien de ce point de vue-là.
Les langoustiens avaient deux pattes sur lesquels ils tenaient debout, leur station bipède presque parfaite et leur taille d’un mètre trente environ les rendait presque ridicules. Ils avaient une petite paire de pinces identiques et possédant trois callosités qui ressemblent vaguement à des doigts. Dans ces callosités, les Langoustiens tenaient des petites baguettes : leurs armes. De petites lances à venin. A l’origine les Langoustiens produisaient un poison violent, mais à force de mutations et de temps ils avaient perdu cette aptitude et s’étaient vus obligés de produire industriellement le poison pour leur armement. J’avais toujours trouvé ce soucis incroyablement drôle … Je les avais dotés de telles facultés et eux l’avaient perdue. Comme quoi avoir mis en place l’évolution n’était peut-être pas une bonne idée…
Ces considérations furent interrompues par le colonel visiblement exaspéré par les regards insistants qui le parcouraient lui et ses troupes.
- Cessez de nous reluquer ainsi ! Ordonna le colonel
- Oh ça va hein ! J’ai quand même le droit de contempler le résultat de ma création ! lui répondis-je
Je sentis que j’avais dis une bêtise à l’instant où les soldats pointèrent leurs armes sur moi et les humains qui m’accompagnaient. La peur montait en moi, ce frisson désagréable. Je commençais à sentir que j’avais généré ce sentiment en mes créations… Par pur plaisir.
- Tu blasphème le chat, tu ferai mieux de ravaler tes propos.
- Mais non, je ne ravalerai rien du tout ! Ne parle pas ainsi à ton Dieu.
- Pour qui te prends tu ? ou plutôt, de quel droit te prends-tu pour Dieu ? demanda le colonel en s’avançant.
- Mais je me le permets par mon identité, je suis ton Dieu !
La colère montait dans l’esprit du colonel, il se crispait et tenait fermement son arme pour résister à l’envie de transpercer et de tuer cette vile créature devant lui. La résistance ne dura pas. Il perdit le contrôle et me planta sa lance sous le nez en hurlant
- Montez dans ce vaisseau ! immédiatement
- Très bien Grincheux II … Nous vous suivons répondis-je
Le vaisseau s’ouvrit et la petite troupe pu monter. Les humains étaient désormais enfermés avec le Colonel et le chat. Le colonel leur installa des menottes, il ne jugea pas utile de m’en installer et n’en installa pas non plus à Yanh. Sans doute un gamin serait-il une bien faible menace.
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