Chapitre 8

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Quel grincheux ! Lysabel s’éloigna d’un claquement de langue. Elle faisait de son mieux pour se montrer agréable, pour faire la conversation et voilà qu’elle se faisait renvoyer comme une malpropre. Quelle ingratitude !

Kith l’accueillit d’un sourire.

— Te voilà déjà ?

Elle haussa les épaules.

— Il n’a rien dit de probant.

Kith hocha la tête.

— Ça ne m’étonne pas. C’est un taiseux. Un solitaire, ajouta-t-il face à ses sourcils froncés. Tu as bien vu, non ? Il ne reste jamais tard le soir. Il ne se mêle pas aux autres.

— Gisèle et Dimitri ne viennent pas non plus, rétorqua-t-elle.

Kith roula des yeux.

— Ils sont en couple ! Évidemment qu’ils ont d’autres choses plus intéressantes à faire.

Il redevint sérieux.

— Zémus a pris cette attaque bien trop à la légère. Reste sur tes gardes.

— Je le suis, rétorqua-t-elle, piquée. Et Roxx aussi surveille nos arrières, si tu veux tout savoir.

— Parfait. Parce que si je me souviens bien, la route serpente entre les collines et ça me parait être des lieux propices pour une embuscade, maintenant que nous avons quitté la forêt.

— Prends mes rênes, je vais faire une reconnaissance.

— Si vite ? sursauta-t-il.

— Autant vérifier.

Le ciel était clair, malgré la présence de quelques nuages moutonneux et elle n’aurait qu’à garder une altitude suffisante pour rester hors de portée d’un arc.

— Tu diras à Io de t’accompagner ?

Elle renifla en quittant les étriers pour s’accroupir sur le dos du cheval.

— Cet idiot ? Hors de question que je lui fasse ce plaisir.

Elle bondit dans les airs, battit puissamment des ailes pour prendre de la hauteur. De là-haut, la caravane était visible dans son entièreté. Elle décrivit un large cercle, cherchant du mouvement. Elle aperçut des lièvres, une harde de biches menée par un cerf aux bois lourds, un faucon en vol stationnaire qu’elle prit soin de ne pas déranger.

Puis elle dépassa la tête de la caravane, suivit la route pavée. Bien entretenue. C’était étrange, d’ailleurs, vu le faible passage. Ils n’avaient encore croisé personne. Elle atteignit rapidement les collines que Kith lui avait décrites. Donc, il avait eu raison. Elle ralentit, attentive. Des buissons, quelques arbres, des rochers éboulés non loin de la route.

Et personne. Elle agrandit son cercle, chercha des signes de présence, en vain.

Elle hésita à s’approcher davantage. Elle était seule, ici. Kith savait où elle était, mais quand s’inquièterait-il, si elle ne revenait pas ? Les arbres masquaient la visibilité, même s’ils étaient peu nombreux.

Une tâche noire attira son attention. Elle s’approcha, atterrit en tirant son épée. Elle se pencha pour toucher les cendres, froides. Mais un feu avait bien été allumé ici. Elle se redressa et examina les alentours. Personne, évidemment.

Elle pinça les lèvres. Ils avaient oublié de dissimuler les restes de leur feu, mais semblaient avoir bien camouflé leurs traces. Ou elle arrivait trop tard.

Elle reprit les airs, s’avança encore un peu. Plus loin, la route longeait une falaise ; elle inspecta les hauteurs garnies de chênes et de buissons. Des cachettes parfaites, et elle ne s’approcherait pas davantage seule. Par contre, elle demanderait à Zemus l’autorisation pour une reconnaissance à plusieurs.

À l’écart du chemin, il y avait même un joli coin pour camper, avec une rangée de peupliers qui protégeaient du vent. Le sol paraissait plat, couvert d’une herbe rase qui ne poserait pas de problème aux roues solides des chariots.

Satisfaite, Lysabel vira et revint vers la caravane. En quelques minutes elle retrouva la ligne étirée du convoi, plana jusqu’à Kith et se laisser tomber à proximité. Bien dressé, son cheval broncha à peine et elle l’enfourcha avant de reprendre les rênes.

— Tu as vu quelque chose d’intéressant ?

— Peut-être. Mais je n’aime pas me répéter. Viens.

D’un coup de talon, elle fit accélérer sa monture. Kith la rejoignit après un regard en arrière.

— Josh n’a pas l’air très content.

— Et que veux-tu que ça me fasse ?

— Comme tu voudras. C’est quand même ton employeur.

— Parce que tu as prévenu Arthurio ?

— Oui. Pendant ton absence.

La satisfaction qu’elle lisait dans son regard était insupportable. Elle accéléra, dédaignant répondre, devinant sans peine qu’il ne se laisserait pas décrocher.

— Ah, c’est toi que j’ai vu aller en reconnaissance, l’accueillit Zemus. Qu’as-tu découvert ?

Elle lui fit un rapport succinct, mentionna le feu mais l’absence de bandits, en tout cas, vu du ciel.

Kith était soucieux et Zemus pinça les lèvres.

— Je m’attendais à ce qu’ils nous tendent une embuscade là, dit-il. Peut-être s’y étaient-ils installés.

— Nous devrions y aller en reconnaissance, proposa Kith. Trois d’entre nous, peut-être ? Il en resterait sept pour protéger la caravane au cas où il s’agisse d’une diversion.

Zemus acquiesça.

— D’accord. Nous en avons encore pour plusieurs jours, à ce rythme, de toute façon. Hum, voyons… Demain matin ? Lysabel, Kith et Abby ? Tu seras capable de nous prévenir rapidement au besoin, comme ça.

Lysabel hocha la tête. Être une ailée avait ses avantages. Io ne ferait pas partie du groupe pour venir aussi les prévenir en cas d’attaque de la caravane. C’était une bonne stratégie.

Ils convinrent d’en discuter davantage ce soir après le repas, puis Lysabel revint à sa place en arrière de la caravane. Si Josh l’accueillit d’un regard, il ne posa aucune question sur son absence. Comment pouvait-il accepter les choses aussi placidement ?

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