Préambule
Je ne sais pas par où commencer. Peut-être par un « bon-jour » ? Car c’est ce que tu m’as apporté après tout. Tu es arrivé et tu as levé de ma vie son voile de plomb, pour le remplacer par un soleil rayonnant, brûlant, incandescent. Presque indécent. Tu vois ; et j’espère que tu ne m’en voudras pas ; c’est pour ce genre de raisons que j’ai (eu) besoin de te le dire : je t’aime. Tu squattes mes pensées constamment. Tu te glisses dans le moindre interstice, remplissant au passage mon cœur et ma petite caboche d’alégresse, d’une certaine mélancolie et de tendresse. Tu as mis une sacrée pagaille en moi tu sais. Pourtant, t’es arrivé discrètement, au détour d’une soirée foireuse entre copains. Tu t’es posé là avec ton grand sourire et tes grands airs. Tu t’es présenté comme un homme fier, mais au fond de toi, on pouvait percevoir la douceur d’une nuée d’hirondelle au printemps. Au deuxième regard, on perçait cette fébrilité, celle d’un bambin (ré-)apprenant à marcher, ces avaries profondes d’un navire ayant subis les outrages du temps. Malgré ton jeune âge, on pouvait lire en toi une histoire complexe : celle d’un marmot aux multiples aventures et avec pour héros un certain toi. Un héros terrifié, abîmé. Fragile, sensible et vacillant aussi. Un héros sans cape, sans œil d’Agamotto, avec une certaine idée de la Batmobile et la malice d’un Loki jeune et fougueux. Sais-tu d’ailleurs quelle est sa plus grande arme ? Sa détermination pour atteindre le but d’une longue quête : le bonheur et l’apaisement. Ta plus grande force c’est ton envie de vivre. Sur ton chemin, tu as pu croiser de fabuleux compagnons de routes. Mais de ce que j’en sais, tu as dû affronter de multiples antagonistes. De véritables détraqueurs, des adversaires aux comportements particulièrement véhéments, brutaux, destructeur : souvent vicieux et cyniques.
Je me dois cependant de te faire mon mea culpa. Si je t’écris aujourd’hui, c’est aussi par envie de te bousculer. Je veux que tu te rappelles que tu as toi aussi le droit de contempler les étoiles, allongé sur un chemin au bord de l’eau, en respirant les effluves transportés par le vent. Toi aussi tu peux admirer la danse des dernières lucioles que possède ce monde, le bruit des poissons qui sautent dans l’eau calme du cours d’eau. Tu as le droit de frissonner quand une brise fraîche vient caresser ton cou. Tu mérites d’avoir une main dans la tienne, qui t’accompagne, te transporte, te supporte, te relève, ne te lâche dans aucunes circonstances. Être toi-même, tu sais déjà faire, même si tu continues parfois à te cacher sous ce foutu masque d’apparat. Tu dois pouvoir faire confiance à nouveau quand quelqu’un te dit qu’il t’accepte dans ton entièreté. Tel que tu es, avec tes défauts, tes délices, tes rancœurs et tes supplices. Je sais bien que les uns après les autres, ils t’ont exténué. Gants de fer ou de velours, chacun s’est associé pour participer à l’anéantissement programmé de ce petit héros, « mon » héros. Mais tu connais la règle des livres de contes : les gentils gagnent toujours à la fin.
Il m’est venu un instant l’idée de nous raconter comme le ferait Morgane Ortin, à travers nos échanges, de petits morceaux de vie inscrits de manière quasi indélébile sur des serveurs quelque part sur terre. Cette terre qui nous a si souvent perçu comme deux extraterrestres. On m’a dit un jour d’être moi-même, que c’était ça qu’on voulait et pas une image de ce qu’on souhaitait voir de moi. Alors je m’y applique. Tu remarqueras au fil de cette lettre des traces du passé, des mots posés là comme ce tendre baiser sur ma joue un mardi soir. Il y a aussi des références, des phrases puissantes gravés dans la roche comme notre humour de bigorneaux. Apparaîtront aussi quelques déclarations, une mise à nue complète pour te rappeler à quel point on est beau, quoi qu’on ait été, qu’on soit maintenant ou plus tard. Pour te rappeler que le monde et la vie sont une poésie, faits de rires et de désaccords, de mélancolie et d’ivresse.
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