L'Appel du Vide
Je ne sais pas combien de temps je suis restée là, les pieds ancrés dans ce sable noir, les yeux fixés sur cette porte lumineuse. Le temps semble n’avoir aucune prise sur cet endroit. Un instant, je suis sur le point de tourner les talons et de courir, de fuir tout ça. Mais une autre partie de moi, celle qui veut comprendre, qui veut savoir, me pousse à avancer.
Noah, qui était juste à côté de moi, s’éloigne maintenant lentement, sans se retourner. Il marche vers la porte, une démarche calme et assurée. Comme si cet endroit n’était pas un mystère, mais une évidence.
Je fais un pas en avant, puis un autre, mes pieds s’enfonçant légèrement dans le sable. Chaque mouvement me semble plus lourd, comme si quelque chose m’enserrait, comme si ce monde me retenait. Pourtant, je continue à avancer, mon cœur battant la chamade. Mon esprit me crie de m’arrêter, de retourner dans le monde réel, là où les choses ont du sens, mais mes jambes ne m’obéissent pas.
La porte est proche maintenant. La lumière qui en émane est vive, presque aveuglante, mais elle ne brûle pas. Elle me réchauffe, me pousse à avancer. Je peux sentir la chaleur de cette lumière sur ma peau, mais aussi une sorte de… froid qui me saisit à l’intérieur. Comme si, au fond de moi, quelque chose se déchirait.
Noah est là, juste devant la porte. Il se tourne enfin vers moi, un sourire étrange sur les lèvres, presque détaché, comme s’il savait déjà tout ce qui allait arriver. Il me fixe d’un regard intense, ses yeux presque noirs, comme s’il avait absorbé toute la nuit autour de lui.
« C’est ici que tout commence, » dit-il d’une voix profonde, qui résonne dans l’air, mais qui semble aussi lointaine. « Ici, dans ce monde, les règles sont différentes. Ce que tu crois savoir… ce n’est rien. Ce que tu crois voir… ce n’est qu’une illusion. »
Je n’arrive pas à articuler un mot. Je suis complètement bouleversée. Chaque fibre de mon être me hurle de ne pas franchir cette porte. Mais je ne peux pas m’arrêter. C’est plus fort que tout. Une force invisible m’attire, me pousse à franchir cette limite.
Noah fait un pas de plus vers la porte et disparaît dans la lumière. Il disparaît complètement, comme s’il n’avait jamais existé. Il n’y a plus rien. Plus aucune trace de lui. Juste la porte. La lumière. Le vide.
Je m’arrête un instant, un vertige m’envahissant. Et puis, sans même comprendre pourquoi, je fais un dernier pas. Je me dirige droit vers la lumière, sans hésiter. Mes yeux se ferment un instant à l’approche de la porte. Je sais que tout va changer, que je ne serai plus jamais la même.
Quand je rouvre les yeux, je me retrouve dans un autre lieu. C’est comme si tout était devenu plus net, plus précis, comme si chaque détail était amplifié. Mais tout est aussi terriblement étrange. Le ciel est d’un violet intense, presque irréel, et le sol sous mes pieds est fait d’un métal sombre, lisse, froid. Il n’y a pas de bruit. Aucun vent, aucun son. Tout semble suspendu dans le temps.
Je suis dans un immense espace, vide, comme un entre-deux. Aucun repère. C’est comme si je flottais dans un univers parallèle, un endroit où l’espace et le temps n’ont plus de sens.
Je regarde autour de moi, mais je ne vois rien, si ce n’est des formes sombres, des silhouettes qui semblent se dessiner à la périphérie de ma vision. Elles bougent lentement, comme des ombres qui glissent dans l’obscurité. Je ne peux pas distinguer de visages, juste des silhouettes indistinctes.
Puis je remarque quelque chose, au loin. Une silhouette familière. C’est Noah. Il se tient là, à quelques mètres de moi, mais il semble loin, trop loin. Je veux m’approcher, mais mes jambes sont comme paralysées. L’air autour de moi est dense, comme un poids invisible qui m’empêche d’avancer.
Il se tourne vers moi, mais cette fois, ses yeux sont différents. Plus clairs, plus perçants, comme s’ils pénétraient au plus profond de mon âme. Je le vois sourire, mais son sourire n’est pas rassurant. C’est un sourire qui porte en lui une promesse que je ne comprends pas encore.
« Tu vois maintenant ? » me demande-t-il, sa voix résonnant dans l’espace comme une onde. « Ce que tu croyais être réel… ce n’est qu’une illusion. »
Je suis sous le choc. Chaque mot qu’il prononce semble briser un peu plus ce qui me reste de certitude. Mon monde, ma réalité, tout ce que je croyais savoir… tout est remis en question. Ce monde, cet endroit, ce n’est pas le même que le nôtre. Il n’y a aucune logique ici, aucun repère. Je suis dans un vide qui me dévore.
Je fais un pas en avant, puis un autre. J’ai l’impression que chaque mouvement est une lutte contre l’invisible, contre cette force étrange qui semble me tirer vers le bas. Je suis terrifiée, mais je ne peux pas m’arrêter. Il faut que je comprenne. Il faut que je découvre ce qui se cache derrière cette porte, derrière ce monde.
Je fixe Noah, ses yeux, et je sens une vague de désespoir m’envahir. « Qu’est-ce que c’est ? » je lui demande, ma voix tremblante. « Où sommes-nous ? »
Il ne répond pas tout de suite. Il me regarde simplement, un long silence s’installant entre nous. Puis, lentement, il s’avance vers moi, et d’une voix douce, il murmure : « C’est là que tout prend son sens. Tu n’es pas venue ici par hasard. Ce monde… il est la clé. La clé de tout. »
Je sens un froid glacial m’envahir à ces mots. « La clé de quoi ? »
Il se rapproche encore, comme s’il allait me confier un secret. Mais avant qu’il ne puisse dire quoi que ce soit, une lumière intense éclate autour de nous. La silhouette de Noah se déforme, devient floue, puis disparaît. Et moi, je reste là, seule dans ce monde étrange, avec une seule certitude : je ne peux pas revenir en arrière. Je suis trop loin. Trop loin pour revenir.
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