~ 1. Comète ~
2022, 《 Viens Avec Moi 》
Mikhailo Boskovich :
Un voile de fumée s'élève sous mes yeux embués. Le joint entre les lèvres, une bouteille de vodka à mes pieds, mon esprit vacille, suis-je encore en vie ? J'ai tenté de m'envoler, les bras tendus vers l'inconnu. J'ai chuté, ou pas, j'ai heurté le pare-brise. Mon âme n'en a pas pâti mais mon corps est en lambeaux. En morceaux, éparses blessures, je souffre mais j'ignore si mon cœur pleure. La haine glisse dans mes veines, une rancœur viscérale, une rage latente qui souhaite hurler dans le silence de mes nuits.
Sa nuit est éternelle.
Maman, les sombres réminiscences s'éveillent quand, lors de mes insomnies, ton image m'écorche. Tes mots venimeux résonnent encore, pourtant, ton cœur bat grâce à une machine. Comment est-ce possible ?
Entre les lames du volet de ma chambre d'hôpital, j'ai observé les méandres d'une vie fatiguée. Les relents d'un amour passé – telles les couleurs effacées d'une photo épuisée – me venaient à l'esprit. Étais-je un fils abominable pour mériter tant de cruauté ? Tes paumes claquent encore, le ceinturon marbre ma peau même dans mes cauchemars ; ébauches d'une existence empoisonnée.
Les larmes ont laissé des sillons salés sur mes joues ensanglantées, mes cris retentissent lorsque mes lèvres restent scellées.
Dans un manoir, le calme règne, tout comme l'hypocrisie. Les sourires sont factices et la joie sanglote ses éclats de rires fracturés. Les échos de la douleur se réverbèrent contre les murs démesurément hauts de cette luxueuse demeure. Les âmes errent, sans bruit, dans les couloirs infinis, mais ne se rencontrent que lorsque vient la pluie. La solitude, reine de désolation, guide notre avancée sur un sentier tortueux. Les épines de ces roses harassées éraflent ma peau, jusqu'à entamer ma chair calcinée. Leurs regards me cherchent mais ne me trouvent jamais. J'ai cessé d'exister. Tel un courant d'air glacé dans une maison oubliée, je vis de peine et de haine.
J'avale une gorgée de mon breuvage, la brûlure de l'alcool me fait grimacer, moi qui pensais être anesthésié. Le carton du joint me brûle les doigts, entre les volutes de fumée, l'averse se déverse. Le regard vers le ciel, j'admire un nuage aux reflets irisés.
Sur les bancs de l'hôpital, mon regard a croisé le sien. Un être volatile et mystérieux. Dans ses yeux, j'ai lu toutes les peines du monde jusqu'à en égarer les miennes.
J'ai tenté de m'envoler, les bras tendus vers l'inconnu. J'ai heurté le pare-brise, puis j'ai chuté bien après. Je suis tombé sous le charme d'une âme torturée.
Maman, l'amour m'a frappé, je l'ai adoré dès que nos esprits se sont liés. C'était un matin d'octobre, sur un banc dans le parc de cette clinique dans laquelle tu m'as enfermé.
Telle une comète esseulée, mon cœur est gelé. J'erre dans un univers sans couleur où ne demeurent que mes pensées vagabondes. J'aime un nuage à la beauté tourmentée.
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