Chapitre 6

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J'avais eu bien du mal à me lever ce matin. Emma avait dû me secouer encore et encore pour que je daigne enfin me bouger.

Ma soirée m'avait laissé des séquelles autant physique, mes jambes ne voulant plus me porter après tous les pas de danse que j'avais enchaîné, que mental. Mon esprit n'avait aucune envie de se concentrer sur autre chose qu'Antonin. Je ne faisais que penser à hier soir et à son baiser.

À cause de moi nous failllime être en retard. J'avais mis des plombes à me préparer alors que d'habitude j'étais prête en trente minutes à peine. Nous avons dû courir dans les couloirs de l'école pour arriver à l'heure au cours de monsieur Kizo. Il détestait les retards et on l'avait vu maintes fois refuser des étudiants qui s'étaient présentés cinq minutes après la sonnerie.

Toute la classe nous regarda débouler comme des folles dans la salle tandis que Kizo se mit à sourire en voyant nos têtes rouges et nos souffles entrecoupés. Quel sadique.

Malgré notre retard, nos places habituelles étaient toujours libres. Les deux tables au troisième rang collées à la fenêtre, nous nous asseyons toujours à cet endroit. Je sortis mes affaires de dessin même si je savais que jamais j'allais réussir à suivre. Art appliqué avait beau être ma matière de prédilection, je n'avais pas du tout la tête à suivre, ni même à rester éveillée.

Le cours commença mais sans moi. Je somnolais luttant pour ne pas m'endormir. Mes yeux étaient d'un tout autre avis puisqu'ils n'arrêtaient pas de se fermer.

Je me relevait en sursaut lorsque la sonnerie de fin du cours retentit. Je m'étais vraiment endormie. Je n'avais pas du tout vu le cours passer, je n'avais aucune idée de ce qui avait été dit ou fait.

Je jetais un regard vers Emma, et je lus sur son visage qu'elle avait essayé de me réveiller mais n'avait réussi à rien. Je rangeais mes affaires en vitesse essayant de me réveiller j'avais encore du mal à vraiment sortir de ma torpeur.

— Mélanie, je te prierais de rester un moment, m'interpella Kizo alors que je passais devant son bureau.

J'étais mal. Il n'y avait jamais de bonne raison de devoir rester après les cours avec un prof, il n'y en avait que des mauvaises. Je me doutais que j'allais passer un sale moment.

Il attendit bien que tous mes camarades soient sortis et que le dernier ait fermé la porte derrière lui pour se tourner vers moi. Je n'avais pas fière allure avec mes yeux cernés et mes cheveux sûrement en bataille après la sieste que je venais de prendre. Lui me regardait avec ses yeux en amandes qui semblaient pouvoir lire au fond de l'âme. Il avait un charisme impressionnant, c'est aussi ce qui lui valait le respect de tous ses élèves.

— Tu n'as rien à me dire ?

— Je suis désolée, m'empressais-je de dire. Mon comportement est inexcusable, je vous promets que ça n'arrivera plus.

— J'espère bien oui. J'attends beaucoup de rigueur de la part de mes étudiants et malheureusement tu en manques beaucoup ces derniers temps. Laisse-moi finir, m'interrompit-il alors que j'ouvrais tout juste la bouche pour le défendre. Tes autres professeurs m'ont tous fait remonter la même chose, tu n'écoutes plus en cours, ne suis pas les consignes, fais autre chose, et maintenant tu t'endors. J'ai bien peur qu'il faille que j'appelle tes parents pour mettre les choses au clair avec eux.

— Non s'il vous plaît, je ferai des efforts. Je serais plus attentive, je participerais en cours mais s'il vous plaît ne les appelez pas.

— Je suis obligée Mélanie. Et j'espère que comme ça, ça te décidera vraiment à suivre tout ce que tu viens de me dire.

— Mais monsieur…

— Non, cette conversation est close. J'espère qu'elle te fera réfléchir.Tu peux y aller maintenant.

Je sortis de la salle les larmes au bord des yeux. Il s'agissait là de la pire chose qui pouvait m'arriver. J'étais sûre que j'allais me faire engueuler comme jamais je ne l'avais été quand je rentrerai à la maison. Mes parents n'allaient pas me louper.

En sortant je retrouvai Emma et Martin qui m’attendaient juste devant la porte. Leur conversation cessa dès qu’ils me virent. Ils comprirent à mon air grave que ça n’allait pas, mais alors pas du tout.

— Viens on va aller s’installer au foyer et tu vas tout nous raconter.

Emma passa un bras sous le mien autant pour me réconforter que pour me soutenir. Le foyer avait beau ne pas être loin de la classe d’art appliqué, je n’étais même pas sûr de réussir à me traîner jusque là bas. Martin marchait à mon côté, il ne disait rien mais je savais que je pouvais tout autant compter sur lui que sur Emma.

Le foyer était une grande salle tout au bout du bâtiment F. Les étudiants de l’école venaient y perdre leur temps dès qu’ils n’étaient pas à la bibliothèque pour réviser. Entre machine à café et à casse-croûte, les tables de babyfoot, les bornes d’arcades, oui nous étions encore dans les années quatre-vingt chez nous, tout le monde y trouvait son compte.

Nous nous installâmes dans notre coin favoris. Des poufs n’attendaient qu’une chose qu’on s’installe pour eux alors qu’on pouvait profiter des rayons du soleil qui venaient directement taper dans notre direction. Cela faisait tellement du bien, leur chaleur me donna assez de force pour raconter à mes amis mon entretien avec Kizo.

— C’est dégueulasse, d’où les autres profs se sont plaints ? J’en reviens pas, se plaignait Emma à ma place.

— Ils veulent s’assurer de n’avoir que des élites, répondit Martin las.

— Ouai ben les prodiges ils sont à Edison pas ici.

Edison, la deuxième grande école de notre ville, là-bas seuls les prodiges, comme disait Emma, étaient acceptés. Il s’agissait surtout d’art, sous toutes ses formes, et de sport, sous toutes ses coutures. On espérait y former les prochains grands champions et artistes.

— Tu sais très bien qu’ils voudraient pouvoir les concurrencer. Leur montrer qu’ici, ils éduquent les prochains Eiffel ou je ne sais qui encore.

Martin avait raison, nous étions toujours poussés à aller plus haut, à donner plus pour atteindre des sommets, même si nous n’en avions pas envie. J’étais de ceux-là. Si j’étais ici ce n’est que parce que mes parents ont insisté. Ils rêvaient de me voir exceller, de me voir inventer et bâtir les constructions de demain et je voulais tellement leur faire plaisir que j’avais dit oui. Et maintenant on allait les appeler car je ne travaillais pas en cours.

— Tu sais, je suis sûre que ça va bien se passer avec tes parents. Tu n’auras qu’à leur promettre que tout s’arrangera et voilà.

— Si seulement mes parents étaient aussi compréhensifs que les tiens, ralais-je. Je n’ai aucune excuse et je ne vais pas leur raconter que c’est à cause d’un garçon que j’ai rencontré dans la rue quand même. Ils me prendraient pour une folle et plus jamais je ne pourais sortir de chez moi.

— Eh oh, nous interpella Martin. J’ai manqué des épisodes il semblerait alors si vous pouviez me mettre à jour, vous seriez gentille.

Je rigolais de l’air qu’avait pris Martin pour nous sortir ça, mais c’était vrai que je n’avais encore raconté qu’à Emma au sujet d’Antonin. Je repris tout depuis le début et j’appris aux deux tout ce qui s’était passé la veille. Emma était dégoutée qu’on ne se soit pas embrassé alors que selon elle, même sans l’avoir vu, il était certain qu’Antonin en mourait d’envie lui aussi. Martin était plus en retrait bien que j’avais capté le sourire sur son visage quand j’ai mentionné son baiser sur ma joue.

— Ça peut pas finir comme ça ! Vous vous revoyez quand la prochaine fois ?

— Je ne sais pas quand j’aurai le temps d’aller aux terrains mais je ne suis plus très sûre de pouvoir une fois que j’aurai remis un pied chez moi.

— Roh mais si, ne soit pas si pessimiste. Et puis, si tu arrivais à faire le mur avant, tu pourras toujours continuer de le faire.

Elle n’avait pas tort. Et puis en colère ou non, mes parents ne pouvaient pas me punir de sortie à vie, enfin je l’espérais. Ils étaient capables de tout.

Nous restâmes là bien installés dans nos poufs jusqu’à l’heure du déjeuner. J’étais encore récalcitrante quant au fait de rentrer chez moi, mais ma morosité avait plus ou moins disparu. Enfin, elle avait disparu jusqu’à ce que je vois Roman se diriger droit vers nous à la sortie du foyer.

Sa panoplie de courtisanes derrière lui, toutes les filles le regardèrent passer lui faisant les yeux doux, tandis que les garçons tentaient d’attirer son attention pour le saluer. Il ressemblait à une star quand les autres agissaient comme ça et je ne comprenais vraiment pas pourquoi.

— Mélanie ! me cria-t-il presque dessus en arrivant à ma hauteur. Bloque ton vendredi soir après les cours, on va rester bosser ici sur le projet. Tu te souviens ? Le projet ?

— Pas besoin de me le dire comme ça, j’ai compris oui.

— On sait jamais, Kizo ne convoque pas tous ses étudiants pour se plaindre de leur comportement. Et moi j’ai envie de le réussir ce projet alors j’espère pour toi que t’es prête à t’y remettre, sinon je ne manquerai pas de dire que tu n’as rien foutu. C’est clair ?

— Très clair !

Il avait réussi à me mettre en colère l’abruti. J’avais besoin de tout en ce moment sauf de Roman apprenant à tout le monde que j’avais été reprise par un prof.

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