Chapitre 13

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Une semaine que je n’avais pas remis les pieds au terrain. J’avais eu Antonin au téléphone ou en facetime tous les soirs depuis et chaque fois j’avais l’impression de le trouver un peu plus fatigué que la veille.

Le match contre les anciens coéquipiers d’Alexis avait bien ruiné le moral de ce dernier et depuis Antonin essayait désespérément de lui faire remonter la pente. À l’entendre me raconter tous ses essais infructueux, c’était peine perdue.

J'avais envie de le voir, de l'épauler en faisant plus que lui raconter mes journées pour lui changer les idées. Je voulais pouvoir le toucher et le prendre dans mes bras quand sa tâche avec Alexis devenait trop difficile. Je voulais plus. Mais même ça il me l'interdisait. Il ne voulait pas que je vienne les voir, que je vienne le voir. Selon lui, ce n'était pas le moment. Alexis pouvait se montrer de très mauvais poil et même violent dans ces périodes. D’un côté ça ne m’étonnait pas tant que ça, je l’avais connu très suspicieux.

Aller en cours me semblait bien fade à côté de toutes ces histoires. J'écoutais les profs que d'une oreille distraite. Même Emma me trouvait distraite lorsqu'elle me racontait les derniers potins de l'école.

Une nouvelle journée se terminait enfin. Il ne me tardait qu'une chose. Arriver chez moi et me poser sur mon lit pour attendre l'appel d’Antonin. Depuis quand étais-je si dépendante de lui ?

J'attendais le bus avec Emma et Martin. Tous deux discutaient du cours de math ou peut-être de celui d'anglais. J'en avais aucune idée.

— Aïe, me plaignis-je quand Martin m'enfonça son coude dans le ventre. Pourquoi t'as fait ça ?

— Lève la tête.

Qu'elle ne fut pas ma surprise de le voir là. Il approchait un petit sourire sur son visage. Quand nos regards se croisèrent, je sentis aussitôt mon ventre se dénouer et un poids s'envoler de mes épaules.

— Allez va le voir, me souffla Emma.

Il n'en fallut pas plus à mes pieds pour se décoller du sol et lancer mes pas dans sa direction. Sans vraiment m'en rendre compte, plus je m'approchais de lui, plus j'accélérais la cadence.

Arrivée à sa hauteur, je ne pus m'empêcher de me jeter dans ses bras. Il m’entoura et me serra contre lui. C'est fou comme une personne peut tant nous manquer. Qu'est ce que j'étais bien là contre lui. J'entendais son cœur battre dans sa poitrine et donner le rythme au mien. Je sentais son odeur musquée parvenir jusqu’à mes narines. Il sentait la sueur, sûrement avait-il joué au basket toute la journée, pour autant cette odeur ne me dérangeait pas. Elle était son identité, c’est comme ça que je l’aimais.

— Moi aussi je suis content de te voir, me chuchota-t-il à l’oreille.

Sa voix provoqua chez moi un frisson qui me prit tout le dos. Il était impensable qu’une personne ait tant d’effet sur vous en faisant si peu. On resta là, dans les bras l’un de l’autre pendant un bon moment. J’avais que faire des yeux qui se plantaient sur moi. On pouvait parler, je m’en fichais complètement.

Je finis par m’écarter de lui tout en glissant mes doigts le long de ses bras pour finalement m’emparer de ses mains. Je ne voulais plus le lâcher de peur qu’il ne reparte.

— Qu’est-ce que tu fais là ? Je croyais que c’était compliqué de se voir avec Alexis qui a du mal à remonter la pente.

— C’est toujours vrai. Mais j’avais besoin de te voir. On va s’asseoir ?

Je n’aimais pas du tout le ton qu’il prenait. J’avais l’impression qu’il allait m’annoncer quelque chose de grave. J’avais l’impression qu’il allait rompre avec moi alors que nous ne sortions même pas ensemble. Je ne dis rien et l’emmena derrière l’école. Il y avait un petit parc, je n’y étais jamais allée mais je me disais qu’on serait plutôt tranquille là-bas, je n’y avais jamais vu grand monde.

— Tout va bien ? lui demandais-je alors que nous étions assis en silence depuis deux bonnes minutes déjà.

Il sortit une enveloppe pliée en deux de sa poche et me la tendit sans rien dire. Je la pris et reconnu immédiatement le nom du site sur lequel nous avions demandé les informations sur son père. La lettre était encore fermée. Il n’avait pas osé l’ouvrir, pas encore.

— Tu veux qu’on le fasse ensemble ?

Il hocha de la tête. Je lui rendis le courrier et me rapprocha un peu plus de lui pour que nos épaules se touchent. Il prit une grande inspiration et commença à déchirer l’ouverture. Il en sortit deux feuilles.

Je passa une main dans son dos et lui caressa doucement pour lui donner le courage de les déplier. Il m’adressa un petit sourire de remerciement et ouvrit la première. Il nous fallut très peu de temps pour dénicher le nom et le prénom : Merpolin Hugo.

Je sentis Antonin se mettre à trembler contre moi alors qu’il découvrait petit à petit de nouvelles informations sur son père. Je restais là, silencieuse mais bien présente. Je le laissai finir sa lecture. Il finit par replier les lettres et les ranger dans l'enveloppe avec une délicatesse impressionnante.

Il se tourna finalement vers moi et là je découvris ses yeux rouges embués de larmes alors qu'un fin sourire habillait son visage. Je le pris contre moi et le laissa écouler en silence le trop plein d'émotions qui le saisissaient.

— Et maintenant ? lui demandais-je lorsqu'il se releva.

— Je ne sais pas…

— Tu ne veux pas le rencontrer ?

— Il ne sait même pas que j'existe, à tout moment il n'a aucune envie de me rencontrer, de découvrir qu'il a un fils.

— Ou peut-être que c'est tout le contraire. Tu n'as pas le droit de renoncer à le rencontrer par peur du pire. Tu dois tenter ta chance.

— Et alors tu proposes quoi ? Il n'y a ni son téléphone, ni son mail.

— Mais il y a son adresse.

— Qui est à l'autre bout du pays.

— Et alors ? C'est pas comme s’il existait plein de manière d'y aller.

Pour allier le geste à la parole, je sortis mon téléphone de ma poche et lançais internet.

— Plutôt bus, train ou avion ?

— Train ?

Sans attendre je lançais ma recherche et trouvais plusieurs trajets direct. Il y avait l'embarras du choix et en quelques clics voilà que son voyage était réservé pour l'autre bout de la France. J'étais heureuse pour lui mais en même temps je me rendais compte que je venais de lui donner des jours loin d'ici, loin de moi.

— Je reviendrai vite, me promit-il comme s'il avait lu dans mes pensées. Et puis je ne pars que dans une semaine et demie. On peut en profiter d'ici là.

Il essayait de me rassurer et d'une certaine façon il y arrivait, même si cette période sans lui ne me tardait pas du tout.

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