Chapitre 25
J’étais prête. Antonin se tenait à mes côtés. Je lui avais demandé de m’accompagner. J’avais besoin de quelqu’un pour me soutenir dans un moment comme celui-là. Il m’avait rejointe à la fin de mes cours devant l’école d’architecture. Il salua Emma et Martin rapidement avant de monter avec moi dans le bus pour rentrer chez mes parents.
— Comment tu te sens ?
— Nerveuse ? Ne sus-je quoi lui répondre.
Un amas d’émotions était en train de faire la fête dans mon esprit et je n’avais aucune idée de ce que je devais réellement ressentir. Je me mis à trafiquer la fermeture éclair de ma veste lorsqu’il s’empara de ma main pour la garder entre les siennes. Je posai ma tête sur son épaule et fermai les yeux. Le trajet n’était pas long mais je voulais ainsi calmer tout ce qui se passait dans ma tête. J’avais besoin d’un moment de calme.
Lorsque le bus s’arrêta à mon arrêt, nous descendîmes tous les deux et nous nous dirigeâmes vers ma maison. Inutile de lui présenter les lieux, il y avait déjà fait un rapide saut avant de partir pour rencontrer son père. Je me demandais s’il était aussi stressé que moi à l’idée de venir officiellement chez moi, voir mes parents.
Je jetais un regard en coin vers lui et vit à sa manière de tapoter ses doigts sur sa cuisse que oui, il l’était. Au moins nous n’étions pas seuls. On était ensemble et ensemble nous étions plus forts !
— Prête ? me demanda-t-il alors que je poussai le portillon du jardin.
— On va dire que oui.
J’ouvris la porte de chez moi et laissai entrer Antonin pour refermer derrière lui. J’entendais du bruit à l’étage, mes parents devaient être dans leur bureau.
— Papa, maman, je suis rentrée, leur criais-je. Vous pouvez descendre, il faut que je vous parle.
J’avais peur de leur réaction lorsqu’ils verraient que je ne suis pas seule mais tant pis j’avais vraiment besoin de la présence de quelqu’un pour affronter ce moment et Antonin était le mieux placé pour m’épauler.
— Mélanie, qui est ce jeune homme qui t’accompagne ? demanda ma mère en arrivant vers nous.
— Papa, maman, je vous présente Antonin, mon copain. Avant que vous n’en faisiez tout un sketch, ce n’est pas pour ça que je voulais vous parler. On peut aller s’asseoir dans le salon ?
Je vis aux sourcils froncés de ma mère et à la tête penchée sur le côté de mon père qu’ils étaient déjà très surpris de l’initiative que j’étais en train de prendre. D’habitude ce n’était jamais moi qui décidait quand nous pouvions parler. Sauf qu’il était temps que les choses changent.
On s’installa avec Antonin sur le canapé tandis que mes parents prenaient place dans les deux fauteuils. J’avais énormément peur de leur réaction quand je leur dirai. J’avais les jambes qui tremblaient et les mains moites, je détestais cette sensation. Heureusement Antonin était là, il posa sa main au niveau de mon genou et presque aussitôt j’arrêtai de trembler.
Je regardai mes parents un par un puis j'ai pris une grande inspiration.
— Je suis inscrite à l’école Edison pour le prochain semestre.
J’avais lâché ça comme une bombe et j’attendais de voir les dégâts qu’elle avait faits.
— Et tes études en architecture, tu ne peux pas les abandonner comme ça, commença ma mère en tentant de garder son calme alors que je voyais très clairement la paupière de son œil tressauter.
— Si, c’est même l’un des professeurs de l’école qui m’a aidé à faire mon transfert et il sera effectif dès le prochain semestre.
— Et tu n’as pas jugé bon d’en parler avec nous d’abord ?
— Non, j’ai pris cette décision seule. Je sais que vous m’auriez dit non si je vous en avais parlé.
— Bien sûr qu’on t’aurait dit non ! s’insurgea ma mère. On parle de ton avenir là, tu viens de gâcher toute ta vie pourquoi ? Pour faire joujou avec de la peinture ? Ce n’est pas ce que j’appelle un vrai travail.
— Sauf que ce n’est pas faire joujou avec de la peinture que je fais. J’ai un vrai talent pour ça et c’est pas grave si vous, vous ne le voyez pas. Et de toute façon, tout a déjà été enregistré, mon dossier d’inscription a été validé.
— On peut encore appeler l’école pour dire que nous ne sommes pas d’accord.
— Non ! m’énervais-je. Vous n’avez pas le droit de faire ça. Je suis majeure et je prends mes décisions seule à présent. Et si vous n’êtes pas d’accord avec ça ce n’est pas grave. Il est grand temps que vous arrêtiez de dicter chacune de mes décisions.
— Mélanie qu’est-ce que tu nous fait là ? demanda mon père.
— Je prends ma vie en main.
— Tu habites encore sous notre toit alors tu suivras nos règles.
— Si ce n’est que ça, alors je n’ai qu’à partir de la maison, sortis-je sans vraiment réfléchir.
— Et pour aller où ?
— Chez moi, répondit Antonin avant même que je n’ouvre la bouche. Il y assez de place pour nous deux.
Je fus étonnée de sa proposition. Nous n’avions jamais évoqué la possibilité d’emménager ensemble et il me le proposait ainsi devant mes parents.
— Et bien faites ! On verra au bout de combien de temps tu reviendras pleurer pour revenir habiter ici, décida ma mère.
— Très bien ! Je vais faire mes affaires et je pars.
Je me levai suivi d’Antonin et on partit dans ma chambre. J’attrapai ma valise et y fourrai mes affaires. Je pris tout ce que je pouvais emporter. Je ne voulais plus passer une seule seconde dans cette maison. Je vis Antonin récupérer quelques-uns de mes croquis sur mon bureau et les mettre délicatement dans son propre sac. Lorsqu’on eut fini, on repartit par la porte d’entrée de la maison. Hors de question de passer par la baie vitrée de ma chambre. Je ne voulais pas sortir en douce cette fois, je voulais qu’il sache que je partais.
Ils attendaient dans le salon, je vis à leurs regards intrigués qu’ils ne s’attendaient pas vraiment à ce que je fasse mes affaires et pourtant si. C’était fini de vivre sous ce joug. Il était temps que je déploie mes ailes. Je ne pris même pas la peine de leur dire au-revoir avant de partir.
Lorsqu’on arriva à l’arrêt de bus au bout de ma rue, je me laissais tomber sur le banc. J’avais quand même un peu de mal à réaliser ce qu’il venait de se passer, tout s’était enchaîné très vite et je n’avais pas vraiment pris le temps de réfléchir à chaque fois pourtant je savais au fond de moi que j’avais pris la bonne décision.
— Je vais aller chez Emma, murmurais-je pour moi-même.
— Pourquoi ça ? s’étonna Antonin. Je ne plaisantais pas. Tu peux venir chez moi. Je peux t’accueillir sans soucis.
Je tournais mes yeux vers lui. À cet instant précis, je le trouvais encore plus beau que d’ordinaire. Les rayons de soleil venaient jouer dans ses cheveux et faisaient ressortir quelques mèches plus claires que son châtain habituel.
— Tu es sûr de toi ? On ne sait pas ce que l’avenir nous réserve.
— Mais il me tarde de le vivre avec toi.
Je l’aimais, je l’aimais énormément. Je ne savais même que c’était possible de ressentir des sentiments aussi forts pour quelqu’un et pourtant j’étais là. Je voulais que le temps s’arrête et que ce moment dure pour une éternité. Je voulais rester avec lui, à ses côtés.
Je posai mes mains en V autour de ses joues et l’attira doucement vers moi en ne lâchant jamais son regard. Je fermai les yeux seulement lorsque ses lèvres rencontrèrent les miennes. C’est là que je sus que j’avais trouvé le bon.
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