Ch 3 (2/5) [Réécris v2]
Mathias bondit tel un fauve. Les muscles de son cou et de ses bras se tendirent comme les cordes d’un navire et son marteau de guerre décrivit un arc de cercle parfait, droit sur le thorax du forgeron. Vif comme l’éclair, Udiir saisit le manche de l'arme juste sous l’imposante tête d’acier ouvragée. Le jeune Marteau-Stellaire avait commis une grossière erreur en pensant pouvoir vaincre le chaman en force brute. Si personne au sein du clan ne savait à quelle race il appartenait, tous connaissaient sa puissance physique. Udiir saisit brutalement d’une main Mathias, et de l’autre, il abattit son épée sur la clavicule du guerrier.
Mathias se baissa dans un fulgurant réflexe de préservation, puis asséna un violent croc en jambe sur le genou de son adversaire. Ployant sous le choc, Udiir lâcha la hampe du marteau. Mathias saisit sa chance et tenta de porter un revers ascendant de sa masse. Le forgeron eut tout juste le temps de se dégager par une roulade désespérée sur la gauche. Le marteau de guerre ne manqua le chaman que d’un cheveu. Udiir se redressa et d’un bond se rapprocha de Mathias. Le chaman abattit son épée, la lame fendit l’air en une diagonale parfaite sur la nuque du jeune guerrier.
À son tour, Mathias se déroba et l’épée frappa le rocher qui se trouvait derrière sa cible. La lame s’enfonça dans la pierre sans aucune résistance, tranchant l’énorme caillou en deux comme une simple pâtisserie. Aussitôt après, un craquement métallique tonitruant résonna sur le plateau. Udiir s’arrêta et posa les yeux sur son arme. Il poussa un profond soupir à la vue de la lame balafrée par une immense fissure s’étendant sur toute sa longueur.
─ Madame l’arbitre, dit-il, ma lame s’est brisée, puis-je changer d’arme ?
─ Euh…Hum…Oui bien sûr, balbutia Arya.
Udiir repartit vers son paquet et échangea son épée pour la hache de guerre. Mathias était tétanisé, tout comme les deux jeunes femmes. Pourtant, tous trois n'auraient pas dû être surpris : depuis leur plus jeune âge, ils s'entraînaient avec lui à l’art du combat. Pendant près de neuf ans, Mathias et Kiara avaient développé sa maîtrise des armes et Arya s’était chargée de son érudition ainsi que des leçons de combat magique. Mais c’était bien l’environnement rude de la montagne et de la vallée interdite qui avait fait de son corps une forteresse de force brute. À présent, les trois jeunes soldats pouvaient constater le splendide joyau de puissance qu’Udiir était devenu.
Le jeune chaman saisit la hache à double tranchant, puis il se remit en position de combat face à Mathias. Le guerrier au marteau leva son arme et les deux opposants reprirent leur danse de sueur et d’acier. La masse d’acier et la hache d’armes se percutèrent successivement dans une pluie d'étincelles et un tonnerre métallique assourdissant. À chaque coup l’arme d’Udiir produisait un chant métallique semblable au cri d’un rapace fondant sur la proie. Quant au marteau de guerre de Mathias, il fusait dans les airs tel l’objet céleste à partir duquel l’arme ancestrale de sa lignée avait été façonnée pour ensuite en devenir le patronyme.
Les deux guerriers se déplaçaient de façon erratique sur le plateau rocheux. Pour les deux spectatrices, ils étaient semblables à un vol d’oiseau affolé tant ils bougeaient vite. Voyant l’impasse que la confrontation directe représentait, Mathias se dégagea et changea de tactique. Son arme décrivit un arc de cercle décroissant droit vers les jambes d’Udiir. La masse d’acier n’était plus qu’à quelques millimètres de sa cible, mais avec la fluidité de l’eau le chaman se rapprocha de son adversaire et plaqua son pied de toute ses forces sur la hampe de l’arme. Le poids du marteau sembla doubler et Mathias ploya sous l’implacable force d’Udiir. Ce dernier ne perdit pas une seconde et abattit sa hache droit sur la jugulaire du guerrier. La lame luisante s’arrêta à un cheveu de la gorge.
─ Vainqueur, Udiir ! clama Arya.
Le chaman retira sa hache d’armes avant de reculer de quelques pas. Mathias, quant à lui, avait le visage inondé de sueur et son cœur qui battait comme un tambour à ses oreilles. La vitesse et la précision de l’attaque d’Udiir l’avaient déstabilisé, il avait vu la mort. L’esprit embrumé par la retombée d’adrénaline et la fatigue du combat, Mathias retourna s’asseoir sur les marches du perron de l’atelier du jeune forgeron.
─ Je vais…passer mon tour, parvint-il à articuler entre deux respirations.
─ Je crois donc que c’est à mon tour de combattre, dit Kiara en saisissant son épée longue et son écu d’acier orné des armoiries d’Erganane. Voyons comment tu t’en sors avec moi petit frère.
La guerrière sacrée se plaça face au chaman, tous deux adoptèrent une posture de combat. Le son retentissant de la cross de mage lança le nouvel affrontement. Son bouclier d’acier massif braqué devant elle, Kiara chargea. La longue épée fendit l’air en brillant comme le soleil.
Udiir esquiva la frappe de la guerrière sacrée, la lame ne fit que lui effleurer son épaule. Le chaman contre-attaqua et abattit sa hache d’armes droit vers le flanc de Kiara. La guerrière qui avait vu le coup venir pivota et d’un seul coup bien précis de son épée trancha le manche en bois de l’arme d’Udiir. Le fer de la hache d’armes fut projeté sur plusieurs mètres avant de retomber sur la roche dans un tintement métallique. Saisissant sa chance, Kiara voulut mettre son adversaire au sol d’un coup de bouclier. Cette fois encore, l’opposant du chaman avait négligé sa force physique. Udiir bloqua l’écu d’une main avant d’empoigner sa sœur au col de son armure. Déployant toute sa force, Udiir souleva Kiara avant de la lancer tel un projectile. La jeune femme en armure s’écrasa sur le sol en soulevant un nuage de poussière.
Sans perdre de temps, le chaman se rua sur son paquetage et en tira sa dernière arme : une masse d’armes à la tête sphérique ornée de pics. De son côté, Arya se redressa et, arme à la main, repartit à l’assaut. Dans un même mouvement, Udiir se retourna et utilisa la rotation de son corps pour frapper de toute sa force. À la vue de la masse d’armes fusant dans sa direction, Arya stoppa sa course. Campant sur ses positions, la guerrière sacrée fit barrage à l’aide de son lourd bouclier et prononça ses mots :
─ Que la lumière soit mon rempart ! VADEUM BAL’DAR !!
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