Ch 3 (3/5) [Réécris v2]

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La masse d’acier percuta le bouclier de la guerrière sacrée dans un tonnerre métallique. Face à la puissance brute du forgeron, Arya aurait dû, une fois de plus, être envoyée au sol, mais elle ne fut repoussée que de quelques mètres. Autour d’elle et de son armure, un halo doré luisait.

─ Tu fais appel à ton dieu ? demanda Udiir avec sourire.

─ Vu comment tu frappes j’y suis bien obligée, répondit la jeune femme.

En effet, Kiara avait invoqué le pouvoir de Bal’Dar le dieu solaire. Le pouvoir divin avait enveloppé le corps de la combattante, atténuant ainsi l’impact du coup. Udiir était admiratif de la confiance que sa sœur avait en sa divinité. Le jeune chaman lui, n’avait pas cette chance. Certes il respectait et révérait les esprits des éléments et de la nature, sans pour autant leur vouer une confiance aveugle, ni une foi aussi inextinguible qu’Arya, les guerriers sacrés et autres prêtres des peuples d’Erganane.

Sa méfiance envers les divinités lui venait de l’aspect imprévisible et violent d’Ursus, l’esprit de l’ours, son totem. Mais il s’agissait avant tout de la nature imprévisible des dieux. Chaque dieu était différent. Bal’Dar le dieu solaire, père des elfes et des humains était puissant et passionné, parfois fanatique même à l’image de ses disciples. Najyana la déesse des océans et des tempêtes, pouvait être aussi bienveillante que dévastatrice à l’image de la nature changeante de la mer. Bien d’autres déités venaient compléter cette liste et les arguments qui justifiaient l’esprit critique du jeune forgeron vis-à-vis des cultes et divinités en tout genre.

Cependant, l’instant ne se prêtait pas au débat théologique : Kiara s’était relevée. La chevalière aux cheveux écarlates brandit sa lame vers les cieux et d’une voix aussi mélodieuse que puissante dit :

─ J’en appelle à la puissance de l’astre solaire ! GLADIEM BALDAR !

Le ciel se déchira et un trait de lumière incandescent frappa l’épée de la guerrière sacrée. À présent gorgée de la puissance du feu solaire, l’arme irradiait. Kiara leva son épée flamboyante au-dessus de sa tête et chargea. Le temps sembla se dilater autour des deux combattants. Udiir savait pertinemment que si l’arme de son adversaire le touchait, il serait tranché en deux et brûlé vif dans l’instant. Et alors que son esprit tentait de trouver une parade, son corps agit de lui-même. Il sut ce qu’il devait faire. Le chaman empoigna sa massue et ancra résolument ses jambes dans le sol. La guerrière sacrée n’était plus qu’à deux pas de lui lorsqu’il fit appel aux forces des éléments.

BRAH’ZISH BAL’ASH !!

La masse d’armes grésilla bruyamment, fut parcourue d’un arc électrique et finalement la foudre jaillit de la sphère d’acier comme d’un nuage d’orage. Le temps reprit son cours normal et les armes se percutèrent dans un fracas apocalyptique. La lame de Kiara libéra une colonne de flammes dorées qui noircit le sol rocailleux. La masse d’acier d’Udiir déclencha une déferlante de foudre et frappa le plateau en plusieurs endroits.

Les deux énergies se confrontèrent, pendant d’apocalyptiques secondes sans qu’aucune des deux ne l’emporte. Udiir se concentra et puisa dans toutes ses forces, aussi bien mentales que physiques. Ce fut finalement le chaman qui l’emporta. En poussant un rugissement bestial Udiir repoussa Kiara, les éclairs pulvérisèrent la vague solaire en une myriade de flashes lumineux. La guerrière sacrée fut projetée au sol par le souffle de l’explosion.

Le chaman ne laissa pas passer sa chance et bloqua sa sœur au sol. Il plaqua sa botte sur le plastron d’acier et tint la combattante en respect de sa masse.

─ Tu capitules ? demanda-t-il.

Le souffle court, Kiara hocha la tête. Udiir aida sa sœur à se relever, puis, s’asseyant sur le sol, il inspecta sa masse. Hélas comme il le redoutait, la foudre avait sévèrement endommagé l’arme. Le manche était noirci et la tête d’acier était fissurée de toutes parts, semblable à une coquille d’œuf brisée. Le jeune forgeron poussa un long soupir de déception. Une fois encore il avait échoué à façonner des armes assez solides pour résister à la fois à ses coups et canaliser ses pouvoirs chamaniques. Il ramassa le fer de sa hache gisant sur le sol et le réunit avec le reste de ses armes brisées.

─ Toujours pas concluant n’est-ce pas, demanda Arya ?

Son frère secoua la tête.

─ Je dois trouver autre chose.

La sorcière s’agenouilla au côté du forgeron, à présent adossé au mur de la forge. Mathias et Kiara les rejoignirent rapidement, tous deux essoufflés par l'entraînement.

─ Il n’y a qu’un seul métal qui pourrait répondre à tes attentes Udiir, énonça Kiara.

Udiir tourna son regard, sans dire un mot, vers les étagères de son atelier. Là se trouvait un grand sac de toile. Ses trois comparses et lui savaient bien de quoi il retournait.

─ C’est…Compliqué Kiara.

─ Certes, petit frère.

Un long silence suivit. Puis Mathias lança une nouvelle conversation au sujet de la situation dans les différentes provinces d’Erganane. Le sujet emballa les deux sœurs qui, étant restées longtemps au front, avaient eu du mal à s’informer, trop occupées par leur responsabilité d’officier.

─ Je suis également tout ouïe, dit Udiir.

─ Vraiment ? s’interrogea Mathias.

─ Oui, répondit fermement le chaman.

Bien qu’il vécût isolé, il se devait de rester un minimum au courant de ce qui se déroulait dans le royaume. Cet intérêt était toutefois très récent, il datait du début de la guerre, pour être exact. En effet Udiir conscient de la situation de sa nation d’adoption avait réalisé qu’il ferait mieux d’être au courant des actualités du pays.

Mathias ne cacha rien. Udiir aurait pu résumer les choses en une phrase : les choses empiraient ou stagnaient. À Fer-Brasier, le bastion des nains au centre d’Erganane, la production d’armes de siège tournait à plein régime. Dans la province de Castel-Sylvestre située à l’Est de celle d’Arguane, place forte des Marteaux-Stellaire, les récoltes n’avaient pas été faramineuses et la grogne montait parmi le petit peuple. Plus le conflit s’éternisait, plus les répercussions sur la vie paysanne se faisaient sentir.

À l’extrême Est du royaume, Fort-Gran parvenait à garder une situation stable. En effet, grâce aux mineurs et maçons de la province, le seigneur parvenait à maintenir la vie de ses sujets, malgré la guerre.

L’œil du cyclone politique se situait à la capitale Najyuna et sur les terres directes de la couronne. Les écoles et centres d'entraînement militaire étaient sur des charbons ardents, de jour comme de nuit, afin de fournir davantage de troupes. À la cour royale, les nobles et chefs de l’armée débattaient furieusement, depuis des semaines, sur le moyen de repousser les troupes ennemies. Mais surtout comment localiser leur quartier général.

Les trois jeunes gens discutèrent jusqu’au coucher du soleil.

─ Déjà, s’étonna Arya.

En effet l’automne avançait, les journées raccourcissaient et l’hiver approchait inexorablement. L’air se rafraîchit vite.

─ Udiir, dit Mathias, tu ne veux pas descendre au village pour que l’on parle de tout ça encore un peu ?

─ Désolé Mathias mais pas ce soir, les soldats y sont encore trop nombreux.

Mathias soupira, visiblement déçu par cette décision, puis tourna les talons et s’engagea sur le sentier menant au bas de la montagne. Arya et Kiara enlacèrent leur frère encore une fois avant de lui emboîter le pas. Mais avant d’être avalé par la végétation, Arya fit volte-face et dit :

─ Udiir ce n’est pas en restant ici toute ta vie que tu sauras d’où tu viens. Il faudra bien qu’un jour tu oublies Sansa, ce qu’elle t’a fait ne doit pas parasiter toute ton existence

La jeune sorcière reprit sa marche, sans laisser à son frère le temps de répondre, le laissant jurer entre ses dents serrées. Cette nuit-là, Udiir Al’Dann eut beaucoup de mal à trouver le sommeil. Celui-ci le ramenant sans cesse à cette horrible journée d’été où la jeune fille l’avait blessé plus que n’importe quelle arme.

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