Chapitre 25
Étant enfin en vacances, Ben avait décidé de passer la journée au stade, un arc à la main. Elise, quant à elle, resta avec moi pour reprendre l’étude des devis. Pour travailler au calme, loin de l’agitation de la maison, nous nous étions installés dans un coin d’un bar. Tout en buvant régulièrement des sirops et en grignant, on finit, en milieu d’après-midi, à trouver un accord. Les travaux du château allaient pouvoir commencer.
— Merci de m’avoir permis d’apprendre ça avec toi, maman.
— Ce n’était pas trop dur ? Tu es, normalement, encore un peu pour apprendre ça.
— Le plus dur, c’était de choisir entre limiter les coûts ou favoriser les emplois. Mais j’ai bien aimé. Tu as commencé à apprendre ça quand, toi ?
— Quand je suis montée sur le trône. Mais j’ai eu mes premiers cours d’économie à dix ans.
— Tu n’avais rien d’autre ?
— Malheureusement non. Sauf les bases comme apprendre à lire et écrire.
— C’est nul.
— C’est vrai. Mais telle était mon enfance.
— Maman, j’aimerais te parler d’autre chose, mais…
— Veux-tu qu’on aille se promener pour en discuter ?
— Oui, merci.
Je fermais et rangeait tous les dossiers dans mon sac, récupérais mon gilet, payait nos consommations et sortie avec ma fille. À mes côtés, je la sentais nerveuse. Elle jouait avec ses doigts, comme je l’avais tant de fois fait. C’était de famille.
— Qu’est-ce qu’il se passe, chérie ?
— Hier, la maman de Thomas, qui est dans ma classe, est venue le chercher avec un bébé. Tu savais qu’il avait une petite sœur ?
— Je ne savais pas, non. C’est une heureuse nouvelle. On dirait que ça ne te fait pas plaisir.
— Si, bien sûr. En plus, elle est trop belle et toute petite.
— Qu’est-ce qui ne va pas alors ?
— Ça fait quoi d’avoir une petite sœur ?
— Je ne sais pas. Tu devrais demander ça à ta mère. Elle s’est beaucoup occupée de ton oncle après la mort de tes grands-parents.
— Ça doit être cool, non ?
— Je pense, oui. J’ai toujours vu Emma comme une grande sœur, ça doit être pareil. Tu pourrais lui demander aussi. Elle a beaucoup de petites sœurs.
— Tu me verrais en grande sœur ?
— Je suis sûr que tu serais une grande sœur formidable.
— Merci, répondit-elle avec un grand sourire.
— Est-ce que tu serais en train de me dire que tu veux un petit frère ou une petite sœur ?
— Non, pas du tout, mentit-elle.
— Élise, je te connais.
— Hé bien, c’est possible.
— Qu’est-ce que tu peux être maline ! Tu devrais aussi en parler à ta mère.
— Pourquoi ? Je t’ai vu à l’orphelinat avec les bébés. Tu avais un joli sourire.
— Merci chérie, mais parle-lui-en, elle sera contente.
— Merci de m’avoir répondu en tout cas. J’en parlerais avec maman.
— C’est une bonne idée.
En souriant, on continua notre promenade avant de rentrer à la maison. Lui demander de parler à Océane, c’était la seule solution que j’avais trouvée pour ne pas parler à ma fille de la procédure que nous venions à peine de commencer. C’était encore trop tôt. Quand Océane rentra, je montais dans la chambre pour laisser mes deux amours discuter ensemble. Une vingtaine de minutes, ma femme me rejoignit, s’assit sur le lit à côté de moi et m’embrassa.
— Ta journée s’est bien passée ? commençais-je.
— Mélanie est de plus en plus à l’aise. On as travaillé sur la nouvelle armée aujourd’hui.
— Ah. Je peux te laisser tout faire seule ? C’est que…
— Tu n’avais pas besoin de me demander, mon amour. Je gère.
— Merci. Et sinon, ta discussion avec Elise ?
— Ça confirme ce qu’on pensait non ? Nous avons fait le bon choix.
— De toute façon, même si elle avait dit, je n’aurais pas arrêté la procédure juste pour ça.
— Tu y tiens à ce bébé.
— Oui.
— Alors ça tombe bien qu’Elise soit sur la même longueur d’onde.
— Tu ne devais pas revenir avec les dossiers des donneurs, au fait ?
— Tu ne perds pas le nord, rigola-t-elle. Ils sont dans mon sac.
Sans attendre plus, je partis récupérer la pochette colorée. Une fois dans la main, je retournais m’asseoir aux côtés de ma femme.
— Tu as déjà regardé ? la questionnais-je.
— Non. On doit faire ça ensemble.
J’ouvris la pochette et donnais la moitié des feuilles à Océane. Pendant plus d’une heure, on étudia tous. On se questionna même sur l’apparence qu’on voulait pour notre futur enfant. On finit par sélectionner un jeune homme blond aux yeux bleu et plutôt grand. Un jeune homme qui ressemblait à Océane.
— Si tu es sûr de ton choix, tu voudrais commencer la procédure quand ? enchaîna-t-elle.
— Le plus vite possible ?
— Est-ce vraiment judicieux ? Alors que tu n’es toujours pas retourné au château ? J’aimerais que tu sois avec moi ce jour-là ?
— Faisons ça demain, je serais là, mon amour. Même si ça se fait au château. Et puis, ce sera plus discret que d’aller dans une clinique.
— Je te tiendrais au courant alors.
J’embrassais ma femme, je cachais la pochette sous le matelas et on retrouva le reste de la famille dans le salon. Ben, qui venait tout juste de rentrer, m’embrassa.
— Comment s’est passée ta journée, mon chéri ?
— Très bien, je m’améliore.
— Objectif championnat d’Eryenne ? tenta Océane.
— Et pourquoi pas ? Comme toi, maman.
— Je suis tripe championne d’Eryenne, chéri. Tu vas avoir beaucoup de travail pour un jour, atteindre mon palmarès.
— Défi accepté.
Elise leva les yeux au ciel et on rigola tous. Une compétition mère-fils était lancée. Océane le poussa à aller à la douche tandis qu’Elise s’installait sur le canapé.
— Et toi ma grande, tu ne veux pas faire du sport ? ajoutais-je.
— Non, non, c’est bon.
— C’est important le sport.
— Tu parles, tu n’en fais même pas.
— Au contraire chérie, je nage aussi souvent que possible. Mais tu sais, ça peut être n’importe quelle activité. Danse, musique, échec, tu as le choix.
— C’est vrai qu’il y a un instrument que j’aimerais apprendre à jouer.
— Je t’écoute.
— Jaimerais essayer avant, mais la batterie me tente.
— Tu veux qu’on aille se renseigner demain au conservatoire de musique ?
— Vraiment ? Merci, maman, je t’aime.
— Je t’aime aussi ma grande.
Pour profiter d’une soirée en famille, Emma et Corine avaient organisé un barbecue dans le jardin. Entre brochettes et saucisse, nous rigolions, jouons ensemble et évoquions le passé. Depuis que j’étais chez Corine, j’avais découvert les joies d’une vie de famille ordinaire. Ce que je ne voulais plus perdre.
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