27.
C’est encore un échec. Il reprend conscience dans son labo. Le loup noir tourne en rond dans sa cage en grognant. Il n’a pas de poils mais des écailles dont les reflets irisées forment des vagues d’un camaïeu de vert et de turquoise sur son corps. Une langue reptilienne sort d’entre ses mâchoires à intervalles réguliers.
***
Voyant Gabriel en dangers, Mattia fondit tel un rapace sur Marko, toutes griffes dehors pour l'attraper et le soulever du sol. N'ayant pas vraiment réfléchi à la pertinence de cette attaque, le loup ailé fut surpris pas le poids de sa proie. En effet, l'énorme loup gris était si massif que le garou-ailé ne réussit qu'à s'élever de quelques mètres. Du sang se remit à couler aux endroits où les serres s'étaient plantées dans les flancs du fauve fou, arrosant au passage Gabriel d'une cascade visqueuse et tiède. Mattia battait puissamment des ailes mais sa proie était tout simplement trop lourde. Il perdait peu à peu ses forces, incapable de savoir comment retourner la situation à son avantage.
David bondit alors hors de sa cachette, bousculant Gabriel. Le Commandant hurla en claquant sa queue reptilienne dans l'air dans un bruit assourdissant de fouet. Prenant son élan, il sauta au garot du loup gris qui se débattait comme un diable, pris au piège. David planta ses canines tranchantes dans la chair dure, coupant tendons, veines et muscles. Le goût acide du venin innonda sa gueule et le poison coula dans la plaie béante. David maintenit sa position en utilisant ses pattes avant pour s'assurer une prise solide sur le cou de Marko, ses crocs enfoncés en une morsure profonde. Le Commandant attendit que le loup gris cesse de bouger, ancrant ses puissantes pattes arrière dans le béton. Lorsque Marko fut totalement paralysé, David se laissa lourdement tomber au sol dans une gerbe de sang et s'évanouit. Mattia, dont les forces diminuaient, lâcha prise et laissa le corps inerte de Marko s'écraser dans un bruit sourd à quelques centimètres du Commandant.
Un silence de mort pris possession des lieux. Au fond de la salle, Aurore émergea enfin de son coma artificiel et découvrit cette scène d'horreur. De nouveau humaine, elle regarda sans comprendre. C'est moi qui ait fait ça ? Elle n'en revenait pas... En face d'elle gisait un énorme reptile noir, un loup au pelage souillé de sang, une masse verte, une autre noire, et... un pégase ? Le sol était couvert de plumes, de sang et d'écailles. Aurore se releva et remarqua une forme humaine. Prenant conscience de l'état sûrement critique du garçon, elle courut vers lui, ses jambes encore faibles. Il n'était pas évanoui, simplement sous le choc. Il ne cessait de murmurer un charabia inaudible. Au moins, il respire. L'attention de la jeune fille fut attirée par un grognement plaintif. Elle délaissa le garçon pour se diriger vers la provenance du bruit. Le sol devint irrégulier, comme s'il avait fondu puis s'était resolidifié. Bordel, je comprend rien. Au fond d'un trou, une femme était alongée dans un tas de cendres. Aurore glissa jusqu'à elle et lui prit la main. Les yeux de la blessée tournèrent dans tout les sens. En voyant les traces sur le cou, Aurore comprit que la femme était paralysée, rendue tétraplégique suite à une strangulation qui lui avait rompu les cervicales. Aurore eut envie de vomir. Elle se sentit impuissante face à la détresse de cette femme. Les larmes coulèrent à gros flots sur ses joues. Je suis un monstre... J'ai tué tous ces gens et je ne m'en souviens même pas.
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