Drop and Love (6)
— Bonsoir Papy, ta journée s'est bien passée ?
— Bonsoir, ma chérie. Tout va bien, comme d'habitude. Je suis un peu fatigué, mais je vais bien.
— Je vois, il faudra bien te reposer ce soir.
Je le prends dans mes bras pour le câlin du soir. Son étreinte est rassurante. Je suis grande, mais il est encore plus grand. Je me sens en sécurité.
— Je ne dîne pas ici ce soir, Papy. Je prends le dernier bus pour retourner en ville. Je verrai avec mes amis pour rentrer. Surtout, ne t’inquiète pas, je serai prudente.
Il me regarde avec un peu de souci dans les yeux. Je soutiens ce regard aimant avec calme. Un léger sourire monte à mes lèvres.
— Tout ira bien.
— D'accord. Fais attention tout de même.
— Bien sûr.
Je me dégage et regarde l'écran de mon portable : il est 17h30. J’ai juste le temps de me préparer avant de prendre le bus. Je dois aussi téléphoner à Raphaël pour prévoir un rendez-vous ce soir, avant l’anniversaire. Je m’y prends tard, mais il m’a confié qu’il était libre en fin de semaine. Sans attendre plus longtemps, je compose son numéro. Quelques secondes s’écoulent pendant lesquelles la sonnerie résonne dans mon oreille.
— Allô ?
— Bonsoir, Raphaël. Je ne te dérange pas ?
— Non, pas du tout. Qu'est-ce que je peux faire pour toi ?
— Eh bien, je reviens en ville ce soir, vers 19h15. J’ai un anniversaire à 20h30. Je me disais qu’on pourrait se voir entre-temps. Qu’est-ce que tu en dis ?
— C’est très bien ! Où veux-tu qu’on se retrouve ?
— Je pensais à la Place Stan, ça te va ?
— Oui, parfaitement. On se retrouve là-bas.
— À tout à l’heure.
— Bye !
Je sautille de joie dans ma chambre, toute excitée à l'idée de la soirée qui s'annonce. Voilà une semaine que j’attends l’opportunité de revoir le jeune homme. Je file à la douche. Puis le dilemme se pose : quelle tenue porter ?
J’opte finalement pour une robe blanche à fleurs roses, ornée d’un ruban doré. Je l’associe à des bijoux argentés et des sandales plates. Pas de maquillage, les cheveux simplement relevés en une demi-queue, et je suis prête. J’attrape mon sac à main, y glisse mon portable et dévale les escaliers.
— Papy !
— Ne crie pas, je ne suis pas sourd.
— Si, justement, au moins un peu. Mais là n’est pas le débat. J’y vais, sinon je vais rater le bus.
— Sois prudente.
— Bien sûr.
Sur un dernier baiser, je quitte la maison sans oublier mes clés. L’arrêt le plus proche est à sept minutes. En marchant vite, j’y arriverai à temps.
Une vingtaine de minutes plus tard, je suis devant "L’Éclat des Fleurs". Damien rentre les plantes dans son magasin avant la fermeture. Il m’accueille avec un grand sourire.
— Bonsoir, princesse. Tu t’es faite toute belle ce soir.
Je rougis légèrement. Il a ce sourire taquin que j’apprécie particulièrement.
— Ne sois pas gênée, rit-il. Tu viens prendre ton bouquet ?
— Oui, c’est ça.
— Suis-moi.
Il disparaît dans l’atelier et revient avec les fleurs commandées plus tôt.
— Voilà, c’est pour toi. Tu me diras ce qu’il en aura pensé.
— Bien sûr, merci Damien.
Je lui glisse l’enveloppe qu’il ne prend même pas la peine de vérifier.
— Merci.
— C’est moi qui te remercie pour cette œuvre d’art.
— Je t’en prie. Passe un bon week-end. On se voit lundi, comme d’habitude.
— C’est ça. Tu passeras le bonjour à Clarisse de ma part.
— J’y penserai. Elle t’embrasse d’ailleurs.
— Moi aussi. Allez, j’y vais. Au revoir, Dam.
— Salut, princesse.
Je quitte la boutique avec excitation. Mon téléphone vibre à cet instant.
Raphaël : Je suis arrivé. (Photo)
La Place Stan illuminée s’affiche sur mon écran. La jolie vue me fait sourire.
Moi : J’arrive dans deux minutes.
D’un pas rapide, je m’empresse de le rejoindre. J’aperçois sa silhouette appuyée nonchalamment contre un réverbère. Vêtu d’une veste de cuir brun, un foulard noué simplement autour du cou, Raphaël se redresse et sourit tandis que j’approche. Timidement, je lui tends le bouquet.
— Bonjour.
Il rit joyeusement.
— C’est pour moi ?
J’en rougis de plus belle.
— Oui…
Les yeux baissés, je dessine du bout du pied des cercles sur le bitume. Il s’en amuse.
— Ne sois pas gênée. C’est mignon comme attention.
Je sens la rougeur s’étendre de mes joues à mon cou et je bégaie quelque chose d’incompréhensible. Il rit encore.
— Tout va bien.
Le petit paquet dans ma poche se fait plus lourd à chaque seconde. Est-ce que j’en ai encore trop fait ? Tant pis, advienne que pourra.
— Je faisais des courses pour l’anniversaire d’une amie, et j’ai vu ça dans une vitrine… La couleur m’a fait penser à celle de tes yeux… alors je te l’ai pris…
Il devient sérieux, et un sourire comme… attendri s’affiche sur son visage. En silence, il déballe le boîtier qui contient le bijou.
— Alors ? Ça te plaît ?
— Beaucoup, sourit Raphaël d’un air songeur, les yeux fixés sur mon cadeau.
Les battements de mon cœur accélèrent à la vue de ce sourire que je pourrais passer des heures à contempler.
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