Chapitre 15 (partie 1)

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Royaume d’Héllibore. Galiorn.

 — Papa ! Papa ! Regarde !

 Un garçon courait jusqu'à son père. Il allait enfin pouvoir lui montrer son œuvre. Ce jour-là étant celui de la fête des pères, l'enfant souhaitait voir le visage fier de son paternel face à son coloriage. Une heure entière pour réaliser le dessin dont vingt minutes pour choisir soigneusement les plus belles couleurs. Le petit s'était même appliqué à y inscrire son prénom, telle une signature d'artiste, malgré une écriture maladroite. Il ne restait plus qu'à l'offrir.

 Le père se retourna au plus grand bonheur de l'enfant.

 — Quoi encore Jenson ? bougonna l'adulte en soupirant.

 — Regarde, c'est un cadeau pour toi ! s'exclama le môme tout sautillant. C'est la fête des papas aujourd'hui. Tu as vu ? Je n'ai pas oublié.

 Le garçon attendait patiemment une réaction de son paternel qui avait pris le morceau de papier entre ses mains. Son dessin il y avait mis tout son cœur pour y représenter sa famille : son père, sa mère et lui. Sur la feuille, ils se tenaient tous la main et souriaient. Alors certes, il manquait quelques doigts aux mains des personnages et la proportion était pour l'ensemble revisitée mais il n'en restait pas moins que le petit était content de lui. Trépignant, l'enfant se sentit obligé de décrire sa création face au visage neutre du père.

 — C'est nous sur le coloriage ! Ici c'est moi, fit le jeune en désignant du doigt la forme, là c'est toi et à côté c'est maman. Je ne savais pas à quoi ressemble maman alors je lui ai fait les cheveux de toutes les couleurs, comme ça je suis sûr de ne pas me tromper. En plus je trouve qu'elle est jolie comme ça. Tu trouves aussi hein ?

 Le gamin releva la tête vers son géniteur. Il put voir une larme glisser tranquillement sur son visage et s'effondrer sur la feuille. La goutte délogea la couleur du visage maternel. Le large sourire et les yeux rieurs s’effacèrent pour ne laisser qu’un espace vide.

 — Papa ? Tu n'aimes pas le dessin ? s'inquiéta immédiatement le petit. Je... je peux recommencer si tu veux. Répond-moi papa s'il te pl...

 C'est un bruit vif et claquant qui se fit entendre et qui eut pour conséquence de terminer la phrase du jeune. La gifle que venait d’accueillir sauvagement l'enfant l'envoya valser plus loin. Perdu, il se releva doucement puis posa une main frêle sur sa joue brûlante. Pourquoi ? Pourquoi son père venait de faire une telle chose ? L'enfant n'y comprenait rien, on lui avait pourtant dit que lors de cette fête les pères étaient contents de recevoir des présents. Alors pourquoi le sien avait-il réagit ainsi ? Des tremblotements agitaient sa lèvre inférieure tandis que ses grands yeux chocolats luisaient sous l'émotion.

 En voyant son paternel approcher, le môme ne put s'empêcher de reculer. Un masque inquiétant recouvrait de nouveau le faciès du père. L'homme agrippa d'une main l'épaule du petit puis se pencha de manière à être à sa hauteur pour lui souffler quelques mots.

 — Je ne veux plus t'entendre parler de ta mère, est-ce clair ? ordonna sèchement l'adulte en attendant une réponse positive de son fils. Maintenant, au lieu de faire l'idiot avec du papier et des crayons, je te conseille de rejoindre ton maître pour ta leçon d'aujourd'hui.

 Un garçon pleurait debout dans une salle. Il comprenait enfin une chose importante. Ce jour-là, en voyant son père s'éloigner de lui, l'enfant sut qu'il ne verrait jamais le visage gai de son paternel.

 Ce cauchemar, ou plutôt ce souvenir désagréable à présent terminé, ne marquait pourtant pas la fin du supplice. Celui-ci déjà bien présent ne faisait que s'éveiller.

 Un fourmillement envahissait ses membres doucement, condamnant ainsi le moindre espace anesthésié. Ses poumons, comprimés sous le poids de ses os fissurés, s'évertuaient à chercher de l'air. D'ordinaire, les douleurs de Jenson étaient psychologiques et les guérir se révélait assez simple : il suffisait d'enfermer ses souffrances dans un coffre-fort mental. Dans le genre de cas auquel il faisait face actuellement, une boîte fermée à clé ne serait d'aucune utilité.

 Il ouvrit ses yeux pour constater les dégâts et ne fut guère déçu. Un de ses genoux semblait sur le point d'exploser tellement il paraissait enflé, ses mains étaient sectionnées finement, ses bras colorés dans des tons orageux brûlaient. Le blessé pariait même que sa face concourrait avec le reste de son corps. Cela était sans nul doute dû aux sept dernières fois où il avait gagné son sommeil à l'aide de coups de poings et de décharges électriques.

 D'ailleurs, où se cachait son geôlier ? D'habitude il se manifestait toujours à ses côtés, lui faisant goûter l'inconscience au moindre réveil de sa part. En y réfléchissant bien, Jenson ne savait même pas où lui-même se trouvait. En effet, le décor avait bien changé d'ici la dernière fois. À présent il devait se situer loin du véhicule le transportant et de son infernal bruit de moteur. Mais alors quel était cet endroit ?

 Aucun bruit. Ou peut-être bien que si. S’il parvenait à se concentrer, il pouvait percevoir un autre son. Celui d'un souffle lent et régulier. Voulant connaître l'origine de cette respiration, Jenson se tortilla comme il put pour s’asseoir. Force était de constater que la douleur omniprésente au sein de son organisme n'engendrait que des gémissements de sa part.

 La personne à l'origine du souffle se rapprocha tranquillement et fit son apparition dans le champ de vision du prisonnier. Pas plus rassuré qu’auparavant, l'adolescent faisait face à un homme dans la trentaine, qui plus est s’avérait relativement grand et musclé. Celui-ci prit la parole d'une voix grave.

 — Je dois bien admettre que mes hommes ne t'ont pas épargné. Tu es tellement amoché que j'en venais à me demander si tu te réveillerais un de ces jours. Évidemment, cela aurait été très emmerdant pour nous. Je me présente, je suis le Général Edyson White.

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