27.2. Juste nous - Axel (suite)

6 minutes de lecture

Lorsque je sors de chez les Liang, ma mère est déjà là. Je la rejoins dans la voiture.

— Bon anniversaire Maman, lui dis-je en l’embrassant. Désolé pour ce matin !

— T’as de la chance que je t’aime ! me taquine-t-elle.

— Et merci de venir me chercher ! Ma maman chérie adorée ! ajoutè-je, la voix mielleuse.

Elle secoue la tête, puis rit légèrement.

— Tu aurais pu rester chez ton ami, je ne t’en aurais pas voulu.

— Je sais, mais j’avais envie de passer cette journée avec toi ! Même si je l’avoue, j’avais un peu… totalement zappé ! Mais aussi c’est pas ma faute, j’ai des circonstances aggravantes !

— J’en conclus que la Marche des fiertés s’est bien passée ! Et donc avec Liang ? C’est toujours juste un ami ?

— Non, on sort ensemble ! m’exclamè-je avec enthousiasme.

— Je comprends mieux le sourire niais ! me taquine-t-elle.

Je force le trait pour sourire encore plus largement en lui montrant mes dents.

— Je suis tellement content ! Et chanceux !

— C’est lui qui a de la chance de sortir avec mon incroyable fils !

— T’es pas objective !

On rit.

Je m’occupe ensuite de mettre une playlist que j’avais faite pour ma mère, intitulée : chansons du siècle dernier. Dès la première chanson, elle se met à chantonner. Lorsqu’elle s’arrête à un feu rouge, j’en profite pour lui montrer une photo de Liang.

— Il a un très beau sourire.

— Oui ! confirmè-je, enthousiaste.

— Mais… quel âge a-t-il ? demande-t-elle, inquiète. Il fait jeune.

— T’inquiète, il est majeur. Il est bien plus vieux que moi, il a vingt-et-un ans.

— Quand est-ce que tu nous le présentes ? Invite-le à diner !

Le “Nous” heurte mes oreilles et mon cœur.

J’imagine la scène, le repas bien tendu, au milieu des cartons et de la tristesse qui règne actuellement dans l’appart. Hors de question que je fasse subir ça à Liang.

Je sens les coups d'œil que ma mère me lance. Elle ne s’est pas rendu compte qu’elle avait employé le “nous”. La force de l’habitude sûrement.

— Bon, ok, dit-elle, le moment est peut-être mal choisi pour l’inviter à la maison, mais on ne va pas s’arrêter de vivre. C’est un mauvais moment à passer, les choses vont s’arranger.

— Ouais et apparemment plus vite que prévu, dis-je d’un ton amer.

— Comment ça ?

— Papa avait dit que les choses devaient se faire en douceur. Tu parles, il n’est déjà plus là. Tout ce qui compte c’est sa nouvelle famille. Il nous a déjà oubliés.

— Non Axou, tu sais très bien qu’il t’aime. C’est compliqué pour lui aussi.

— Pourquoi est-ce que tu prends encore sa défense ?

— Parce qu’il n’est pas le méchant de l’histoire. Ton père et moi, nous séparons, ce sont des choses qui arrivent. Cela concerne notre couple. Quoi qu’il arrive, il reste ton père. Même si j’ai bien conscience que ça te touche.

— Hum, me contentè-je de marmonner.

— Je comprends que ça soit soudain pour toi, mais cela fait un moment que ton père et moi, nous ne sommes plus un couple. Nous sommes plutôt des colocataires.

— Est-ce que vous avez fait semblant pour moi ?

— Non, je pense que c’est plutôt la force de l’habitude, et vingt ans de vie commune. Je sais que le moment n’est pas facile, mais je t’assure que ça va s’arranger. Tout s’arrange avec le temps.

Je laisse échapper un petit soupir et contemple la route tout en me perdant dans mes réflexions. Elle a raison, bien sûr qu’elle a raison. Je me comporte comme un égoïste à vouloir tout ramener à moi.

— Pardon maman.

— C’est rien mon grand, je comprends ta colère.

— C’est pas vraiment de la colère, juste de la frustration.

— Une séparation c’est jamais marrant, mais on peut faire en sorte que ça se passe bien pour tout le monde.

Je hoche la tête lentement.

— Oui, ok. Je vais faire des efforts avec papa.

Elle acquiesce, satisfaite. Je ne sais pas comment elle fait pour aborder ça avec tant de philosophie. Ma mère est vraiment incroyable.

— Maman, je t’aime.

— Moi aussi mon cœur.

— Peut-être qu’on pourrait se faire un petit resto avec Liang, tous les trois.

— C’est une très bonne idée ! J’ai hâte de le rencontrer.

— Et toi ? Le… le mec que tu as rencontré, tu vas me le présenter ?

— Le mec ? reprend-elle en riant. Non, ce n’est pas au programme. Tu sais, ce n’est rien de très sérieux, mais ça me fait du bien.

J’essaye d’imaginer ma mère avec un autre homme que mon père, mais je n’y arrive pas. Et encore moins en train de flirter juste pour s’amuser.

Je me demande également à quoi ressemble la nouvelle compagne de mon père. C’est tellement étrange de découvrir que je ne connais pas mes parents aussi bien que je le pensais.

— Ça te choque ? me demande-t-elle.

— Non ! Pas du tout, ça me fait bizarre, aussi bien pour papa que pour toi. Mais tu as raison, déjà ça ne me concerne pas, c’est votre relation à tous les deux. De plus, tu as bien le droit de rencontrer qui tu veux. Si c’est fait dans le respect, y’a pas de mal à ça.

Elle se met à rire.

— Quoi ?

— Je suis fière de toi, je t’ai bien éduqué ! Quant au “mec”, je te rassure, nous sommes sur la même longueur d’onde, lui et moi. Il sort également d’une relation et n’a pas envie de s’engager. On se voit de temps en temps, pour un week-end et c’est très bien comme ça.

— Je vois, tu veux le garder rien que pour toi !

Je comprends mieux pourquoi mes parents étaient si absents dernièrement. Et dire que je pensais qu’ils se faisaient des week-end romantiques tous les deux. J’étais totalement à côté de la plaque.

— Il s’appelle Nathan, dit-elle, mais tu ne sauras rien de plus !

Je ricane intérieurement. Depuis qu’elle parle de lui, il y a un petit changement dans sa voix. Elle dit qu’il ne compte pas, mais elle prend plaisir à parler de lui. C’est mignon. Je comprends, moi aussi j’ai envie de lui parler de Liang.

— C’est bien cette semaine tes résultats ? me demande-t-elle.

La fac, ça m’était totalement sorti de la tête.

— Euh oui, mercredi…

Je prends une grande inspiration, ainsi que mon courage.

— Tu sais maman, je vais pas avoir mon année.

— Faut pas être défaitiste comme ça, attends de voir !

— Non, mais je le sais ! J'étais pas au niveau.

— Ça ira mieux l'année prochaine, c'est pas grave mon réglisse.

— J’ai pas envie d'y retourner. En fait, j'ai d'autres projets.

— Quel genre de projets ? me demande-t-elle intriguée.

Je comprends sa surprise. Je ne suis pas le genre de mec à faire des plans, j’ai plutôt tendance à me laisser vivre et à suivre le mouvement. J’ai eu un mal fou à choisir ce que je ferai après le bac. À la base, l’idée d’étudier les langues, c’était une blague.

— Tu sais je t'avais parlé d'une sortie avec la classe de la petite sœur de Liang. On s'est pas beaucoup vus depuis du coup, je t'ai pas raconté. Être avec les gamins, c’était juste génial !

— Et donc ? Tu veux être professeur des écoles ?

— Non, j’ai du mal à tenir en place en classe, je vais pas infliger ça à d’autres ! Ça serait sadique. Je vais être animateur nature ! Je me suis un peu renseigné…

Je lui explique le travail, ainsi que les pistes de formations que j’ai trouvées.

— … Je sais que je m’y prends au dernier moment et que c’est foutu pour cette année…

— Tu devrais tout de même contacter les différents organismes. On ne sait jamais, desfois qu’une place se libère.

— T’es pas… déçue ?

— Non pourquoi, si tu t'ennuies à la fac, ça ne sert à rien de continuer. Ton idée d’animateur nature, ça a l’air intéressant. Je trouve que ça te correspond bien et tu en parles avec enthousiasme. Alors fonce.

— Maman, je t’aime !

— Moi aussi mon chéri.

===========================

Après réfléxion j'ai eu envie d'ajouter ce petit moment mère-fils au chapitre d'Axel

Annotations

Vous aimez lire Ladaline ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0