Chapitre 3 : Question
Une petite demi-heure après son altercation, la jeune se trouvait dans sa chambre un cadre en main, l’air morose.
À son arrivé dans la pièce, une dizaine de minutes plus tôt, elle avait constaté que l’ensemble de son mobilier était déjà installé. Au milieu du mur gauche, se trouvait un lit au draps fleuris, posé sur une base en chêne. Reposant sur le moelleux matelas, sept boites de carton : La moitié contenait des vêtements en tous genres, deux autres étaient remplis de romans, la suivante, c’était des bibelots servant de décorations. Enfin, la dernière, retenait en son sein des cadres soutenant des photos de famille.
Pendant qu’elle vidait ses cartons, Marie avait positionnée les clichés sur une table de chevet. Cependant, elle ne pouvait faire de même avec l’un d’entre eux. Il affichait le visage souriant d’un ado de 17 ans, joyeux et plein de vie. La vue de cette photo la plongeait dans une profonde nostalgie.
Elle était donc restée pendant tout ce temps, assise sur le matelas, fixant le portrait.
Quand soudain, elle sursauta en entendant trois coups à la porte. Marie se ressaisie rapidement en secouant la tête et invita la personne à entrer. Il s’agissait du petit triton rencontré il y a quelque peu.
Son invité avança, tout timide, en se triturant les doigts. Au centre de la pièce, il se stoppa et s’inclina, paumes face au sol. Son expression faciale démontrait clairement qu’il s’interrogeait, mais muselait sa curiosité. Surement par crainte de dérangé.
Voyant cela, la jeune fille tapota la place à côté d’elle sur la couchette, pour l’invité à se confier. Il se permit donc de s’assoir près d’elle et, d’un air songeur, caressa le couvre-lit pour s’occuper la peau.
Constatant que le garçon n’était définitivement pas prêt à se jeter à l’eau, elle décida d’ouvrir la conversation :
-Qui a-t-il ? Quelque chose te tracasse ? Tu as faim ?
Dans sa dernière question, une pointe de peur transparaissait dans son élocution, dû aux conditions très particulière de cette école. Elle craignait par-dessus tout que le triton lui réponde par l’affirmative.
Surpris par ce questionnement qui pourrait paraitre ridicule, Aqua retint de justesse un rire nerveux.
-Non, non voyons ! s’exclama-t-il. Si vous pensez que je suis en ces lieux, à cet instant, pour profiter de vous cela est tout le contraire. De toute façon, je n’en ai guère le droit avant le début des classes dans une semaine.
Il fit une courte pause, puis, reprit en constatant que son interlocutrice se faisait nettement plus sereine. Enfin malgré une légère pointe d’appréhension.
-En réalité, je suis ici car je me questionne. J’ai conscience que ma présence puisse vous être dérangeante et si vous le souhaitez, je m’en irai de ce pas. La Lessage lui affirma qu’il l’importunait aucunement, mais lui demanda pourquoi il l’avait choisi elle et pas un autre. Ce à quoi, Aqua lui répondit de son noble parler :
-Et bien, sieur Iosif ne semble pas vouloir être déranger dans sa lecture. Je ne m’y risquerais donc pas. Quant à notre quatrième colocataire, il se trouve que je n’ai toujours pas eu le plaisir e le rencontrer.
-Crois-moi, tu ne souhaites pas avoir affaire à lui ! lui cracha-t-elle, dans un subtil mélange de dégout et de colère refoulé. Elle reprit ensuite, bien plus souriante, alors qu’elles sont tes questions?
Pendant une bonne heure, le jeune homme la bombarda de questions sur la vie terrestre et Marie en profita pour en apprendre un peu plus sur les sirènes. Leur discussion allait bon train et couvrait tous les aspects possibles, que ce soit : social, économique, politique, géographique, historique et même religieux ! La terrienne pu, par exemple, apprendre l’origine de cette drôle de salutation aquatique. En effet, en temps de guerre un de ses prédécesseurs avait instauré ce geste pour démasquer les traîtres, les espions et les ennemis présent dans le palais. Puis de fil en aiguilles, ce mouvement devint un signe de politesse, telle une poignée de main, de la vie courante pour tout le peuple. De son côté, elle lui expliqua tout ce qu’il ne comprenait pas, voir trouvait barbares, comme la pollution. À cela Marie lui apprit les multitudes facteurs de leur mode de vie qui la causait. Et pour qu’il ne commence pas une vendetta personnelle, elle commenta également que plusieurs personnes et compagnies se préoccupait sincèrement de l’environnement. Elles faisaient, d’ailleurs, tout ce qu’il était en leur pouvoir pour limiter leur impact sur cette dernière. Voulant ainsi éviter les smogs et les marées noirs.
Il lui révéla, aussi, qu’il trouvait étrange le principe de faire cuire la nourriture, ainsi que leur nouvelle texture une fois la cuisson faite. En apprenant ce fait, sa camarade proposa de lui préparer une dégustation de repas chauds, afin qu’il puisse se familiariser. Et puis, de toute façon, elle allait devoir faire son épicerie. La jeune femme en profiterait donc pur découvrir la ville relier au campus universitaire. D’autant plus que le petit bleu lui avait confié de devoir passer à la pharmacie. Ils feraient donc une pierre deux coups.
Cependant, à un moment de la discussion, Aqua dis, avec quelques appréhensions :
-Dites, dame Marie, je vous vois triturer ce cadre depuis tout à l’heure. Si ce n’est pas trop indiscret, j’aimerais connaitre l’identité de l’homme sur le portrait. Sachez, bien sûr, que je ne vous oblige en aucun cas à me répondre.
La questionnée sursauta, ne s’étant pas rendu compte qu’elle tenait la photographie depuis une bonne heure déjà.
Face à ce silence, il se risqua à réitérer :
-Qui est-ce ? fit-il d’une voix douce, presque en chuchotant.
-Quelqu’un de très cher à mes yeux, répondit-elle vaguement, nostalgique. Puis, elle poursuivit, joyeuse, bon et si on allait les faire ses courses ! J’ai une dégustation à te préparer, moi ! finit-elle, taquine.
En un sourire, le petit triton lui signifia qu’il la suivait et ils quittèrent la chambrette. Les deux individus ne prirent que le temps de remplir une bouteille d’eau glacé pour le jeune homme, qui se déshydratait beaucoup plus vite.
Ils firent une marche sous le chaud soleil, ce qui obligeait Aqua à très souvent boire à sa gourde, de fines gouttelettes glissant délicatement sur son visage de poupée.
Les rues de la ville étudiante était effervescente de vie. Des groupes de personnes se reposait dans un parc ou discutait sur la terrasse d’un restaurant, faisant connaissance. Dans des fontaines dispersées un peu partout, des sirènes barbotaient paisiblement. Sur l’herbe fraîche, hommes et femmes ailées atterrissaient dans une parfaite technique. Parmi eux, certains avaient des ailes de plumes blanches, d’autres semblables à celles d’une chauve-souris ou au plumage d’oiseau.
S’avançant sous le soleil de plomb, Marie reconnut une crinière blonde savamment frisées appartenant à la fille de l’infirmerie. Ravie de l’occasion de faire plus ample connaissance avec elle, la jeune femme marcha vers la blonde, entraînant Aqua à sa suite.
Les deux filles discutèrent longuement, tout en incluant le petit dieu, Katia étant en admiration devant son adorable frimousse.
Mais elles durent, malgré tout, se séparer, se promettant de se revoir durant la fin de semaine.
En se mettant – enfin- en route vers l’épicerie, et puis à la pharmacie, son regard croisa un bref instant celui d’un très bel homme. Il avait une très longue chevelure platine attachée en une tresse, qui retombait gracieusement sur ses hanches. Ses iris, eux, étaient plus blanc que blanc. On les confondait même avec ses globes oculaires !
La chrétienne ne sut pas ce qui venait de se passer, mais pendant ce moment elle se sentait complète. Comme s’il lui manquait quelque chose pendant tout ce temps, sans qu’elle ne sache réellement quoi. Son cœur battait à tout rompre et quelque chose, un instinct, lui ordonnait de courir l’embrasser. Jamais elle n’avait ressenti de sentiments aussi forts et eue bien du mal à lutter contre. Elle était sur le point de lui obéir, quand son compagnon la rappela à l’ordre en claquant des doigts.
-Allez-vous bien dame Marie ? l’interrogea-t-il, légèrement inquiet. Vous semblez hypnotisé, comme si…
Il se coupa subitement et secoua la tête, faisant mine de refuser quelque chose.
-Oui, oui excuse-moi ! sursauta-t-elle. J’étais dans la lune, elle se justifia puis repris ses mots, intriguée, je semblai hypnotisée comme quoi…?
-Non, ce n’est rien, ne vous en faites pas pour ça. Je ne sais ce qu’il m’a pris de dire cela, marmonna-t-il, embarrassé. Bien, que diriez-vous qu’on ailles les faire ces courses ! s’exclama-t-il finalement, enjoué
Marie ne put qu’acquiescer, mais le doute persistait en son esprit. Pourquoi avait-elle eu une si forte réaction en croisant le regard du mystérieux inconnu ? Pourquoi avait-elle l’impression que la sirène lui cachait une information capitale ? Était-ce d’abords le cas ? Après tout, elle ne le connaissait pas beaucoup, voir pas du tout.
Ces pensées l’ont torturées durant toute la durée de leurs emplettes. À tel point qu’elle ne vit pas le temps passé, ni la raison pour laquelle Aqua voulait faire un saut à la pharmacie. À vrai dire, Marie n’eue même pas connaissance d’être de retour dans son nouveaux chez-elle, sacs de courses en mains. Elle ne se rendit même pas compte que le triton lui parlait.
-Oui, pardon, tu disais ?
-Vous ne me semblez pas présente depuis que vous avez discutée avec votre amie. Êtes-vous vraiment sur que tout va bien, ma dame
?
Le ton qu’il employait était plus que sérieux. Contrastant drastiquement de l’air enfantin qu’il arborait juste avant, la prenant par surprise. Le dieu poursuivit d’une voix dure, presque menaçante :
-Croyante comme vous semblez l’être, vous ne tenteriez tout de même de mentir à un dieu, si…? Il attendit sa réponse quelques instants, puis continua, sa voix se faisant plus douce. Enfin, vous n’êtes pas obligée de me répondre, j’ai bien conscience de ne pas être celui en lequel vous croyez. Mais il faudra se faire confiance à l’avenir, et me confier à vous me semble un bon début.
Sur ses mots, il s’en alla – surement vers sa chambre – laissant la jeune fille seule avec toutes ses questions et tous ses doutes.
Et sans qu’elle ne le sache, ni comprenne le pourquoi, une graine de peur venait d’être plantée en son cœur.
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