Chapitre 7

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Les mains agrippées au bord de la baignoire, le sang perlant de mes doigts, les mosaïques noires envahissent lentement la pièce, tandis que mon corps cède sous leur emprise. M'enfonçant dans le sol, je m'abandonne. Un sentiment de légèreté m'enveloppe, une lumière aveuglante m'éblouit, et je la suis.

« Lyly, prend place, tu es en sécurité ici » Maman à une longue robe blanche tombante, on aurait dit qu'elle flotte au-dessus du sol, elle s'approche de moi un sourire aux lèvres.

« Suis moi, mon cœur ». Elle me tend la main, je la suis. Elle est magnifique, elle a l'air si irréelle, je ne comprends pas ce qu'il m'arrive. Les hautes herbes lui recouvrent l'entièreté des jambes, son teint est si éclatant, elle n'est pas comme d'habitude, je m'arrête soudainement. « Qu'est-ce qui ne va pas, mon ange ? » Les sourcils froncés, je la regarde de la tête aux pieds, je lui lâche la main. « Maman, tu n'es pas réelle, où suis-je ? » Son sourire disparaît, les étincelles qu'elle avait dans les yeux s'évaporent au fur et à mesure, son teint se flétrit. « Elles sont là, elles aussi, tu dois les retrouver ».

Un brouillard apparaît, il se propage tout autour de nous, je ne la vois plus. Je sens l'humidité à proximité de moi, j'ouvre les yeux, je suis par terre dans ma salle de bain, l'eau débordant de la baignoire. Je me lève, me dépêche de fermer le robinet, puis attrape la serpillière à côté du lavabo. Je me mets à éponger à toute vitesse, si mon père venait à découvrir que j'ai été distraite, je risquerais de regretter par la suite. Après avoir tout nettoyé, j'enlève mes vêtements puis m'installe à l'intérieur du bain. Maman n'est pas la seule à avoir été victime de mon père, mais combien sont-elles ? Les CD ont été déplacés, je n'ai pas été assez prudente, il me l'a bien fait comprendre.

Je sors le clapet de vidange du bain, je contemple l'eau se dissiper jusqu'à n'avoir plus rien. Je me retire, de la buée s'est créée ce qui rend mes mouvements imperceptibles, j'agite les bras dans tous les sens en m'avançant pour pouvoir avoir accès à une fenêtre. Je parviens à en trouver une, je l'ouvre, la buée disparaît instantanément. Je me retourne en direction du miroir, je sursaute, une trace de main est apparue, le nombre seize se forme sous mes yeux. Je m'écarte, apeurée, j'ouvre la porte à toute allure puis je me rends dans ma chambre. Je fixe le vide « Je dois retourner dans la chambre de mes parents » je cours vers mon armoire, prends des vêtements puis m'habille en vitesse.

J'inspire profondément avant de franchir le seuil. Un regard aux alentours : personne. Mon père doit être au salon, comme toujours. Sur la pointe des pieds, je me glisse vers leur chambre, y entre et referme doucement la porte. Rien n'a changé, mais une vigilance instinctive m'envahit ; l'atmosphère en ce lieu est étrangement… terrifiante. 

Maman et moi avions des cachettes quand j'étais petite, la plupart du temps, elles étaient sous le lit, dissimulées derrière le papier peint ou parfois sous son oreiller. Elle m'offrait des cadeaux parce qu'elle détestait ce que mon père nous faisait subir. C'était sa façon de se faire pardonner. mais ça n'a jamais été sa faute. Elle avait tendance à culpabiliser, car mon père lui faisait croire que c'était elle la responsable de ce qui lui arrivait.

Je jette un coup d'œil sous le lit, le néant. Sous l'oreiller, toujours rien. Je pousse alors le lit vers la gauche, gratte le papier peint pour l'ouvrir, puis commence à le décoller. Ouf ! Enfin quelque chose ! Un bout de papier apparaît, coincé plus loin. Je l'attrape : il est plié en quatre et porte le nombre seize. En le dépliant, je découvre une photo de maman et moi. J'avais quatre ans. Elle me faisait prendre le bain. Elle était, tel un soleil, rayonnante de bonheur et de vivacité.

Je replie la photo, je la remets derrière le papier peint puis remet le lit où il était. Maintenant, il faut que je retrouve les CD de mon père, ma mère a sans doute voulu me donner un indice avec la photo, je sors discrètement de la chambre puis me tourne vers la salle de bain. Je laisse la porte entrouverte pour faire le moins de bruits, je me mets à fouiller les quatre coins de la pièce, je regarde d'abord si les murs n'ont pas des défauts, je palpe partout, mais rien. Je passe les mains derrière l'évier, rien non plus de ce côté, je jette un coup d'œil à la baignoire, on peut y voir un creux sur une des extrémités.

J'appuie sur le creux, il s'effrite, je vois un bout de plastique apparaître alors, je continue à creuser. « Un CD, merci maman », chuchotai je.
Je le cache sous mon t-shirt puis traverse le couloir jusqu'à ma chambre. Je ferme la porte en faisant attention à ne pas faire de bruits, puis installe mon ordinateur sur mon bureau. Je mets le CD puis lance la vidéo, on voit mon père en train d'ajuster la caméra, il fait ça pendant une dizaine de minutes, c'est étrange.

Lorsqu'il sort du champ, il s'assoit sur une chaise, il a l'air de se situer dans une salle de bain, mais pas la nôtre. Il croise les jambes. Il a l'air satisfait, il fixe la caméra et se met à avoir un rire hystérique… puis il s'arrête d'un coup. Il se lève, s'approche de l'objectif puis l'incline sur la droite. Une femme nue dans la baignoire qui est inconsciente, une plaque en métal au-dessus d'elle. Son visage est rouge. Elle est brûlée. Il soulève la plaque puis la pose sur la chaise. La femme est brûlée ! Elle a vraiment été brûlée ! Des nuages de vapeurs s'échappent de l'eau ! Ses yeux sont opaques et blancs ! Il l'a faite bouillir !

Il s'approche de sa tête puis l'embrasse sur le front. « Jess, je fais ça pour ton bien », dit-il. Il se colle à la caméra, il caresse ces lèvres pleines de sang puis essuie ses doigts sur l'objectif. Je recule de mon bureau, je m'assois par terre puis tape ma tête frénétiquement dans mes mains. « Stop, stop, arrêtez ça, s'il vous plaît », sangloté je. Mon père est un tueur sans aucune pitié envers les femmes. « Maman, je ne peux plus le faire, lâche moi », dis-je à haute voix.
Des mains froides se posent sur mes épaules, elles m'enlacent. « Tu es plus forte que tu ne penses, Lyly, tu dois réussir à partir maintenant, si tu échoues, il te tuera ».

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