Fleur de malheur (1/3)

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Il était une fois, dans une prairie enchantée, une magnifique fleur qui poussa. A ce moment là, ce n'était pas du tout une fleur de malheur. C'était une fleur triangulaire, avec un pétale qui était un triangle rouge, un pétale qui était un triangle jaune, et un pétale qui était un triangle bleu. Les trois pétales, eux-mêmes triangles, étaient assemblés de sorte à former un plus grand triangle. C'était une fleur étrange, une fleur pareille à aucune autre ; mais une fleur magnifique, miracle de la nature, qui n'avaient en elle-même rien de diabolique ou de malveillant. C'était juste une fleur et, si les fées s'étaient contentées de l'admirer, elle aurait juste rendu leur vie plus jolie.

Au début, en fait, les fées s'étaient en effet contentées d'admirer la fleur triangulaire. Rina, la première fée à la découvrir, avait voulu faire de la fleur son secret. Elle venait chaque jour l'admirer, sans en parler à personne. Elle regardait si les couleurs changeaient, espérant que les trois pétales deviendraient jaune, car c'était sa couleur préférée. Elle pensait que le pétale jaune était mûr, et que les deux autres étaient en cours de transformation pour le rejoindre vers la perfection. C'était une idée folle que Rina avait là, car une fée qui aurait préféré le bleu aurait pu penser, à l'inverse, que c'était le pétale bleu qui était le plus abouti. Une fée non biaisée, elle, aurait su qu'aucune de ces deux théories n'était la bonne. Une fée non biaisée, elle, aurait su que les trois pétales étaient déjà parfaits, et que c'était avec ses trois couleurs différente que la fleur était parfaitement équilibrée.

La fée non biaisée aurait eu raison, car la fleur triangulaire n'avait jamais changé. Elle avait gardé un pétale jaune, un pétale rouge et un pétale bleu, tout au long de son histoire. Plus tard dans l'histoire, la fleur avait eu des enfants et, dans la plupart des cas, les trois couleurs étaient toujours restées telles qu'elles. Mais nous n'en sommes pas encore là dans l'histoire. Nous en sommes au moment où Kila, une autre fée, découvrit à son tour la fleur. Kila resta longuement à contempler et la fleur. Quand Rina arriva ce soit là, elle trouva Kila, dans la prairie, devant celle qu'elle considérait déjà être sa fleur.

Rina connaissait Kila et, comme elle l'aimait beaucoup, elle était prête à partager sa fleur avec elle. Cela pourrait être leur secret à toutes les deux : cette fleur magnifique qu'elles viendraient observer sereinement, pour s'emplir les yeux de beauté chaque jour. Mais Kila n'était pas d'accord avec Rina. Elle ne voulait pas garder le secret. Elle pensait que tout le monde devait pouvoir profiter de la beauté de la fleur, qu'il fallait la partager avec tous, et qu'il n'y avait aucune raison qu'elles la gardent pour elles. Aux yeux de Kila, la fleur était un bien commun. Elle l'aurait tout de suite emmenée avec elle au conseil des fées, si elle n'avait pas eu peur qu'arracher la fleur du sol ne la tue. En écoutant Kila, Rina finit par penser qu'elle avait eu tort de vouloir garder la fleur pour elle. Peut-être que tous avaient le droit de l'admirer et peut-être même que, si les fées s'y mettaient toutes ensembles, elles trouveraient une solution pour que la fleur puisse être multipliée. Comme ce serait merveilleux que chaque fée puisse avoir, à tout moment, une fleur triangulaire près d'elle.

Kila et Rina allèrent au conseil des fées, qui se tenait justement ce soir là. Elles y parlèrent de la fleur, et toutes les fées eurent envie de la voir. Il faisait presque nuit, et, dans la pénombre, il aurait été impossible de retrouver la fleur. Il fallait attendre le lendemain matin et il fut décidé que, dès le lever du soleil, les fées iraient ensemble admirer la fleur. Le matin venu, elles volèrent au dessus de la prairie, à quelques centimètres du sol seulement, ouvrant grand leurs yeux et prêtes à découvrir cette fleur merveilleuse.

Lino fut le premier à apercevoir la fleur ; avant même Kila et Rina, qui savaient pourtant où elle se trouvait. Lino était une fée lui aussi, mais, comme toutes les autres fées de genre masculin, il devait accepter le fait que, chez les fées, le féminin l'emporte dans la façon de s'exprimer. Les fées furent donc toutes surprises et enchantées de voir la fleur ; hommes et garçons compris bien sûr. Volant au dessus de la prairie pour ne pas risquer d'écraser la fleur triangulaire, ni aucune autre fleur, les fées parlèrent toute la journée. Elles trouvaient la fleur merveilleuse car elle était unique et qu'aucune autre fleur ne lui ressemblait. Et comme elles trouvaient la fleur merveilleuse, elles eurent immédiatement, comme Rina avant elles, envie de la multiplier. Peu importe si, dès lors que la fleur était multipliée, elle ne serait plus unique. Les fées, comme les êtres humains, ne sont pas toujours très logique.

Le conseil des fées arriva donc, lorsque cette deuxième nuit tomba, à la conclusion qu'il fallait multiplier la fleur triangulaire. En se mettant toutes ensemble et, en partageant leurs idées, elles trouvèrent comment faire. Elles durent admettre que cela représenterait beaucoup de travail, mais le vote fut pourtant unanime. Tout le monde avait envie d'avoir sa propre fleur triangulaire, et toutes les fées était enthousiastes à l'idée de ce nouveau projet collectif qui montrerait à toute la prairie que les fées, contrairement à certaines autres espèces, savaient œuvrer ensemble pour produire une augmentation de la concentration de beauté dans le monde.

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