Le lendemain, Etvi essaya de prêter attention aux réactions de ses interlocuteurs, comme le lui avait demandé son professeur en guise d'exercice. Pour la première fois, Etvi sentit que les gens avec lequel elle travaillait ne se sentaient pas bien. Elle avait été si fière d'apporter de bonnes idées et de créer un projet formidable. Elle avait pensé qu'ils l'admireraient pour cela et qu'ils lui feraient confiance. En réalité, ils semblaient tous agacés. Peut-être était ce un effet secondaire de la potion d'accélération qu'ils avaient bue. Elle avait ressenti elle-même que ce sentiment venait souvent en effet secondaire. Mais, en même temps, peut-être qu'Etvi était la source de cet agacement. Même si c'était la potion qui le causait, c'était à cause d'elle qu'ils l'avaient bue. Cependant, même les lents semblaient agacées. Se rappelant les mots de son professeur de conversation, Etvi réalisait qu'ils puissent avoir l'impression de ne pas être écoutés. Pire, ils pouvaient avoir l'impression qu'Etvi n'était pas agréable. Elle voulait être efficace pour le bien de tous. Mais la quête effrénée d'optimisation ne prenait pas en compte le fait que le moment de travail puisse aussi avoir pour intention d'être un moment plaisant.

Etvi se souvint de sa première intention sur le projet : elle avait voulu que ce ne soit pas seulement un but de construction, mais aussi un projet de société. Elle avait été prête à créer quelque chose de plus complexe pour permettre à chacun de travailler sur plusieurs sujets. Elle avait fait cela parce que c'était ce qu'elle imaginait être des conditions plus favorable pour grandir en tant que personne. Pourtant, peut-être que des réunions plus longues auraient aussi aidé à grandir en tant que personnes. Peut-être que prendre le temps aidait à devenir des êtres humains meilleurs, humainement parlant. Peut-être que renoncer à quelques options de personnalisation, à quelques améliorations ou à quelques maisons supplémentaires aurait été envisageable. Peut-être que ça aurait valu le coup si ça avait permis d'être meilleur et d'aller mieux. La princesse Etvi voulait devenir une reine bienveillante et, apparemment, elle n'était pas du tout en train de réussir. Elle réussissait parfaitement à créer une population abreuvée de potion d'accélération, efficace à créer un magnifique village dans lequel personne ne vivait jamais une vie paisible où ils pouvaient profiter de leurs habitations.

Etvi en eut la confirmation quand, sur le chemin pour rentrer au palais, elle croisa une fillette. Souhaitant se remonter le moral, Etvi voulait avoir confirmation qu'au moins, le temps qu'elle avait réussi à dégager sur les soirées avait profité aux gens. Elle-même n'en avait pas profité car elle avait ressenti le besoin d'apprendre plus, encore et toujours, sans plus parvenir à y trouver du goût. Mais peut-être les autres avaient-ils fait meilleur usage du temps libre qu'elle avait réussi à leur offrir. La petite fille, répondant à ses questions, détrompa la princesse. Son père et sa mère passaient plus de temps avec elle oui, mais ils ne faisaient que se plaindre. Ils disaient qu'ils avaient eu une dure journée, ils étaient fatigués et, quand ils n'étaient pas en train de dormir, ils étaient en train de crier. A entendre la petite fille, ses parents n'avaient aucune patience avec elle. Dès qu'elle faisait une erreur, ils la grondaient. Elle essayait d'apprendre à lire mais cela était difficile et ils se fâchaient dès qu'elle bafouillait ou qu'elle se trompait. Elle rangeait la maison avec eux mais, dès qu'elle avait mis quelque chose au mauvais endroit, c'était tout une histoire. Même quand ils discutaient de tout et de rien, ils la grondaient car ils trouvaient qu'elle posait des questions bêtes.