#Nuit de terreur
Le faible éclat de la bougie accentuait l'atmosphère mystérieuse qui régnait dans le salon. Assis l'un en face de l'autre à la table, Hélène observait son mari Robert avec inquiétude, percevant sa détresse bien qu'il tentât de la dissimuler. Un secret pesait sur son esprit, tel un nuage orageux prêt à libérer sa fureur.
— Alors, parle mon amour, tu peux tout me dire ? l'encouragea-t-elle d'une voix douce.
Robert prit une inspiration tremblante, sa résolution vacillant face au regard aimant de sa femme. Pourtant, il savait qu'il devait se libérer de ce fardeau s'il désirait retrouver la paix. Lorsqu'Hélène lui affirma que les enfants dormaient à point nommé, il sut qu'il n'y avait nul autre choix que d'ouvrir son cœur.
— Depuis trop longtemps, un secret ronge mes pensées, entama-t-il d'un ton hésitant. Il est temps que tu connaisses la vérité, aussi douloureuse soit-elle.
Hélène retint son souffle, pressentant que quelque chose de grave était sur le point d'être révélé.
Alors que les derniers rayons de soleil disparaissaient derrière les vieux murs de la demeure familiale des Vallente, l'atmosphère intime du salon était uniquement éclairée par les flammes crépitantes de la cheminée. Assis près de l'âtre, Hélène observait son cher époux Robert avec affection, devinant la tempête qui faisait rage derrière ses yeux.
Durant toutes ces années, il avait gardé pour lui les secrets de son passé, protégeant sa femme des ombres qui hantaient encore son esprit. Pourtant, en cette soirée d’anniversaire de mariage, Robert avait pris la résolution de briser les chaînes du silence. Il prit délicatement les mains d'Hélène dans les siennes, désireux de se libérer enfin du poids qui l'oppressait.
— Mon amour, le moment est venu pour moi d'affronter mes démons, dit-il d'une voix empreinte d'émotion. Accepterais-tu de m'écouter, sans jugement, alors que je m'apprête à déterrer les souvenirs enfouis ?
Hélène lui offrit un regard rassurant, prête à le soutenir dans cette épreuve. Ainsi commença le récit douloureux du passé de Robert.
Tandis que leurs parents célébraient leur anniversaire de mariage au rez-de-chaussée, le jeune Zak laissait libre cours à son imagination débordante dans sa chambre de l'étage. À seulement cinq printemps, son esprit était déjà celui d'un conteur né, capable de tisser les récits les plus extraordinaires.
Les rayons de la lune filtraient à travers les rideaux, projetant des ombres oniriques sur le théâtre de fortune qu'il s'était construit. Coussins et peluches avaient été méticuleusement disposés pour incarner châteaux, forêts et montagnes. Parmi cet océan de couleurs, Zak animait vaillamment ses figurines préférées, leur faisant vivre épiques aventures et périlleuses batailles contre des armées de monstres. Transporté par son don d'imagination, le petit garçon ne se doutait pas un instant que de sombres présages planaient déjà sur sa famille, annonciateurs de malheurs à venir.
Tandis que Zak laissait libre cours à son imagination fertile, de doux éclats de rire s'échappaient de la chambre de Marie, qui fêtait aussi cet anniversaire à sa façon. À onze printemps, la jeune fille échangeait confidences et ragots avec une amie au téléphone, savourant les plaisirs simples de l'insouciance enfantine.
Pourtant, la mélodie enivrante de leur conversation s'interrompit brusquement lorsqu'un son strident déchira le silence nocturne. La sonnette d'entrée retentit de manière incongrue, annonçant l’arrivée inopinée de visiteurs. Intriguée, Marie se leva pour aller observer par la rampe d'escalier, plongeant son regard dans les ténèbres du rez-de-chaussée. Qui pouvait bien se présenter à leur domicile à une heure aussi tardive ?
C'est à ce moment-là qu'elle aperçut Zak, déjà sur le point de descendre les premières marches. Une vague de panique l'envahit, tandis que la silhouette de son jeune frère prenait une allure sinistre dans la pénombre. Cette inquiétude fut toutefois balayée instantanément par un sentiment de stupidité.
— Zak, retourne dans ta chambre, souffla-t-elle à voix basse. Je vais voir qui est à la porte.
L'enfant obtempéra sans discuter, refermant doucement sa porte sur le royaume magique qu'il avait patiemment construit. Seule avec ses questions, il ne put s'empêcher d'écouter aux murs, captivé par les évènements qui se déroulaient dans le reste de la demeure
Pendant ce temps, Marie descendit les escaliers avec précaution, sa main glissant le long de la rampe pour guider ses pas. Les lumières tamisées créaient des ombres dansantes, et elle atteignit le bas de l'escalier tout en restant partiellement cachée dans l'ombre. Son père se tenait près de la porte, le visage illuminé par la lumière extérieure lorsqu'il ouvrit celle-ci.
Bien qu'elle ne puisse pas voir les visiteurs, quelque chose dans la posture de son père, dans l'expression de son visage, laissait présager un événement hors du commun. Une vague d'anxiété la submergea, imprégnant l'air d'une tension palpable. Figée à la lisière de l'escalier, elle ne pouvait détacher son regard de la scène qui se déroulait sous ses yeux. Entre les murmures venant de la porte entrebâillée, elle saisissait quelques mots de la conversation, suffisants pour comprendre qu'il se tramait quelque chose d'inhabituel.
Un frisson glacial remonta le long de son dos. Une terreur inéluctable l'envahit tandis qu'elle continuait d'observer, ses sens en alerte. Bien que les détails restent flous, une aura de menace semblait planer dans l'air. Les ténèbres qui enveloppaient la maison s'épaississaient, transformant l'atmosphère en une présence quasi tangible qui imprégnait chaque recoin.
Sans même s'en rendre compte, Marie fit demi-tour, remontant à pas feutrés l'escalier pour regagner sa chambre. Cependant, son instinct protecteur envers son jeune frère prit le dessus. Arrivée à l'étage, elle jeta un dernier coup d'œil en bas. Son cœur battait la chamade, elle se hâta alors vers la chambre de Zak.
— Zak, viens avec moi, vite !, lui dit-elle, d'une voix emplie d'angoisse.
Zak, bien que confus, sortit de la chambre pour suivre Marie. Elle le conduisit jusqu'à son sanctuaire sous l'escalier menant au grenier, un endroit où il avait l'habitude de se cacher et d'accrocher ses dessins. Les ténèbres du placard l'accueillirent, enveloppant le jeune garçon dans leur obscurité rassurante.
— Ne bouge pas d'ici jusqu'à ce que je vienne te chercher, dit-elle, l'affolement dans la voix.
Zak, croyant que sa sœur lui proposait un nouveau jeu, percevait la situation comme une aventure excitante. Cependant, Marie, d'un ton sérieux, lui fit comprendre l'importance de rester caché.
— C'est très sérieux, Zak. Tu dois rester ici.
Elle l'embrassa avant de refermer doucement la porte.
Là, dans le noir, Zak prêta l'oreille aux événements qui se déroulaient à l'extérieur. Les murmures de sa sœur semblaient à peine audibles, noyés dans le tumulte qui s'installait. Le chaos commença à régner, les voix se mêlant en un concert de cris désordonnés. Zak écoutait, tétanisé, tandis que l'oppression grandissait. Les sons de lutte paraissaient s'approcher de plus en plus, comme les battements de son propre cœur.
Un frisson parcourut son échine lorsqu'il entendit des bruits sourds, comme des objets qui tombaient. Les cris de ses parents se perdaient dans un tumulte de sons étranges et inconnus, créant un crescendo terrifiant dans l'obscurité. Zak se recroquevilla dans son petit havre de paix, son souffle devenant irrégulier tandis que son imagination nourrissait sa peur grandissante.
Puis, soudainement, tout devint silencieux. Un silence si profond qu'il paraissait étouffer même les sons les plus infimes. Zak tendit l'oreille, espérant entendre quelque chose, n'importe quel indice qui pourrait expliquer la situation. Mais le silence persista, lourd et interminable. Le temps s'étira, les minutes se transformant en heures.
Peu à peu, la fatigue se mêla à sa terreur. Épuisé par l'attente et la peur, Zak finit par s'endormir. Sa fatigue l’emporta finalement sur l'angoisse. Ses rêves étaient peuplés d'ombres menaçantes et d'échos de cris lointains.
Lorsqu'il se réveilla enfin, il se trouvait dans les bras d'un homme en uniforme, la lueur d'une lampe torche éclairant faiblement les ténèbres qui l'entouraient. Confus et désorienté, il tenta de regarder autour de lui, en quête de réponses.
— Où sont mes parents ? demanda-t-il d'une voix tremblante, ses yeux reflétant l'incompréhension qui l'habitait.
L'agent de police garda le silence, son regard empreint de compassion posé sur le jeune garçon. Il ne pouvait rien lui révéler. À la place, il le serra plus étroitement contre lui, offrant une présence réconfortante au milieu de ce moment de confusion et de terreur.
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