Je me suis accroupi

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  Je me suis accroupi derrière un pli de sable. J’ai lentement ouvert les yeux sur la beauté des choses. La Lune dans sa course éthérée, le silence partout répandu, le reste d’une clarté accrochée au ciel. De Calpo Falcone proviennent quelques voix, mais si discrètes, si évanescentes, on penserait que notre esprit leur a donné naissance. Doucement, un nuage gris-bleu a glissé devant la Lune. Une ombre s’est répandue au sol, vous ôtant brusquement de ma vue. C’était comme si, immédiatement, j’étais devenu orphelin, cherchant parmi la cendre de la nuit une main qui ne viendrait pas. Il y a eu quelques passages nébuleux, quelques hésitations du ciel. Puis, comme après une éclipse, la lumière de l’Astre des Nuits s’est agrandie, a brillé au plus haut de l’azur teinté d’encre. Je vous avais perdu de vue, voici que je vous retrouvais mais métamorphosée, chrysalide devenue papillon aux mille splendeurs.

   Soudain, comme pour un rituel, vous vous êtes dévêtue, livrant à mes yeux éblouis cette belle et infinie carnation d’ivoire. On aurait pu penser à une statue antique sortie du cercle sacré de son temple, venue au bord des flots pour admirer le prodige de la Nature. Vous avez entouré le haut de votre corps de l’ovale de vos bras. Un de vos pieds a quitté le sol. Vous étiez dans l’attitude de l’envol et je demeurais aux aguets, inquiet sans doute de vous perdre pour toujours et c’est ce qui arriva. Vous êtes entrée dans une étrange colonne de lumière qui vibrait jusqu’à moi. Votre corps est devenu diaphane et je ne pouvais m’empêcher de penser à une bizarre réalité séraphique, genre d’entité astrale contre laquelle vous aviez échangé votre chair ordinaire. Du reste cette dernière était pure émanation de soi, naissait en soi et pour soi à la façon dont un jet d’eau s’élève et ne semble surgir que de son propre ressourcement. Je levai, en un instant précis, les yeux au ciel afin de mieux suivre votre trajectoire. Vous n’étiez plus maintenant qu’une poussière d’étoile, une eau de lagune sous les orages célestes, sous le profond insondable de l’univers cosmique. La Lune, vous l’avez frôlée à la façon scintillante d’un astéroïde. Baleine, vous l’avez contournée. Des rayons fusaient depuis la lame jointe de vos pieds. Des éclats surgissaient du métal de vos hanches. La lactescence de vos seins était pur cristal, pur diamant. Vous vous êtes attardée un moment devant Verseau. Vous avez caressé la toison grise de Bélier. C’est Poissons qui a reçu l’éblouissement de votre voyage. Il paraissait parvenu à son terme. Désormais, je ne verrai plus qu’un ciel étoilé et la trace illisible de votre absence. Un long moment je suis demeuré au bord de la lagune à fumer distraitement, seulement occupé de vous.

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