Je m’égare, gare de Lyon bien entendu ! Pour embarquer dans un train de la seule compagnie offrant encore des trajets de nuit vers la Sérénissime. Là déjà, je ne le sens qu’à moitié lorsque je constate le retard affiché sur les panneaux. Ils nous font attendre dans une grande pièce située en dessous des quais. C’est louche, comme si on ne devait pas voir le train dans lequel on allait passer la nuit avant son départ.

 Comme mon bouquin est au fond de mon gros sac à dos, il ne me reste pas grand-chose à faire. Dans le hall, les places assises sont déjà toutes squattées par des familles dont les gamins ne cessent de demander de leur voix aiguë et geignarde quand ils embarqueront. Je suis bien contente d’avoir réservé une couchette dans une cabine réservée aux femmes seules, au moins il n’y aura aucun gosse parmi les passagers. Quoiqu’à la réflexion, les femmes seules peuvent certainement voyager avec leurs mômes. Damned !

 Pour chasser l’ennui, mon œil affûté de chasseuse d’aliens parcourt l’horizon (enfin, l’espace restreint de la salle d’attente.) Je cherche un signe, d’extraterrestres parmi les autres personnes qui attendent avec moi.

 Dans la foule, je ne discerne que les habituelles figures des gens qui patientent sur les quais de gare : la grand-mère avec son casier à chat posé à ses côtés, juste entre elle et son mari. Le vieil homme regarde les enfants qui jouent à se poursuivre pour s’occuper ; le groupe de jeunes avec des guitares et qui rigolent plus que de raison au moindre mot lancé. Je suis jeune moi aussi, mais l’idée de me joindre à leur bonne humeur ne me tente pas trop. Je pense que j’ai pas mal de pétards de retard sur eux, et puis je voyage pour rencontrer de nouveaux horizons, pas pour traîner avec des étudiants en art plastique !