Chapitre 23
Le hall, quelques minutes plus tôt vibrant des conversations élégantes et des rires feutrés, était maintenant en proie à une agitation grandissante. Les invités, jusque-là alignés derrière le charisme imposant de Jano, s’échauffaient. Les accusations voilées s’échangeaient en murmures d’abord, puis en éclats de voix de plus en plus audibles.
— Comment est-ce possible ? lança un homme corpulent, son visage rouge de colère. Tu nous garantissais que nos comptes étaient inattaquables, Jano !
Une femme, les bras croisés, s’avança, défiant Jano directement.
— On a investi dans ton réseau parce que tu nous as promis que rien ne pouvait toucher notre argent. Maintenant, tout a disparu. Où est passé l’argent, Jano ?
Jano, toujours au centre de la pièce, leva une main pour exiger le silence. Mais cette fois, son autorité vacillait. Les regards des invités, habituellement pleins de respect ou de crainte, étaient remplis de suspicion.
— Mes amis, dit-il d’une voix froide et maîtrisée, je comprends votre frustration. Mais nous ne savons pas encore ce qui s’est passé. Si quelqu’un a tenté de nous attaquer, il a fait une erreur. Et je vous promets que nous retrouverons ce voleur.
Un rire amer résonna dans la foule. Marco, l’homme corpulent, s’avança.
— Une erreur ? siffla-t-il. Ce n’est pas une erreur. Quelqu’un ici nous a volés.
Il regarda autour de lui, ses yeux passant d’un invité à l’autre, cherchant un coupable.
— Peut-être même que c’est toi, ajouta-t-il en fixant Jano.
Une onde de choc traversa la pièce. Accuser Jano, même implicitement, était une audace que peu auraient osée.
Elsa, immobile près du buffet, sentit son cœur s’accélérer. Elle observait la scène, le souffle court. L’atmosphère était tendue, prête à exploser.
Dans l’oreillette, Karim murmura :
— Les voilà qui s’effondrent. C’est exactement ce qu’on voulait.
Mais pour Elsa, cela n’avait rien de rassurant. Elle savait que plus la tension montait, plus les risques devenaient grands.
À l’étage, Vincent et Samir étaient toujours dans la salle de contrôle.
— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Samir, inquiet.
Vincent, qui écoutait à travers l’oreillette, fronça les sourcils.
— Ils se déchirent. L’argent disparu a semé le chaos.
Samir hocha la tête, mais son visage restait marqué par la peur.
— On devrait partir maintenant, murmura-t-il. Avant que quelqu’un ne se rende compte que c’est nous.
Vincent hésita, son instinct lui criant de bouger. Mais il savait que Karim voulait qu’ils attendent encore.
— Pas encore, répondit-il. On doit s’assurer qu’ils sont trop occupés à se détruire pour nous remarquer.
Dans le hall, Jano se tourna lentement vers Marco, son regard froid comme la glace.
— Tu m’accuses ? demanda-t-il d’une voix basse mais menaçante.
Marco, galvanisé par sa propre colère, croisa les bras.
— Je dis juste que c’est étrange. Tout notre argent disparaît alors qu’on est dans ta maison, avec ton système de sécurité.
Jano fit un pas vers lui, et la foule s’écarta instinctivement, laissant les deux hommes face à face.
— Laisse-moi te rappeler quelque chose, Marco, dit Jano d’un ton tranchant. Si tu es ici ce soir, c’est grâce à moi. Je t’ai donné ta place. Ton argent, ta sécurité… tout ça, c’est parce que je l’ai permis.
Marco ne recula pas.
— Et si tout ça était un mensonge ? Peut-être que tu nous as utilisés. Peut-être que tu prévoyais tout ça depuis le début.
La tension atteignit son paroxysme. Jano, d’un geste rapide, attrapa Marco par le col de sa veste, le tirant si près que leurs visages n’étaient plus qu’à quelques centimètres.
— Fais attention à ce que tu dis, Marco, siffla-t-il. Ou tu pourrais te retrouver à regretter d’avoir ouvert la bouche.
La foule, d’abord silencieuse, commença à murmurer à nouveau. Certains invités tentaient de calmer la situation, mais d’autres semblaient prêts à prendre parti.
— Alors, qu’est-ce qu’on fait ? cria un homme au fond de la pièce. On reste là à se crier dessus, ou on trouve qui est derrière tout ça ?
— Oui, ajouta une autre voix. Fouillons la maison. Il y a peut-être un traître parmi nous.
Elsa sentit son souffle se bloquer. Elle échangea un regard rapide avec Karim, qui était caché dans un coin de la pièce.
— Si ça continue comme ça, ils vont découvrir qu’on est ici, murmura-t-elle dans l’oreillette.
Karim répondit calmement :
— Pas encore. La panique les pousse à faire des erreurs. Mais restez prêts à bouger.
Jano relâcha Marco brusquement, le laissant trébucher en arrière. Il se tourna vers la foule, levant les mains pour réclamer le calme.
— Personne ne quitte cette maison, ordonna-t-il. Si quelqu’un ici nous a trahis, je le trouverai. Et je vous promets que cette personne ne verra pas le lever du jour.
Ses mots résonnèrent comme une menace glaciale, et Elsa sentit un frisson lui parcourir l’échine.
Dans l’oreillette, Vincent murmura :
— On doit sortir. Maintenant.
Karim intervint :
— Attendez encore un peu. La situation est sur le point d’exploser.
Mais pour Elsa et Vincent, chaque seconde qui passait semblait un pas de plus vers l’inévitable confrontation.
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