Chapitre 14 – Mariette
Chapitre 14 – Mariette
Mercredi 5 mars 2014. Fort de France
Mariette ne cacha pas son étonnement en voyant sa belle-fille débarquer chez elle à cette heure de la journée. C’était si inhabituel ! Après les embrassades de rigueur, elle remarqua très vite que quelque chose ne tournait pas rond. En belle-mère avisée, elle pensa aussitôt à une dispute conjugale. Mais après réflexion, elle se dit qu’il devait s’agir d’un autre problème, n’imaginant pas Lucie lui faire des confidences aussi personnelles. Elle se décida enfin à interroger cette dernière, qui embarrassée, lui expliqua le but de sa visite. Après l’avoir écoutée attentivement, la seule réponse de Mariette fut un : « Aïe, Bon Dieu ! Seigneur ! », suivie d’un grand silence au cours duquel elle sembla perdue dans ses pensées.
Lucie la regardait à la dérobée, inquiète. Soudain, elle la vit se lever, sous prétexte de lui offrir un jus frais, et se rendre à la cuisine. Après de longues minutes, ne la voyant pas revenir, angoissée, elle s’y dirigea à son tour. Ce qu’elle découvrit lui fit monter les larmes aux yeux. Assise sur une chaise, Mariette pleurait sans bruit, accoudée à la table, le visage entre ses mains. Lucie la prit dans ses bras et ensemble, pour la première fois depuis qu’elles se connaissaient, elles se laissèrent aller.
L’instant d’après, pâle et chancelante, Mariette demanda à sa belle-fille de bien vouloir aller lui chercher sa trousse à insuline posée sur sa table de nuit. Lucie fila aussitôt et la lui rapporta. Elle vit alors sa belle-mère sortir une seringue qui ressemblait à un stylo et se piquer le bras avec. Cela paraissait si simple. Son mari lui avait en effet expliqué que sa mère devait s’injecter de l’insuline plusieurs fois par jour, un geste vital pour sa santé en raison de son pancréas défaillant. Mais cette hormone de synthèse pouvait également se révéler mortelle,si elle était administrée à une personne non diabétique.
Comme Mariette éprouvait le besoin de s’allonger, Lucie l’aida à traverser les pièces qui menaient jusqu’à sa chambre. En passant devant la salle de bain, la septuagénaire demanda à se passer un peu d’eau sur le visage et profita de l’occasion pour prendre un somnifère dans son armoire à pharmacie. Lorsque sa belle-mère ouvrit l’un des battants, la jeune femme constata avec effarement qu’il était rempli de stylos mais qu’il n’y avait aucun flacon. Comme si elle devinait sa question, cette dernière lui révéla que l’insuline, avant ouverture, se conservait toujours au froid dans le réfrigérateur. Lucie la remercia d’un hochement de tête et l’amena jusqu’à son lit, l’embrassa et promit de prendre de ses nouvelles dans la soirée, puis elle fila.
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