Jeudi 1er novembre 2018
Gisèle Morgen arrive au cimetière avec son gros pot de chrysanthèmes. André Schuller l’attend. Il lui a donné rendez-vous, car normalement la tombe familiale est toujours entourée de rubalises, mais le commandant de la brigade de Reichshoffen a donné son accord pour que Gisèle puisse quand même honorer la sépulture de son époux.
— Ah, Gisèle, donnez-moi ça, je vais vous le porter.
— Merci André, tu sais, heureusement qu’ils ont dit oui, sans cela pour moi ç’aurait été un malheur.
— Je sais que c’est important pour vous, et puis quand même, ils ne sont pas inhumains, ces gendarmes. Ils ne pouvaient pas vous empêcher de venir.
Gisèle balaie la pierre tombale.
— Par contre, je suis désolé, mais on ne peut pas encore la laver.
Gisèle hoche la tête et dépose son pot au milieu de la dalle de pierre. Elle prend du recul et se recueille quelques minutes. André Schuller attend patiemment.
— Voilà, merci André.
— Je vous laisse Gisèle et je vous préviens dès que les scellés sont levés.
Cathy et Léontine se tiennent immobiles devant la tombe d’Agathe Stern. C’est Léontine qui a minutieusement nettoyé la grande pierre tombale. Chacune a apporté des fleurs.
— Tu sais, Léontine, ces temps-ci ça va mieux, elle me manque moins, même si par moments, c’est trop vide à la maison.
— Ce ne serait pas depuis qu’il y a ce charmant jeune homme qui est venu te voir déjà deux ou trois fois ? demande Léontine avec un grand sourire, et elle lui caresse le bras.
— Oh, je n’sais pas, c’est Julien, oui, il est gentil.
— Mmm, il n’est que gentil ?
— Léontine ! répond Cathy avec un air faussement outré.
— Écoute « ma Cathy », murmure Léontine en la prenant par la taille. Il est temps que tu sois heureuse et que tu fasses confiance à un homme. Je sais ta douleur, mais tu ne peux pas rester comme ça, perpétuellement dans la méfiance et la peur. Tu as droit au bonheur et crois-moi je ne me trompe pas ; fais-lui confiance. Lui va t’apporter la paix.
Cathy a les larmes aux yeux en écoutant ces paroles qui ne font que confirmer ce qu’elle ressent au plus profond d’elle-même. Elles reviennent tranquillement bras dessus, bras dessous.
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