Dimanche 18 novembre 2018

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Cathy s’est longtemps débattue dans son dilemme : revoir ou non Julien ? Une petite sonnette d’alarme lui dit non, mais au fond d’elle-même, il y a une envie très forte du contraire, la présence de Julien lui apporte une chaleur nouvelle dans le cœur ; les ombres menaçantes s’éloignent lorsqu’il est là. Léontine, comme d’habitude, a vu juste, et ce qu’elle lui a dit n’est, en fait, qu’une confirmation. Ces émotions nouvelles la déstabilisent déjà moins. Et, un soir, elle n’a pas pu résister au besoin de le rappeler. Maintenant elle attend l’heure de son arrivée avec un sentiment mitigé entre crainte et joie. Lorsque les coups résonnent à la porte, elle s’y dirige lentement. Il se tient la tête un peu penchée, avec son sourire si séduisant.

— Salut !

— Salut, t’es pile à l’heure toi !

— Toujours ! Je t’ai apporté une vendange tardive, tiens !

Pour l’instant ils restent face à face ne sachant quoi faire ; alors Cathy fait l’impensable pour elle : elle l’embrasse sur la joue. Julien se prête au jeu, très emballé par ce net progrès. Elle le fait entrer.

— Je finis de me préparer et j’arrive. Je pense que l’on ne va pas aller trop loin, je me demande s’il ne va pas neiger.

— Oui je le crains aussi et je ne pourrais pas m’attarder après, car je ne veux pas être pris au dépourvu. C’est vraiment avec regret.

Cathy le regarde et Julien devine une nette déception dans son regard.

— Mais promis, on va se rattraper un autre jour.

Elle revient avec une nouvelle tenue toujours aussi moulante.

— Allez ! On y va, lance-t-elle en démarrant sans attendre.

— Ah oui, toujours cash, toi, bon je te suis. Ah c’est vrai, on ne ferme pas la porte.

— Non, lui crie Cathy déjà éloignée, de toute façon Léontine va venir.

Daniel Girardin attend, avec un certain agacement, la famille qui doit venir visiter la maison.

— Sacrément en retard, fait chier !

Mais un véhicule se gare enfin et une famille avec deux enfants en descend. Girardin affiche un sourire forcé.

— Bonjour, vous avez eu du mal à trouver ?

— Oui, désolé, ce village est tellement étalé. Je suis désolé, répète le chef de famille.

— C’est pas grave, c’est par là.

Il ouvre grand la porte.

La visite se déroule assez bien, Daniel Girardin se montre assez filou pour cacher les défauts et montrer les bons côtés. La vue qui s’offre depuis la maison séduit beaucoup les visiteurs. La discussion s’engage sur le prix et la marge de négociation possible. La famille repart et Daniel Girardin appelle sa sœur pour lui dire que l’affaire est bien engagée. Il regagne sa voiture.

— Bon, je vais voir si elle est là.

En repartant, il s’arrête devant la maison de Cathy. Sa voiture est garée, donc ça se présente bien. Il frappe à la porte. Il entend des pas qui lui semblent assez lents et c’est Léontine qui ouvre.

— Ah, désolé, je voulais voir Cathy.

— T’es le fils Girardin toi ?

— Oui, effectivement, c’est moi.

Léontine affiche un regard neutre, mais pas spécialement chaleureux.

— Elle est partie courir avec son copain et elle en a pour plus d’une heure sans doute.

— Avec son… ? Ah bon. Je n’ai pas le temps d’attendre, vous lui direz que je suis passé.

Il remonte assez vite dans sa voiture. Léontine le regarde s’éloigner avec un grand soupir.

— Qu’il lui foute la paix ! S’arrange pas avec l’âge, celui-là.

Elle hausse les épaules avec un ricanement.

— Comme s’il pouvait intéresser ma Cathy.

Elle lave encore la vaisselle et repart chez elle sous les premiers flocons. Les deux joggeurs arrivent peu après. Cathy en premier, comme il se doit.

— Tu restes quand même cinq minutes, le temps de goûter à cette vendange tardive.

— Oui, bien sûr, mais tu vois que de toute façon le temps ne s’arrange pas.

Cette fois-ci c’est Cathy qui ouvre la bouteille et avec, clairement, une réelle habitude pour cet exercice.

— Ne sois pas surpris si j’ai mis du temps pour te rappeler, je suis comme ça et puis tu sais, moi et les hommes, c’est… compliqué.

— On a tous eu des expériences qui ont pu nous faire beaucoup de mal ; moi aussi j’ai donné, mais ne t’inquiète pas, déjà se voir ainsi me plaît beaucoup.

— Moi aussi ça me plaît beaucoup, murmure Cathy.

Julien a quelque chose en tête, il prend une profonde inspiration.

— Dis-moi, on fête Noël en famille, comme il se doit. Tu peux venir si tu veux.

Tout s’emballe dans la tête de Cathy. Sa famille ? Sa mère dans la police ? Non, impossible... et en même temps, elle prend conscience de tout le drame que représente cette liaison avec Julien.

— C’est sans issue ?

Julien remarque bien la réaction de Cathy qui semble en proie à un véritable dilemme, elle se tord les doigts.

— Écoute… c’est gentil, mais non, je serai mal à l’aise, très gênée sans doute, tu sais…

— Ça ne fait rien, je comprends, on laisse tomber l’idée. Alors tu sais quoi, tu viens chez moi pour le réveillon du Premier de l’an ? On ne sera que tous les deux.

— C’est possible, tu me laisses y réfléchir ?

— Bien sûr, bon, il faut que j’y aille maintenant, dit-il à regret en se levant.

— D’accord

Elle le suit. Arrivée à la porte, cette fois, Cathy n’a aucune hésitation et elle pose un bref baiser sur la bouche de Julien. Il est tellement surpris qu’il ne bouge pas et puis ne peut résister à le lui rendre, en plus long. Il sent bien une légère résistance, mais cet instant est tellement beau et inespéré que ça n’a aucune importance.

— À bientôt dit-il, en reculant doucement vers sa voiture.

La lumière a bien baissé et les flocons se font plus gros. Cathy reste sur le perron à le regarder partir et frissonne. Mais est-ce de froid ?

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