Prologue : C'était le bon vieux temps !
(monologue face caméra, avec coupure)
Le monde a changé. Je le vois dans la technologie, je le ressens dans la magie, je le sens dans les mœurs. Quelle tristesse quand j'y repense. Il fut une époque où on pouvait fouetter les laquais et leur donner des ordres, où je possédais un vaste domaine avec mes serviteurs humains, et mes légions de morts-vivants. J'étais craint et puissant, moi Boris Tire-lanus ! Plus connus sous le nom de Tire-lanus le Tyran, et oui je sais que mon nom est pourri, mais au moins en ce temps-là, personne n'osait en rire devant moi. Alors qu'aujourd'hui, les vampires ne font plus peur à personne. J'avais surtout un donjon. Mon donjon ! Et j'en ai piégé et vaincu des aventuriers, des chevaliers et des sorciers. Tout le monde voulait ma peau, tous courraient après mes trésors et ma chute ! Puis les siècles s’écoulèrent, mon aura se perdit dans le temps, et plus personne ne me craignait. Tout ce qui restait de mon prestigieux passé, c'était...
Voix (derrière le rideau/porte) : Père ! À qui parlez-vous ?
AHAH !
Boris (index sur les lèvres): à personne ma fille. Je contais juste ma glorieuse histoire à voix haute...,bon d'accord,j'essayais de suivre ton conseil et de vivre avec mon temps. J'enregistrais un podmachin, comme vous faites, vous, les jeunes.
AHAHAHAHAH !
Voix (derrière le rideau/porte) : Un podcast père. Comme si ça pouvait intéresser quelqu'un, mais j'espère que vous n'en profitiez pas pour débiter, une fois de plus, moult insanités et stupidités...
AHAHAH !
Boris : Mais non, mais non...
Ha oui, il faut que je vous parle de ça. J'ai aussi une famille. Cette voix que vous venez d'entendre, c'est celle de Clitorine, ma fille aînée. Troquant son look de femme fatale gothique, pour une apparence de femme d'affaires sanglante, c'est elle qui a repris la direction de mon glorieux donjon maléfique. Qui aurait cru qu'elle finirait par en faire un musée « de l'ancien temps ». Ha, montrer aux gens ce qu'elle appelle une époque révolue ? Moi je dirais plutôt que c'est un rappel de ce qui n'aurait jamais dû changer. Mais ça, j'aurais tout le loisir de vous en parler plus en détail. Ensuite, il me faut évoquer mon fils cadet, Bitoven. Lui, il aurait fallu le laisser mourir de vieillesse, ou au moins attendre plus longtemps avant de le changer en vampire. Maintenant, c'est un éternel adolescent émo. Et damned que c'est insupportable.
Alors vous me direz que certes, techniquement les vampires ne peuvent se reproduire par la méthode biologique. J'ai mon épouse Cunégonde, la grâce et la noblesse d'une véritable reine des ténèbres. Elle qui pensait comme moi fut un temps, s'est malheureusement adaptée à cette nouvelle époque. Un peu trop facilement à mon goût. Mais si j'ai une épouse, j'ai donc aussi la malédiction suprême qui va avec : une belle-mère ! Frigigonde de Montvénus, la tyrannie d'une vieille bique cinglante. Elle, c'est le pire des démons, l'ultime engeance infernale, la...
Clitorine : Père ! Je vous ai entendu. Vous étiez encore en train de dire du mal de grand-mère.
OooooOOH !
Boris : Mais c'est elle qui est méchante avec moi. (coude plié, poing vers le ciel) Maudite sois-tu ! Frigigonde !
AH ! AH ! AH !
Clitorine : Père ! Est-ce que vous avez fait un poing vengeur à l'adresse de mamie ?
AHAH
Boris : Mais pas du tout, je maudissais juste ta grand-mère.
HOUUUUU !
Clitorine : Père, j'ai entendu un poing vengeur, et vous savez ce que mère a dit. Pas de poing vengeur contre mamie !
AHAHAHAHAH !
Boris : Vous n'avez aucune preuve, car cela ne peut point s'entendre chère enfant. De toute façon c'est toujours ma faute dans ce manoir...
WHA HA AHAHAHAHAH !
Donc, j'avais à la fois tout et rien. Et j'ai fini par devoir changer de monde. J'avais trop d'ennemis, surtout le fisc et l'administration. Comment ont-ils osé me faire ça à moi ? Depuis quand un noble, et grand seigneur du mal comme moi, doit-il payer des impôts et des taxes de donjon ? Et puis, c'est quoi cette histoire de mettre mon donjon maléfique « aux normes » ? Ainsi que cette odieuse invention digne du diable, « travail dissimulé de laquai ». J'ai jamais caché mes laquais. Tout cela, je vais vous le conter, car il faut bien comprendre pourquoi nous avons dû déménager en Brocéliande. Le dernier endroit de cet autre monde appelé « Terre » où vivent des créatures magiques. Et ce qui nous est arrivé par la suite. Mais d'abord commençons par le début de mes ennuis : allez au Diable, vile Inspection du travail ! Mais ce n'est pas avec eux que mon déclin fut scellé. Non, c'est quand j'ai passé le flambeau à ma fille.
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