Chapitre 9 : L'épreuve du feu
L’espace défilait en un long ruban scintillant à travers les hublots de l’Alcazar. Après leur dernière découverte, l’équipage mettait le cap sur une nouvelle piste pour suivre l’Étoile d’Azura — cette pierre précieuse légendaire qui attisait tant de convoitises. Personne ne se doutait que l’ombre d’une embuscade planait sur eux.
Dans le poste de commandement, Eagle le navigateur surveillait ses écrans. Les détecteurs indiquaient une zone tranquille : aucun vaisseau signalé. Pourtant, Tony sentit un frisson d’alarme l’envahir.
— Tout paraît trop calme, marmonna-t-il, croisant les bras.
— Effectivement, confirma Dean, ajustant la console. Même les signaux habituels des patrouilles locales ont disparu.
Tout à coup, une alarme stridente retentit. Plusieurs signatures énergétiques apparurent sur les capteurs, dont Le Sombreflamme, accompagné de plusieurs vaisseaux inconnus. Sur les écrans de l’holotable, la silhouette de Seraphina se matérialisa peu à peu.
— Ils nous attendaient… gronda Tony. Charge les boucliers, Eagle ! Préparez-vous au combat.
La voix de Seraphina, hautaine et moqueuse, retentit sur l’holoprojecteur :
— Bonjour, mes petits canaris des îles ! Il est temps de me donner les coordonnées de l’Étoile d’Azura. Je sais que vous avez trouvé le dernier fragment de la carte. Je ne vais pas y aller par quatre chemins : Tony, envoie-moi ces coordonnées sur l’Intercom… merci d’avance.
— Hors de question, Seraphina ! tonna le capitaine en retour.
Un silence pesant s’installa brièvement, tandis que les deux adversaires se jaugeaient par écrans interposés. L’équipage de l’Alcazar se tenait prêt à riposter, conscient que Seraphina ne reculerait devant rien pour obtenir ce qu’elle convoitait.
Une salve d’énergie les cueillit alors de plein fouet. L’Alcazar tressaillit sous l’impact, comme un oiseau blessé. Howard, le tireur d’élite, s’écria en se ruant vers la tourelle :
— On n’a même pas eu le temps de recharger nos boucliers, capitaine ! Ces types ne plaisantent pas.
En quelques instants, l’équipage se mobilisa. Yvan courut à l’armurerie, Esmeralda tentait de maintenir la stabilité en salle des commandes, et Joe s’élança pour préparer l’équipage à un abordage. Un nouveau choc secoua le vaisseau, faisant vaciller tout le monde.
***
Les mercenaires, sans pitié, harcelaient l’Alcazar pour lui faire lâcher les coordonnées de la précieuse pierre qu’ils convoitaient eux aussi. Les lasers fusaient, des vibrations assourdissantes résonnaient jusqu’aux soutes.
Seraphina de sa voix moqueuse, continuait de tourmenter Tony via l’ordinateur de communication de l'Alcazar :
— Tony… Tony… Toujours à courir après des trésors que tu ne pourras jamais posséder. Tu es tellement prévisible.
— Séraphina. Je devrais me douter que tu allais encore essayer de te greffer à mon succès, répondit Tony, les dents serrées, en se penchant vers l'holotable.
— Ton succès ? Oh, mais je suis le succès, mon cher, ricana Seraphina. Regarde autour de toi : deux de mes meilleurs pilotes te prennent en joue, et Le Sombreflamme est prêt à fondre sur toi comme un faucon sur une proie. Mais je suis magnanime : donne-moi les coordonnées de l'Étoile d'Azura, et je t'autoriserai à vivre pour te souvenir de moi.
Tony croisa les bras, un sourire sarcastique aux lèvres :
— Magnanime ? Seraphina, tu as essayé de me doubler à chaque fois qu'on s'est croisés. Pourquoi est-ce que je croirais que tu vas tenir parole cette fois-ci ?
Seraphina répondit d'un ton plus froid, laissant percer une pointe de rancune :
— Parce que tu sais que je ne laisse jamais de seconde chance, Tony. Je te connais : tu veux jouer au héros, protéger ton équipage. Mais au fond, tu es comme moi… prêt à tout pour arriver à tes fins.
— Je ne suis pas du tout comme toi, lança-t-il le regard dur. Tu écrases tout sur ton passage, tu trahis même ceux qui te font confiance. Moi, je garde mon équipage en vie, quoi qu'il en coûte.
— Ah, cet éternel sens du devoir… Ça te perdra, soupira Seraphina, faussement lasse. Tu sais, j'admirais ça chez toi, à une époque. Avant que tu ne décides de m'abandonner sur Sarantium.
Tony fut piqué au vif, mais réussi à garder son calme.
— On sait tous les deux que tu m'avais tendu un piège. C'était toi ou moi.
— Et regarde où ça nous a menés, rétorqua Séraphina en affichant un sourire cruel. Tu danses toujours à la limite de la défaite, et moi… eh bien, je suis à deux doigts de m'approprier l'Étoile d'Azura. Alors ? Dernière chance, Tony : donne-moi les coordonnées.
Tony se pencha légèrement vers l'écran, un éclat de défi dans les yeux :
— Passe les récupérer toi-même… si tu peux.
— Très bien, mon cher. Amuse-moi un peu. Mais n'oublie pas : les jeux que je commence, je les gagne toujours, dit Seraphina avec un rire menaçant.
— Pas cette fois, Seraphina, conclue Tony d'un ton sec, coupant la communication.
***
Les hauts parleurs grésillèrent en même temps qu’une alarme se mettait à retentir.
— Ici la salle des machines ! hurla Jed dans le communicateur. Les propulseurs sont touchés ! On va perdre notre moteur si ça continue.
Tony serra les dents et donna ses ordres à travers tout le vaisseau :
— Dean, va aider Howard à repousser ces chasseurs. Yvan, Joe, tenez vous prêt si on est abordés. Jed… tiens bon ! Fais tout ce que tu peux pour nous garder en un seul morceau.
Malgré leurs efforts, les boucliers cédèrent en partie. Un des tirs ennemis perça la coque, provoquant des étincelles et un grondement sinistre dans les couloirs. Des voyants rouges s’allumèrent partout, et la sirène d’alerte vrilla les oreilles de l’équipage.
Enfin, Howard réussit un tir particulièrement talentueux qui endommagea l’un des chasseurs adverses, l’obligeant à se retirer. Le second battit prudemment en retraite, mais resta assez proche. Le silence revint, mais la tension restait palpable.
***
Le répit était fragile. Tony descendit au pas de course jusqu’à la salle des machines, où un véritable chaos régnait. Des conduits éventrés crachaient de la vapeur, les lumières clignotaient, et la mécanique fumait dangereusement.
— Jed ! cria-t-il, s’approchant d’elle. Ça va ?
— Je fais aller, balbutia-t-elle, le visage rouge. Mais on ne peut pas se permettre de rester comme ça. On a besoin de redémarrer le réacteur secondaire, sinon on ne sera jamais en état de fuir si on est attaqués à nouveau.
Sous un amas de pièces métalliques, un bruit d’éclatement résonna et un jet d’étincelles illumina la pièce. Sans perdre une seconde, Jed se lança dans un bricolage de fortune, maniant son chalumeau à plasma avec une dextérité hors pair. Un mince filet de sueur coulait le long de sa tempe alors qu’elle s’acharnait à reconnecter les circuits essentiels.
— Je vais devoir relier ce câble d’alimentation directement au circuit auxiliaire… C’est complètement dingue, mais c’est notre seule chance, maugréa-t-elle, juchée sur un escabeau.
Malgré la chaleur, le bruit, et les risques d’explosion, Jed ne céda pas à la panique. Avec une concentration extrême, elle serra les boulons, reconnecta un fusible improvisé et, enfin, abaissa un levier rouillé. Un grondement sourd fit vibrer le sol, puis les voyants passèrent du rouge à l’orange, signe que le réacteur secondaire s’allumait.
— Ça tient ! s’exclama-t-elle, le souffle court. Capitaine, on peut repartir si on est poursuivis… du moins, pour l’instant.
Tony posa une main reconnaissante sur l’épaule de la mécanicienne. Il savait à quel point ses talents venaient de sauver l’Alcazar.
***
Dans l’agitation, l’équipage découvrit que Sam, l’un des matelots chargés de l’armement, avait été projeté contre une cloison lors de l’impact initial. Il gisait dans un couloir, l’épaule en sang et la respiration haletante.
— Appelez Bertrand ! brailla Joe, à genoux près du blessé.
Le médecin accourut, un sac médical à la main, le visage crispé. On aurait pu croire qu’il paniquerait, lui qui craignait la moindre maladie, mais c’était sans compter son professionnalisme.
— Poussez-vous ! ordonna Bertrand, pliant un genou auprès de Sam.
Avec une précision remarquable, il examina rapidement les blessures, retira un éclat de métal logé dans l’épaule, et appliqua un pansement hémostatique. Son geste était sûr, sa voix, d’ordinaire tremblante, résonnait avec autorité :
— Sam, écoute-moi. Je vais te faire une injection contre la douleur, puis il faudra que tu restes au repos. On va aussi surveiller tes constantes : je ne veux prendre aucun risque, tu pourrais également avoir une commotion.
Sam gémit, mais ses yeux brillaient d’un nouveau respect pour Bertrand. Le médecin, aidé par Joe, plaça ensuite le blessé sur un brancard pour l’emmener à l’infirmerie.
— Il va s’en tirer. J’ai vu bien pire… fit Bertrand, un sourire un peu tremblant aux lèvres. Mais il va rester à l’infirmerie pendant quelques jours !
***
Une fois le blessé stabilisé, l’équipe se rassembla sur la passerelle. L’air était lourd de fatigue et de tension, mais l’Alcazar avait réussi à s’éloigner de la zone d’embuscade, ses moteurs tournant encore dans un ronronnement incertain.
— On a eu chaud, admit Tony, scrutant l’espace à travers le hublot. Merci à tous. Jed, Howard, bon boulot. Bertrand, merci pour Sam.
Dean et Yvan, hochèrent la tête. Howard, assis sur un fauteuil dans la salle de navigation, vérifiait déjà s’il n’y avait pas de nouveaux poursuivants.
— D’après le scanner, on est pour l’instant en sécurité, capitaine, dit Howard. Mais ces mercenaires reviendront, c’est certain.
Tony opina. Il savait que la quête de l’Étoile d’Azura ne serait pas de tout repos et que d’autres poursuivants surgiraient encore. Pourtant, il sentait l’équipage plus soudé que jamais. Les épreuves pouvaient bien s’acharner, chacun était prêt à défendre l’Alcazar, leur foyer dans l’immensité noire.
— Alors, on ne va pas traîner. On remet les machines en état et on part de ce secteur. Nous avons un trésor galactique à trouver, et ces clowns de mercenaires ne vont pas nous en empêcher.
Sur ces mots, l’équipage hocha la tête avec détermination. Bertrand retourna surveiller Sam, et Jed s’empressa de consolider ce qu’elle pouvait avant la prochaine secousse. Tandis que l’Alcazar s’éloignait, les étoiles se reflétaient sur sa coque meurtrie, comme un éternel rappel : l’aventure continuait… et le meilleur (ou le pire) restait à venir.
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