Chapitre 8 : La chasse aux indices
L'univers était vaste, bien trop vaste au goût du médecin Bertrand Aldric, très légèrement hypocondriaque, il passait son temps à redouter toutes sortes de maladies exotiques susceptibles de se cacher au détour d'une étoile. Et encore plus vaste au goût de l'équipage de l'Alcazar, qui courait depuis des semaines derrière les fragments d'une carte, censés mener à l'insaisissable Étoile d'Azura. Pourtant, malgré la fatigue et les péripéties, ils avançaient, le sourire (et le blaster) aux lèvres, prêts à tout pour mettre la main sur ce trésor galactique.
Dans la passerelle du vaisseau, Dean et Jed se tenaient côte à côte devant un grand tableau de bord holographique. Un nouveau morceau de carte, récupéré de justesse sur les sbires de Seraphina, clignotait comme un oiseau blessé, projetant une localisation au nom imprononçable : Pluk'thra.
Jed fronça les sourcils en regardant la carte holographique :
— Donc… on va sur… Pff… Comment on est censé prononcer ce truc ? Plouhh-kthra ? Plou-ktra ? Encore une invention de scientifique farfelu, ça…
Dean se pencha par-dessus son épaule :
— Ah, pas du tout. Je crois que la prononciation correcte, c'est Pluk-tra. L'apostrophe signale une brève pause gutturale.
— Gutturale ? Depuis quand tu t'y connais en langage extraterrestre, Monsieur-le-second-calé-en-tout ? la taquina Jed.
Dean renchérit en souriant d'un air faussement suffisant :
— J'ai lu un livre sur la phonétique extraterrestre. Toi, tu devrais peut-être t'y mettre. Ça éviterait que tu butes sur quelques syllabes.
— Pardon ? répondit Jed en feignant l'indignation.
Luisa se dit intérieurement, en observant la scène par la porte entre-ouverte, un sourire amusé aux lèvres « Ils sont incroyables, ces deux-là. Ils pourraient discuter pendant des heures de la bonne prononciation d'un nom de planète imprononçable, et ils ne s'en lasseraient jamais. »
— En tout cas, c'est Pluk-tra, je persiste. Si tu ne me crois pas, je te prête mon dictionnaire galactique, reprit Dean, faussement sérieux.
Jed tapota l'écran :
— On va faire un test, tiens. Je lance la synthèse vocale intégrée. Elle appuya sur un bouton et la voix électronique se mit à grésiller : « Bienvenue sur… Plukt… kzz… erreur… redémarrage requis… »
— Génial, t'as fait planter le système, pouffa Dean en riant.
Jed lui envoya un coup de coude complice :
— Ha ha. Très drôle. Bon, d'accord, c'est peut-être un peu compliqué, mais je reste persuadée qu'il ya un « r » coincé au milieu. Plurk-thra.
A cet instant, ils arrêtèrent leur chamaillerie, Jed et Dean, un peu gênés, se rendirent compte que Luisa et Howard, qui s’était également approché, les observaient d’un air extrêmement amusé.
Luisa éclata finalement de rire et lâcha :
— Vous deux, vous êtes un véritable numéro. Remarquez, si vous voulez, on peut toujours appeler cette planète « la boule de gaz 35-A »… vous gagnerez du temps !
Dean et Jed répondirent en chœur, faussement outrés :
— Jamais !
— Dans ce cas, continuez à débattre, j'adore vous regarder. Allez, bonne chance pour la suite de votre cours de prononciation, lança Luisa en haussant les épaules, amusée. Et elle continua son chemin dans le couloir.
— À force de vous écouter, moi j'entends surtout « plouf-tralala »… renchérit Howard en battant l'air de la main.
Le capitaine arriva a cet instant, il fit un geste brusque pour arrêter les chamailleries, et s’assit à son poste. Il fallait avancer. Pendant un bref instant, son regard s'attarda sur Dean et Jed , qui semblaient toujours trouver une excuse pour se toucher l'épaule, pour rire ensemble… Il serra la mâchoire, ravalant un vague sentiment de jalousie.
— Préparez-vous au décollage, bouclez vos ceintures immédiatement ! ordonna le capitaine, la voix résonnant dans les haut-parleurs de l'Alcazar.
***
À travers les larges vitres du poste de commandement, l'équipage de l'Alcazar découvrit un monde presque entièrement submergé , où les mers turquoises s'étendaient à perte de vue. Ça et là, de petits archipels faisaient saillie à la surface, leurs plages bordées d'une végétation luxuriante aux couleurs vives. Les trois soleils présents autour de cette planète, en se reflétant sur ces étendues d'eau cristalline, créaient des jeux de lumière si intenses qu'ils semblaient danser sur l'horizon.
Sur les moniteurs, l' Encyclopédie Intergalactique de Recensement afficha en temps réel les informations répertoriées :
• Nom officiel : Pluk’thra
• Environnement : 93 % d'eau salée, avec un climat chaud et humide, sujet à de violentes tempêtes tropicales.
• Population/Flore locale : Rares atolls habités par d'anciennes tribus amphibies, célèbres pour leurs cités lacustres construites en bois ultrarésistant. Des coraux luminescents foisonnent sous la surface, illuminant les fonds marins de lueurs arc-en-ciel.
• Atmosphère : Respirable, mais l'air saturé d'humidité peut gêner certaines espèces. Le port de masques filtrants est recommandé en période de haute évaporation.
• Faune : De gigantesques créatures aquatiques, dont les légendaires « Léviathans-Étoiles », peuplent les océans profonds. Certaines variétés d'algues polychromes, riches en substances curatives, intéressent déjà de nombreux prospecteurs.
D'après la base de données, les archipels émergés recensaient aussi des ruines anciennes, vestiges d'une civilisation oubliée. Le fragment de carte indiquait que le prochain morceau pourrait s'y trouver, il n’y avait plus qu’à suivre les coordonnées. L'équipage se doutait alors que cette planète, aussi exotique que dangereuse, leur demanderait d'allier prudence et curiosité pour découvrir les secrets qu'elle avait à offrir.
Dans les hauts parleurs la voix inquiète de Bertrand Aldric, le médecin de bord, se mit à grésiller :
— Vraiment ? Une planète couverte d'eau, de forêt tropicale et de… de… d'amibes ! Vous savez que l'humidité est le milieu idéal pour toutes sortes de parasites !
— Eh bien, Docteur, ça doit être moins pire que de se faire couper une main par un piège dans un temple, renchérit Tony dans son intrecom.
— Très drôle, capitaine, je serai ravi de te soigner du syndrome de la coquillette spongieuse quand tu auras mis le pied dans une de ces flaques infestées…
— On a compris, Doc, on fera gaffe, répondit Tony en lui coupant la parole. Y a-t-il un remède contre la « coquette spongieuse », au moins ?
— Hum, la coquillette spongieuse… rectifia Bertrand. Pas encore, mais je l'ajoute à ma liste de recherches prioritaires. Et je vous le redis, je n’aime pas du tout que vous alliez vous balader sur cette planète.
Tony mit un terme à la discussion, puis donna l'ordre aux pilotes de repérer la zone la plus proche des coordonnées indiquées pour un éventuel atterrissage. Si la topographie de la planète ne permettait pas de poser l'Alcazar, alors il prévoyait d'envoyer une petite équipe — lui-même, Yvan et Howard — sauter en parachute, à la manière de forces spéciales. Pendant ce temps, Jed et Dean resteraient à bord pour superviser l'opération grâce au drone d'exploration, piloté avec précision par Esmeralda.
L'Alcazar vrombissait à basse altitude, ses réacteurs poussés au maximum pour maintenir une position stationnaire au-dessus d'un secteur jugé suffisamment dégagé. Les pilotes, concentrés, luttaient contre les vents puissants qui fouettaient la carlingue. À l’arrière de la soute, l’ambiance était électrique.
Tony vérifia une dernière fois sa combinaison de vol, ajustant soigneusement les sangles de son harnais et s'assurant que le parachute dorsal était bien fixé. Son regard se porta sur Yvan , qui finissait de rattacher son épée soigneusement protégée dans un fourreau spécifique, toujours sérieux.
— Ça te fait pas bizarre de sauter avec ton épée ? lança Tony, moitié sérieux, moitié taquin.
— Aussi bizarre que toi et tes deux blasters, répliqua Yvan en haussant les épaules. Je ne sors jamais sans mes armes.
Un peu plus loin, Howard revêtait son casque de saut, l'expression concentrée. Une fois paré, il fit un signe de tête à Tony pour confirmer qu'il était prêt. Sur son avant-bras, un écran miniature affichait l'altimètre et un ensemble de données fournies par Esmeralda, postée sur la passerelle de l'Alcazar.
— Équipe au sol, vous me recevez ? fit la voix claire d'Esmeralda dans les oreillettes.
— Cinq sur cinq, répondit Tony.
— D'après les analyses, la vitesse du vent a augmenté de 15 %. Faites gaffe à l'ouverture de vos parachutes.
— Reçu, merci, confirma Howard en tapotant l'écran sur son bras. Plus spectaculaire, ça me va.
Dans la salle de commandement, Jed et Dean, restés à bord pour superviser l'opération, avaient les yeux rivés sur la console où défilait un flux vidéo en temps réel. Le drone de reconnaissance, déjà lâché en éclaireur, survolait la zone : on y distinguait de vastes étendues d'eau, quelques îlots rocheux et une végétation luxuriante prête à accueillir — ou piéger — les trois aventuriers.
— Rappelez-vous : atterrissage en zone marécageuse, prévint Dean à travers le communicateur. Évitez les amas de végétation flottante, cela peut vous engloutir ou vous piéger.
— Facile à dire, commenta Yvan.
Un signal sonore retentit : trente secondes avant le saut. La trappe arrière de l'Alcazar s'ouvrit, laissant s'engouffrer un vent cinglant qui arracha un frisson à l’équipe. Tony s'avança le premier sur la rampe, soulevant un instant la visière de son casque pour apercevoir, au loin, la silhouette floue de l'objectif.
— Prêts !, lança-t-il d'une voix ferme. C’est pour l'Étoile d'Azura.
— Et un peu pour l'adrénaline, sourit Howard, avant de se préparer à basculer dans le vide.
Le décompte dans les oreillettes se fit plus pressant :
— 5… 4… 3… 2… 1… GO !
Tony se jeta en premier dans le vide, le souffle coupé par l'air glacé qui s'engouffrait dans sa combinaison. Yvan et Howard le suivirent de près, la formation se dessinant rapidement dans les airs : trois silhouettes filant vers la surface, leurs capteurs de vitesse clignotant en vert. Les courants imprévisibles les ballottaient, mais chacun d'eux avait reçu un entraînement de commando.
— Contrôle de la dérive, annonça Howard, adaptant sa descente.
— Je vois la zone de largage, confirma Tony, les yeux rivés sur le point rouge s'affichant dans son viseur numérique.
L'ouverture des parachutes se fit dans un claquement sec. Les toiles sombres se déployèrent, freinant brutalement leur goulotte. Les trois aventuriers planèrent quelques secondes au-dessus de l'eau, tentant d'esquiver de larges nappes de roseaux anthracites qui s'étendaient sur la surface. Ils repérèrent un petit coin de terre ferme, à peine une bande de sable au milieu des marécages.
— Stabilisation, lança Tony. On se pose dans… 2… 1… Contact !
Le choc de l'atterrissage fut amorti par la boue spongieuse qui leur arrivait presque aux chevilles. Yvan, l'épée battant contre sa jambe, jura à voix basse en tentant de se dégager. Howard, plus habitué à ce type de terrain, largua son parachute avant que la toile ne l'entraîne plus loin. Tony, lui, scrutait déjà l'horizon, s'assurant qu'aucune menace immédiate ne les prendrait au dépourvu.
— Bravo, leur lança la voix d'Esmeralda dans les oreillettes. Le drone vous a en visuel. Tout à l'air calme, du moins pour l'instant.
— On avance en formation, ordonna Tony, son arme déjà en main. Yvan, tu couvres l’arrière. Howard, ouvre la marche.
Le trio quitta le point de largage, s'enfonçant dans les marais, l'eau leur léchant parfois les genoux. Au-dessus d'eux, le ciel restait parfaitement dégagé, et l'Alcazar, remonté en vol stationnaire, n'était plus qu'un point dans le ciel. Mais à chaque pas, ils se sentaient plus loin du réconfort du vaisseau et plus proches de la carte — ou du piège — qui les attendait en ces lieux inhospitaliers.
Et malgré l'atmosphère presque hostile, l'adrénaline pulsa dans leurs veines : l'aventure continuait, exactement comme dans les meilleurs récits de forces spéciales dont raffolait Tony.
Une fois les parachutes soigneusement repliés et mis à l’abri, Tony, Yvan et Howard s’enfoncèrent davantage dans les marécages. L’eau, à hauteur de genoux, laissait apparaître ça et là des bancs de vase et des touffes de roseaux sombres. Dans les oreillettes de chaque membre d’équipage, la voix d’Esmeralda résonnait :
— Continuez droit devant vous. D’après le drone, la ruine est à environ deux cents mètres.
Sur les écrans rétractables de leurs poignets, un flux vidéo en direct montrait les images transmises par le drone qui volait en éclaireur, évitant soigneusement les arbres immergés et les broussailles aquatiques.
Au fur et à mesure de leur progression, le trio rencontra de légers contretemps. Parfois, Yvan devait se dégager de lianes spongieuses qui menaçaient de s’enrouler autour de ses jambes. D’autres fois, Howard s’arrêtait net, surpris par la silhouette fuyante d’une créature aquatique, filant au ras de la surface. Mais rien de vraiment dangereux ne se manifesta ; chaque obstacle se révélait plus inoffensif que prévu, créant seulement une tension sourde et un sentiment d’insécurité.
— Je commence à croire qu’on pourrait avoir de la chance, marmonna Howard, l’arme baissée mais toujours prête.
— Ne parle pas trop vite, répliqua Tony, jetant un œil méfiant aux remous près d’un bosquet immergé. On ne sait jamais ce qui se cache sous l’eau.
Les trois aventuriers avancèrent à pas mesurés, suivant un chemin improvisé tracé par le drone, dont l’image infrarouge leur signalait les terrains les moins profonds. L’ambiance restait oppressante, avec cette végétation dense et visqueuse qui léchait leurs vêtements, et le clapotis continu de l’eau sous leurs bottes.
Soudain, la ruine dont ils cherchaient l’accès apparut dans leur champ de vision : un dôme de pierre à moitié effondré, dont la partie supérieure émergeait à peine des eaux. Les sculptures qui ornaient jadis l’entrée étaient érodées, recouvertes de mousses fluorescentes. Un vaste porche submergé conduisait peut-être à une salle intérieure encore intacte.
— Vous êtes dans la zone, annonça Esmeralda depuis l’Alcazar. Les coordonnées indiquent un point précis sous la coupole.
— On y va, fit Tony, hochant la tête vers Yvan et Howard.
En s’approchant, ils découvrirent que la pièce maîtresse du bâtiment était accessible via une arche effondrée. L’eau y était moins profonde, presque translucide. Yvan, le premier à entrer, souleva son arme, prêt à toute éventualité, mais l’intérieur se révéla silencieux, hormis le léger bruit de leurs pas sur la pierre mouillée.
— Voilà quelque chose…, murmura Howard, pointant du doigt un autel de pierre recouvert de symboles anciens.
Au centre de cet autel, partiellement dissimulé par des algues fines, ils repérèrent un objet métallique, parfaitement rectangulaire. Ses bords brillaient d’une lueur bleutée, confirmant sa nature technologique.
— C’est le fragment, dit Tony, triomphant, en retirant délicatement l’objet des algues pour l’examiner de plus près. L’inscription correspond aux morceaux précédents.
Ils échangèrent un regard satisfait. La mission semblait réussir sans grand dommage. Le drone, planant au-dessus de leurs têtes, enregistrait la scène, renvoyant les données en temps réel à Jed et Dean, à bord de l’Alcazar.
— Les gars, on peut dire que tout s’est plutôt bien passé, annonça Tony, avec une pointe d’optimisme.
— Pour une fois, renchérit Howard, hilare.
Prenant un instant pour scruter les lieux à la recherche d’autres trésor, ils se rendirent vite compte que la plupart des couloirs étaient effondrés et inaccessibles. Satisfaits d’avoir trouvé ce qu’ils étaient venus chercher, Tony leur fit signe de rebrousser chemin.
— C’est bon, Esmeralda, on a le fragment. On se regroupe au point d’évacuation. Vous venez nous chercher.
Les trois aventuriers quittèrent alors la ruine, aussi prudemment qu’ils y étaient entrés. Bien qu’ils aient échappé aux pièges ou créatures dangereuses présent dans le marais, l’atmosphère demeurait surnaturelle, avec ces eaux vert-de-gris glissant autour de leurs bottes et ces silhouettes aquatiques qui, parfois, effleuraient leurs jambes avant de disparaître. Mais cette fois, la chance semblait être de leur côté : il n’y eut ni confrontation ni attaque, juste la satisfaction d’une découverte qui les rapprochait un peu plus de la quête de l’Étoile d’Azura.
***
Profitant d’un instant de calme avant le retour de Tony, Dean et Jed sortirent un instant dans l’atmosphère feutrée d’un couloir peu fréquenté, à l’abri des yeux curieux des pilotes. Là, ils s’accordèrent une pause qui n’avait rien à voir avec les soucis médicaux de Bertrand, le capitaine jaloux ou la traque à l’Étoile d’Azura. Un moment simplement pour eux.
— Ça a plutôt bien tourné, murmura Dean, en s’adossant à la paroi métallique.
Jed se rapprocha de lui et enlaça son cou, un frisson l’envahissant au creux du ventre tandis que son cœur s’emballait.
— Tout ça me semble… irréel parfois. Toutes ces aventures, ces frayeurs… Et nous deux, lui dit-il en lui caressant le dos.
— Par moments, j’ai l’impression qu’on ne fait que courir après un trésor mythique, sans prendre le temps de respirer, répondit Jed avec un sourire complice.
Il l’attira plus fort contre lui, effleurant ses lèvres. Le vacarme des moteurs s’estompait au profit du silence complice qui s’installait. Leurs visages se rapprochèrent, et leurs lèvres s’effleurèrent dans un baiser aussi bref que précieux.
Le moment fut interrompu par des pas décidés qui résonnèrent dans le corridor. Tony apparut, l’air triomphant, encore revêtu de sa combinaison de saut à moitié ouverte, laissant voir son blouson kaki en dessous. L’étincelle dans son regard ne laissait pas de doute : il était fier de la réussite de l’opération et certainement ravi d’avoir lui-même mis la main sur le fragment de carte.
— Alors, vous deux… lança Tony d’une voix un peu trop enjouée, comme s’il feignait d’ignorer l’échange intime qu’il venait de surprendre. Toujours à roucouler, à ce que je vois ?
Jed recula d’un pas, tandis que Dean tentait de prendre une posture plus formelle. Ils échangèrent un regard, conscients qu’ils ne trompaient pas vraiment Tony.
— Capitaine, commença Dean, on s’apprêtait justement à rejoindre la passerelle.
Mais Jed, à bout de patience, coupa la parole du lieutenant. Visiblement irritée par la jalousie à peine voilée du capitaine, elle s’exclama :
— C’est quoi ton problème, Tony ?
Tony s’arrêta net, brièvement déstabilisé par l’audace de Jed, mais il conserva son calme. Croisant les bras, il répliqua d’un ton ferme :
— Jed, on en reparlera plus tard. Il marqua un silence, comme pour se ressaisir, avant d’ajouter : Parce que, comme je le disais, maintenant qu’on a récupéré les quatre fragments, il est temps de se mettre au déchiffrage.
Tony laissa planer un bref silence, son regard allant de Dean à Jed. Un éclair de contrariété passa dans ses yeux, vite masqué par la fierté d’avoir récupéré tous les fragments.
— Je veux un rapport complet dans les deux heures, reprit-il d’un ton qui se voulait calme. Dites à Eagle et Esmeralda de vous assister pour la cartographie, et préparez l’holotable. On verra le reste plus tard, Jed.
Dean acquiesça, déjà prêt à s’exécuter. Jed, encore sous l’effet de sa confrontation avec Tony, serra les dents, mais elle savait qu’elle devrait mettre sa colère de côté. La mission primait sur tout.
D’un pas sec, Tony tourna les talons, enjamba une mallette de matériel, et s’éloigna dans un mélange d’orgueil et d’impatience.
— Et range-moi tout ça ! ordonna-t-il par-dessus son épaule en se dirigeant vers sa cabine.
Restés seuls, Dean et Jed échangèrent un regard chargé d’émotions contradictoires. Leur proximité récente réchauffait toujours leurs cœurs, même si l’atmosphère venait de se tendre brusquement. Sans un mot de plus, ils se mirent au travail, conscients que la chasse au trésor reprenait de plus belle, avec son lot de rivalités, de complicités et d’incertitudes.
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