10 – Le combat
Le faisceau de sa lampe balaya les combles. Les planches, les poutres, les tuiles, la laine de verre, de la poussière. Une légère brise soufflait. Il y avait ici une fraicheur qui n’existait pas ailleurs dans la maison. Damien essaya de regarder partout, le plus loin possible. Il se disait que peut-être l’animal était-il déjà là, à l’attendre, prêt à en découdre, prêt à défendre cet espace qu’il s’était fait sien.
Caroline avait la tête relevée vers la moitié du corps de Damien qui était encore dans le bureau. L’autre partie lui était inaccessible. Il semblait avoir été mangé par l’ombre. Cela lui procurait un malaise qu’elle ne parvenait pas à définir, comme s’il avait fini par basculer vers une vie sans elle, sans eux, épuisé par tout et tout le monde.
« Damien, ça va ? » demanda-t-elle alors. « Oui, oui…, répondit son époux. Je découvre. Je m’habitue au lieu. » Il monta les derniers barreaux et se contorsionna pour atteindre un endroit où poser ses pieds. Il se tenait désormais debout. Sa lampe de poche n’était pas assez puissante pour éclairer l’extrême opposé. Il jeta un coup d’œil à sa femme, l’air inquiet. Elle semblait si petite, si diminuée même.
Damien observa d’abord autour de lui, son environnement direct. Il cherchait les endroits assez sécurisés pour pouvoir marcher. Il essaya d’imaginer ce qu’aurait pu donner ces combles s’ils se lançaient dans un aménagement. Il y avait une belle hauteur même mansardée. Cela pouvait faire une grande chambre, une salle de jeu, un bureau avec de plus grandes bibliothèques. Surtout, une pièce à reconquérir sur un animal, vrai ou chimérique.
Il avançait à petits pas, se tenant d’une main aux poutres, balayant frénétiquement chaque recoin. Il était également à l’écoute du moindre bruit. La fouine pouvait se cacher, attendant le meilleur instant pour l’attaquer. Il restait sur ses gardes. S’il se loupait, il allait à coup sûr traverser le plafond. Il ne voulait pas voir cette scène de sa jambe dans le plafond de la chambre de son fils et du regard à nouveau déçu de son épouse.
Il remarqua alors sur le sol des brins de paille, puis de l’herbe séchée, et ce qui ressemblait à une souris morte. Damien s’arrêta sur cet animal. Cet être avec ses pattes minuscules ne pouvait pas être la cause du raffut qui avait empêché Caroline de dormir. Il s’agissait alors d’un repas prévu pour une autre bête. Sûrement la fouine du coup. Soudain, tout ce qu’avait pu lui dire sa femme depuis quelques jours lui revint en mémoire.
Il était trop tôt pour dire qu’elle avait raison mais de nombreux signes se présentaient sous ses yeux. Damien prenait toutes ses précautions pour avancer. Il tomba alors sur un espace fait de paille et d’herbe. Il était d’un format rectangulaire, d’une taille qui évoqua immédiatement pour lui celle d’un matelas pour changer les bébés, posé sur les tables à langer.
L’animal s’était installé un lit, un nid douillet. Il avait trouvé le lieu parfait pour passer ses soirées et dîner tranquillement, à l’abri des intempéries, des autres rongeurs, au chaud. Mais chez eux, sans leur permission. Et même s’ils étaient plutôt des gens généreux, toujours prêts à accueillir des personnes dans le besoin, une fouine qui troublait le sommeil de Caroline, c’était impossible.
Il était désormais au-dessus de leur chambre. Damien se repérait par rapport à la sous-pente, le côté de Caroline. Aucune trace de la fouine. Il était fort probable en réalité, qu’elle se soit enfuie au premier bruit suspect et qu’elle ait eu peur de lui. Du bout du pied, il défit un peu le matelas de paille, pour voir si quelque chose ne se cachait pas là-dessous.
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