4.2

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J’appris quelques jours plus tard que Maître Aloïs était parti au lac Moca dans le but de retrouver la famille du garçon. Il ne serait pas de retour avant plusieurs jours.

Pour ma part, je m’ennuyais fermement dans le jardin d’Aconitum à regarder des mésanges se chamailler entre les branches d’un arbre. Je ne sentais plus le froid ni l’humidité, et songeai que ce paysage brumeux et désert était l’image même de ce que je ressentais.

Le calme ennuyeux du jardin fut tout à coup brisé par des pas rapides venant dans ma direction. Iason surgit d’entre la végétation, courant vers moi, un papier à la main, poursuivi par ses trois amis.

« Bonten ! T’es là ! fit-il, exténué en se laissant tomber lourdement à mes côtés. Regarde ça !

  • Iason ! crièrent en chœur ses camarades. On t’a dit non ! »

Il me tendit un avis de mission où était estampillé en grand la lettre A, signe qu’il s’adressait aux mages de ce rang. Je levai donc vers lui un sourcil interrogateur.

« C’est une mission de rang A, m’informa-t-il fièrement.

  • Oui… Je sais lire, lui indiquai-je passivement.
  • Tu peux nous aider ? Enfin, juste assurer nos arrières, au cas où ? Je sais que tu peux déjà utiliser la magie. Hide nous a dit pour ta petite illusion sur l’eau de la piscine. »

Je regardai le jeune homme qui rentra aussitôt sa tête dans son cou. Heureusement qu’il ne devait pas en parler…

« J’ai interdiction de sortir de ce fichu manoir, lui rappelai-je en soupirant, et… depuis quand on s’entend comme larrons en foire tous les deux ?

  • Tu vas me dire que tu fais toujours ce qu’on te dit ? Il n’y a pas meilleur moyen pour apprendre à se connaître que de partir à l’aventure. Donnant, donnant, tu nous file un coup de main et je t’aide à te dérider, d’accord ?
  • Me dérider ? répétai-je, irrité par ce qu’il sous-entendait.
  • Iason, non ! C’est trop dangereux ! insista Calithra en essayant de lui reprendre le papier. Et si le Maître l’apprend, on va se faire virer !
  • Pas si on réussit ! Là, il sera obligé de reconnaître nos progrès ! Allez ! Sinon on passera rang A dans trois siècles !
  • On pourrait se faire tuer, protesta Rosa avec douceur. Écoute, moi aussi j’aimerais qu’on constate mes progrès, mais si on brûle les étapes, si on est trop confiant et qu’on surestime nos capacités, on va se mettre en danger.
  • Vous n’avez vraiment aucune ambition, pesta-t-il en croisant les bras, furieux. Bonten est un rang S, il peut gérer si on foire !
  • Je n’ai pas dit oui, lui rappelai-je.
  • Oh, allez ! C’est pas loin d’ici, on te fera sortir discrètement, personne ne le saura jamais, juré ! Il faut juste tuer un bralion. Tu pourras te dégourdir les jambes et prendre un bon bol d’air frais ! Tu n’auras rien à faire !
  • Il n’y a pas de rang S dans votre guilde ? Pourquoi ne pas leur demander ?
  • Si, une, elle est absente.
  • Alors un rang A ?
  • Personne n’est disponible, il n’y a que toi ! ajouta-t-il en me fixant, les yeux remplis d’espoir comme un enfant convoite une sucrerie.
  • Tu oublies un détail, là-dehors, on va probablement me reconnaître. »

Son large sourire me fit comprendre qu’il y avait déjà réfléchi.

« Tu n’as qu’à changer d’apparence. Tu peux aisément passer pour une femme ! Petit, les cheveux longs… imberbe.

  • Je vais prendre ça comme un compliment.
  • Alors, c’est oui ? » me pressa-t-il.

Je posai les yeux sur chacun d’entre eux ; Hide était resté muet, je pensais qu’il était d’accord avec le projet de Iason sans oser le dire. Rosalya me lançait un regard désolé, comme si faire plaisir à son petit ami passait avant ses propres arguments. Calithra… évita mon regard. Il m’en veut encore pour l’autre jour. J’aurai dû m’excuser.

« Vous êtes tous des rang B, si je comprends bien, fis-je pensivement.

  • B comme balèze ! répondit fièrement Iason. Alors, tu te décides ? »

J’avais promis au Maître de rester au manoir, mais l’opportunité d’en sortir ne se représenterait peut-être pas de sitôt. Et j’étais curieux de voir à quel point ce monde avait changé. Outre les livres, je voulais le voir de mes propres yeux. Ce ne serait qu’une petite entorse, et le Maître ne le saura jamais si on reste prudent. Et quelque chose me dit que Iason ira, même si je refuse de les accompagner. Ce dernier argument m’arrangeait, évidemment… mais j’avais vraiment envie de sortir !

« D’accord, je viens, annonçai-je.

  • Tu ne devrais pas…
  • Tu préfères qu’il y aille seul ? » coupai-je brusquement Calithra.

Il secoua négativement la tête, une moue désapprobatrice sur le visage. Il cherchait sans doute quoi répondre, mais Iason ne lui en laissa pas le temps. Il pria Rosa de m’aider à me transformer et celle-ci m’emmena jusqu’à sa chambre. Là, elle me prêta des vêtements, me maquilla et arrangea mes cheveux d’une façon plus féminine. Elle osa même glisser une barrette avec une rose rouge pour maintenir une mèche rebelle.

« Tu es magnifique ! Tu ferais une très belle femme, sincèrement, me complimenta-t-elle en regardant son œuvre.

  • Sûrement grâce au talent de l’artiste. »

Elle releva le menton avec fierté, un large sourire habillant ses lèvres. Je m’estimais chanceux, malgré tout, d’avoir été recueilli par Aconitum et davantage par Aloïs qui semblait tout désigné pour m’apporter de l’aide. Sans lui, je doutai que ces quatre-là m’eut accepté aussi vite. Si c’était réellement le cas.

Nous rejoignîmes ensuite les autres dans le hall, désert à cette heure. Les trois garçons me dévisagèrent – Iason, avec un rictus satisfait.

« Mais quelle beauté ! s’esclaffa-t-il en donnant un coup de coude à Hide qui se retint de rire.

  • La ferme… soupirai-je.
  • Tu es sûr de vouloir venir ? insista soucieusement Calithra.
  • Oui. Pas d’inquiétude, je ne vais pas vous fausser compagnie. J’ai plus à perdre à essayer de disparaître.
  • Ça ne m’a même pas traversé l’esprit. Mais si Maître Aloïs apprend que tu es sorti…
  • Tu vas le lui dire ?
  • Non.
  • Alors il n’en saura rien. Sauf si on reste ici à attendre que quelqu’un nous voie.
  • Bien, alors je vais porter ta bâtarde. Tu seras moins reconnaissable comme ça. Et puis… une jeune femme avec une épée…
  • Quoi ? Plus d’un siècle a passé, et les femmes sont toujours vues comme des petites choses fragiles ? Si tu avais connu Orchid, je t’assure que ta vision des femmes serait tout autre.
  • Ce n’est pas moi qui ai créé ce stéréotype stupide, grogna-t-il, il n’empêche qu’utiliser une arme n’est plus très actuel. Peut-être même que tu devrais la laisser ici.
  • Moi ? Sans mon épée ? Jamais.
  • Alors c’est réglé, je vais la porter ! » dit-il en me l’arrachant de la main.

Nous sortîmes du manoir et nous nous éloignâmes rapidement. Nos pas résonnèrent sur le bitume, faisant tourner la tête de quelques passants. L’un d’eux nous salua, il semblait connaître les membres d’Aconitum. Il m’observa avec insistance comme s’il essayait de remettre un nom sur mon visage.

« Allez Bonnie, avance ! fit Iason en me poussant devant lui. C’est une nouvelle recrue, elle ne connait pas encore bien la ville. »

L’homme me souhaita la bienvenue et je répondis simplement par un sourire. Nous tournâmes dans la première rue sur notre chemin afin de ne plus être dans son champ de vision.

« Bonnie ? répétai-je.

  • Quoi ? Tu préférais que je crie ton nom, histoire d’ameuter tout le quartier ? Tu devrais plutôt louer ma vivacité d’esprit ! se vanta fièrement Iason.
  • Bon, où est-ce qu’on va ?
  • On va prendre le bus pour aller à Laquiline.
  • Le bus ?
  • Nous entrer dans boîte magique pour que elle emmener nous à Laquiline, dit-il en faisant de grands gestes explicatifs.
  • Je sais ce qu’est un bus… lui fis-je remarquer, tu crois que je suis né quand ?
  • Je sais pas, il y a deux siècles ? me railla-t-il.
  • Il y avait déjà des bus, et des tramways en 1881.
  • Alors pourquoi ça te surprend ?
  • J’allais toujours à pied sur le lieu de mes missions.
  • Bienvenue en 2017, où on peut se déplacer partout en peu de temps. Allez, en route ! »

Je suivis le groupe à travers les rues d’Aurora. Plus aucune ne m’était familière tant les lieux avaient changé, à tel point que je m’y serais sûrement perdu. Tout y était plus coloré, plus végétal mais aussi plus… moderne. Je vis au loin des bâtiments immenses sans comprendre comment ils pouvaient tenir debout. Ils n’étaient pas en brique ou en pierre, mais fait de verres et de métal. Je me demandai quel confort pouvait-il y avoir à vivre là-dedans, pensant qu’il devait y faire terriblement froid en plus de compter une structure fragile. Calithra m’expliqua que les matériaux étaient bien différents de ceux de mon époque, et que le tout était très solide en plus d’offrir une isolation bien plus performante que les bâtisses de mon époque.

Soudain un terrible son déchira les alentours, un bruit sourd et puissant qui m’obligea à me boucher les oreilles.

« A-vi-on », articula Iason à mon attention en mimant un vol d’oiseau et en pointant son doigt en l’air.

Je regardai un étrange appareil triangulaire fendre le ciel en un clin d’œil, puis un autre semblable suivi peu après. Tous deux ne possédaient ni ailes ni rien pour les aider à voler. Je me rappelai vaguement ma lecture à propos de ces engins, sans vraiment comprendre comment cela était possible.

« Ce sont des avions de chasse, des avions de l’armée, m’indiqua Calithra. Va savoir pourquoi ils se sentent obligés de voler si bas et de nous péter les tympans au passage… »

Il se mit à regarder le ciel puis me pointa une chose blanche qui laissait derrière elle une trainée de la même couleur.

« Là, tu en as un beaucoup plus gros, c’est un avion de ligne, il transporte des passagers.

  • Combien ? l’interrogeai-je avec une curiosité non dissimulée.
  • Je ne sais, ça dépend des avions. Au hasard, je dirais entre deux et trois cent. »

Je crus un instant qu’il se moquait de moi – peut-être une petite vengeance pour ma rudesse de l’autre jour – mais il continua de me fixer sérieusement.

« Il doit être gigantesque ! »

Je constatai aussi que les rues étaient remplies de véhicules de différentes formes et couleurs, et qui n’avaient plus rien à voir avec ceux que je connaissais. Je ne pouvais compter leur nombre tant il y en avait. Certains circulaient à toute vitesse à côté de nous, dégageant une odeur terrible, me faisant regretter la bonne époque du crottin de cheval. Sans parler du bruit !

Nous fûmes aussi attaqués par des panneaux animés qui ressemblaient un peu à l’ordinateur de Calithra. Hide m’expliqua qu’il s’agissait d’écrans qui diffusaient en continue de la publicité.

« D’accord, fis-je, sceptique. Pourquoi voir une femme presque nue m’inciterait à acheter ce parfum ?

  • Il faut voir plus loin que ça ! C’est pour rappeler la sensualité ! ajouta-t-il.
  • La sensualité ? Pour un parfum ? Le but, c’est de sentir bon, non ?
  • Eh bien, la pub est là pour te faire croire que ça va plus loin que ça, que tu peux être une autre personne ! »

Je levai les yeux au ciel, trouvant que le monde était devenu bien étrange. Une chose cependant avait été nettement amélioré. L’éclairage publique ! J’avais déjà observé ce phénomène par la fenêtre de ma chambre. À la nuit tombée, les lampadaires s’allumaient seuls, et surtout, ils éclairaient la rue d’une lumière puissante, presque comme des phares.

Nous empruntâmes ensuite une rue réservée aux piétons – je n’osais imaginer le pourquoi de ce privilège – qui débouchait sur un grand jardin.

« Il y avait des parcs à ton époque ? m’interrogea Rosa.

  • Non, on comptait déjà les arbres qu’il restait… Les jardins étaient réservés à ceux qui pouvaient se les payer. Une taxe avait été mise en place pour les limiter, on voulait garder des espaces pour l’industrialisation. »

Nous arrivâmes enfin à un arrêt de bus. Selon Iason, celui qui nous intéressait arriverait dans une dizaine de minute. Je m’adossai contre l’abri, les bras croisés et songeai à tout ce que je venais de voir. Même sans moi, le monde a continué à tourner, conclus-je tristement.

« Ça va ? » s'enquit Calithra.

Il hésita un instant puis vint se placer à côté de moi. Ses trois amis discutaient vivement un peu plus loin en guettant l’arrivée du bus.

« Pour l’autre jour… tu sais… amorçai-je.

  • Ça va, j’aurais dû comprendre que j’étais un peu envahissant, les torts sont partagés, répondit-il avec un sourire.
  • Non, ce n’était pas ta faute. Tu essayais d’être gentil et… j’ai agis comme un imbécile. Les vieilles habitudes ont la vie dure. J’étais…
  • Troublé par ta discussion avec Maître Aloïs ? Oui, je m’en doutais. Est-ce que… tu as pu…
  • Accepter qu’Aldegrin n’a pas été honnête avec moi ? Non. Tout indique qu’il m’a menti, mais… je ne peux pas… je ne veux pas croire qu’il a fait ce que vous dîtes.
  • Ça se comprend. Mais… j’espère sincèrement que le Maître ne se trompe pas, parce que sinon…
  • Il n’y aura de nouveau plus qu’un coupable, moi. »

Dès que le bus arriva, Iason nous fit signe d’approcher. Il nous ordonna à Rosa et moi d’aller nous installer tandis qu’il payait. Nous prîmes place dans le fond, là où il y avait le moins de monde. L’intérieur était bien plus spacieux, et comptait davantage de sièges que les omnibus de mon époque. Finalement, hormis l’absence de chevaux, ce n’était pas si différent. Les garçons nous rejoignirent peu après, et s’installèrent derrière nous. Selon eux, le trajet jusqu’à Laquiline durerait quarante-cinq minutes. J’avais pris place près de la fenêtre, espérant apercevoir encore un peu de ces nouvelles choses.

Le bus avait redémarré depuis quelques minutes lorsqu’un jeune homme assis devant nous se tourna et passa la tête au-dessus de son siège pour nous regarder. Une forte odeur d’alcool parvint jusqu’à nos narines et j’échangeai un regard entendu avec Rosa.

« Bonjour mesdemoiselles », fit-il avec un large sourire qu’il devait penser charmant.

Exaspéré, je soupirai lourdement en concentrant mon attention sur l’extérieur, espérant qu’il nous ficherait la paix.

« Vous allez où comme ça, mes jolies ? insista-t-il en se retournant complètement, et en posant ses bras sur la partie supérieur des deux sièges qu’il occupait. Peut-être que je peux venir avec vous ? Il ne faudrait pas qu’il vous arrive quelque chose !

  • Elles sont déjà bien entourées, merci », grogna Iason, assis derrière sa petite amie.

L’homme le toisa d’un œil mauvais puis reporta de nouveau son attention sur nous. Rosa me jeta un regard agacé et se colla au fond de son siège.

« Je pourrais être votre garde du corps, ajouta-t-il en haussant le ton. Allez, arrêtez de faire comme si vous ne m’entendiez pas ! »

Iason faillit bondir de sa place, mais fut retenu in extremis par Calithra qui lui chuchota de ne pas faire de vague, craignant d’être expulsé du véhicule et de rejoindre Laquiline à pied.

« Retournez-vous, asseyez-vous et fichez-nous la paix, lui ordonnai-je en essayant de transformer ma voix afin qu’elle ne paraisse pas trop masculine.

  • Oblige-moi ! » rit-il d’un air benêt.

Je détestai ce genre d’individu qui, sous couvert de l’alcool, se permettait tout en songeant qu’il n’y aurait jamais de conséquence. Le regard fixe, je voulais lui faire comprendre que je ne plaisantais pas. Mais il sourit niaisement et essaya de poser ma main sur ma joue. J’attrapai son poignet et le serrai fermement en guise d’avertissement. Dès que je le relâchai, il recommença. Cette fois, il était allé trop loin ! Je saisis son poignet d’une main, et de l’autre j’empoignai deux de ses doigts et les ramenai en arrière d’un coup sec. Un craquement se fit entendre et l’homme se mit à hurler. Il recula d’un coup, ses pieds battirent le sol comme les pistons d'une machine à vapeur tandis qu’il se secouait dans tous les sens. Maintenant il va peut-être nous laisser tranquille ! grognai-je. Le bus ralentit ; le chauffeur demanda ce qu’il se passait et d’autres passagers lui décrivirent la scène.

« Putain, on va se faire virer ! me chuchota Iason. Tu étais obligé de lui péter les doigts ?

  • La prochaine fois, il y réfléchira à deux fois avant d’aborder des jeunes femmes », fis-je sans une once de remords.

Le bus s’arrêta et le chauffeur vint jusqu’à nous. J’entendis Iason soupirait lourdement et pestait contre moi. Il avait manifestement la mémoire courte ! Que s’apprêtait-il à faire un instant plus tôt ? Sûrement quelque chose du même genre.

« Cette garce m’a brisé les doigts, gémit l’homme. Regardez ! Regardez ce qu’elle m’a fait ! »

Tous les regards étaient posés sur moi. Je n’aurai pu faire pire pour attirer l’attention… Si quelqu’un avait le malheur de me reconnaître, j’avais beaucoup à perdre. Et voilà… je me suis écouté et maintenant je vais avoir encore plus de problèmes. Bien joué…

« Descendez de mon bus ! » ordonna le conducteur.

Je pressentis que mes quatre compagnons allaient m’en vouloir. Iason élaborait sûrement déjà un plan pour m’assassiner et faire disparaître mon corps.

« Jeune homme, levez-vous et sortez de mon bus ! insista-t-il. Vous êtes ivre et vous ennuyé tout le monde depuis que vous êtes là. Elle vous a cassé les doigts ? Bien, peut-être que ça vous mettra du plomb dans le crâne ! Maintenant, sortez ! »

Voyant que le fauteur de trouble ne bougeait pas et me regardait de travers, il l’attrapa par le bras et le tira violemment dans le couloir. Le jeune homme tenta de s’agripper à tout ce qu’il y avait à porter de main, essaya de résister, mais l’alcool dans son sang jouait contre lui. Il trébucha plusieurs fois, hurla des menaces à l’attention de tous les passagers mais finit tout de même pas être éjecté.

« Vous allez bien ? nous demanda le chauffeur après avoir fermé la porte.

  • Oui, merci », répondit Rosa pour nous deux.

Il nous fit un signe de tête, puis retourna s’asseoir. Le bus reprit son chemin tandis que des chuchotis s’élevèrent çà et là. Ils auront tous une histoire à raconter ce soir en rentrant chez eux, m’amusai-je.

« Imbécile ! me lança Iason en m’assénant discrètement un coup sur le crâne.

  • Quoi ? Il l’a cherché !
  • Ce n’était pas du tout démesuré ! ironisa-t-il tout bas. Heureusement qu’on ne devait pas attirer l’attention.
  • Ce genre d’individu m’insupporte, davantage encore lorsqu’ils sont si insistants. Il n’avait qu’à obéir lorsque je lui ai dit de nous ficher la paix. »

À côté, Calithra plaquait une main sur sa bouche pour s’empêcher de rire. Mais ses yeux trahissaient son hilarité. Je souris malgré moi en le voyant. Bon, j’y ai peut-être été un peu fort.

« Tout est bien qui finit bien, ajouta Rosa, passons à autre chose. »

Elle glissa sa main derrière son siège qui rejoignit aussitôt celle de son bien-aimé. Ils échangèrent un regard complice, de ce que je ne connaîtrais sûrement jamais.

« Je retiens qu’il ne faut pas trop t’embêter, me murmura Calithra en se rapprochant pour que personne d’autre n’entende.

  • Un éléphant dans un magasin de porcelaine, comme disait Aldegrin.
  • Je suis sûr que tu peux faire preuve de délicatesse quand tu le souhaites.
  • Je crois ne l’avoir jamais voulu. »

Ses yeux émeraude restèrent plantés dans les miens plusieurs secondes. Un regard qui… s’éternisait un peu trop et que je me sentis obligé de rompre. Pourtant, un instant plus tard, mes prunelles se reposaient déjà sur lui. Je m’interrompis en voyant Iason nous observer, levant un sourcil et affichant un rictus en coin qui semblait s’amuser de nous.

Je passais le reste du trajet à regarder par la fenêtre sans vraiment voir le paysage…

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