Vide
Nous étions peut-être quatre ou cinq mois après la rupture. J'étais squeletique, morne, robotique... Comme une coquille vide. Le vide. Il était profond, intense, sans fin et dévorant. Mon coeur avait cessé d'être douloureux. A la place, je ressentais comme un trou noir dont les veinules irradiaient dans tout mon corps. Et je ne sais pas trop d'où ça vient, je crois que ça m'a sauvé alors que ça aurait pu me couter la vie, j'ai commencé à essayer de combler ce vide. Il faut bien comprendre que je ne ressentais plus rien, plus d'émotions, je ne ressentais plus d'intérêt pour les choses, les autres, les activités, plus de joie, pas de colère, pas de peur, et même plus vraiment de tristesse qui était devenue mon quotidien. En tout cas, je n'étais plus capable de les identifier... Je me suis rendue compte en conduisant ma voiture sur des trajets quotidiens que je ressentais l'adrénaline. Pas vraiment la peur, mais plutôt l'excitation de la prise de danger, une espèce de jouissance à fleurter avec la mort. J'ai donc recherché l'adrénaline partout où je pouvais la trouver. Je roulais extrêmement vite en voiture, bien au-dessus des limitations autorisées. Je m'étais inscrite sur un site de rencontre et avait rencontré un garçon avec qui j'entretiens une relation uniquement physique pendant les trois années suivantes. Si nous avons créé une sorte d'amitié par la suite, lorsque je l'ai rencontré,il n'y avait que la recherche de sensation qui comptait finalement, la chaleur d'un corps, l'illusion d'un pseudo compagnon mais aucune envie d'engagement. Je m'étais aussi inscrite dans un club, récupérant de jeunes chevaux dressés pour les courses mais pas assez rapides pour se classer. La vitesse, la fougue de ces chevaux parfois seulement partiellement dressés à la monte en club me permettaient de lâcher. Je n'avais aucune peur de me blesser, plus le cheval était fougueux, plus je me sentais vivre. Et je me souviens, avec effroi maintenant, que je regardais le haut des immeubles, m'imaginant sauter de là-haut "Qu'est-ce que je ressentirai ? ça doit être tellement génial cette décharge d'adrénaline... Et si je meurs ? Barf, qui s'en préoccuperait."
Toutes ces petites choses ne sont probablement rien pour beaucoup d'être humain. Mon métier m'a depuis appris que la souffrance peut faire faire bien des choses. Seulement, pour moi qui ait toujours été sage, raisonnable, froussarde, c'était la descente aux enfers, un monde sans limite, tout risque et dont, pour la première fois de ma vie, les conséquences n'avaient aucune importance.
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