Chapitre 1 : Médusa
Le jour se lève et perce à travers le feuillage extérieur. Les doux rayons du soleil caressent ma peau et la réchauffe. Cette chaleur est la bienvenue, même si elle ne suffira jamais à faire fondre la glace qui a pétrifié mon cœur et mon âme. Nul ne viendra me sauver ; le prix à payer pour les mortels est trop lourd ; Eusèbe a bien essayé et le voilà condamné à partager la même solitude glaciale que moi. Je le dévisage un instant. Il était beau, pas autant que moi bien sur, mais beau à sa façon.
Un soupire m’échappe.
J’aurais aimé qu’une autre expression fige ses traits, la terreur les déforme, cela ne le met pas à son avantage.
Un serpent traverse nonchalamment mon champ de vision, je le repousse d’un revers de main.
Seuls les dieux pourraient m’aider… Mais un tel espoir est vain, après tout, si j’en suis là c’est à cause d’eux. À cause d’elle.
— Athéna… Déesse de la sagesse, tu parles... Divine catin dont la jalousie n’a d’égale que sa cruauté ! Je jure que !
Je m’arrête à temps, ou presque. Les murs ont des oreilles et les dieux n’en manquent pas. Mon sort est assez terrible comme ça, inutile de les tenter de l’empirer…
Une larme m’échappe.
Je renifle bruyamment et me tourne sur ma modeste couche, faisant crisser ma crinière. Malgré moi, mon regard se porte sur l’un de mes compagnons de misère, l’épée tendue face à lui. Comme à chaque fois, je m’interroge : aurais-je mal ? Cela suffira-t-il ? Seule ma lâcheté m’empêche de trouver réponse le long de cette lame. Du moins, pour aujourd’hui encore. Car je le sais au fond de moi, tôt ou tard la solitude finira par me dévorer entièrement, détruisant le peu d’humanité qu’il me reste, telle une rouille insatiable sur mon âme, il ne me restera alors que deux choix possibles : m’empaler et mettre un terme à cette terrible mascarade ou m’abandonner à devenir le monstre que tout le monde croit voir en moi.
Un gémissement m’échappe.
— C’est injuste…
Encore une longue journée à ressasser.
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