Chapitre 17 : Médusa
Voilà presque une lune que nos chemins se sont séparés après s’être brièvement croisés. Je pensais que cette rencontre me redonnerait le goût de vivre : je me suis douloureusement trompée. La solitude n’a jamais été aussi sauvage et envahissante. Quant au silence, il m’étouffe et m’assourdit depuis que ses babillages se sont tus dans les galeries.
J’ai eu l’audace de croire que Pyrrha était une bénédiction dans mon malheur, quelle candeur ! Je ne serais même pas surprise de découvrir que cette mésaventure était une cruelle manigance des dieux.
Ou bien peut-être même était-ce un test ? Mesurer la part de monstre et la part d’humanité en moi après tout ce que j’ai subit ? Mais dans quel but ? Pour quel résultat ?
Je déambule dans les tunnels de ma grotte, Achlys sur mes pas, me remémorant en boucle cette après-midi à ses côtés. Cela semblait si irréel et pourtant tellement naturel ! Elle avait même tenu ma main…
Ma gorge se noue quand j’y repense, la lâcher avait été si dur.
La laisser seule et rejoindre les ténèbres m’avait glacé un peu plus à chaque pas, mais je n’avais pas eu le choix, la luminosité du crépuscule m’aurait trahi au prochain tournant, détruisant toute raison en elle, lui révélant ma vraie nature. Pire que tout, cela m’aurait aussi mise face à un choix terrible : la laisser partir et répandre la rumeur d’une créature immonde vivant dans la montagne, créant de nouveaux lots de héros prêts à terrasser le monstre ou alors… ouvrir mes yeux et la figer à jamais dans une expression d’horreur à l’état pur, une de plus, pour préserver le secret de mon existence.
Les dieux sont cruels !
Je m’assois finalement au bord d’un gouffre et y jette les pierres se trouvant à ma portée, guettant le bruit de leur chute, mais aucun son ne résonne jamais. Les abîmes sont sans fin dans ma prison rocheuse. Quand soudain, j’entends un bruit.
Je tends l’oreille.
Ce n’est pas l’écho d’un caillou qui chute, mais des bruits de pas.
M’aurait-elle trahie ? A-t-elle réveillé le mythe de mon existence à son village ? Cette pensée m’attriste plus qu’elle ne le devrait.
Je me relève et m’avance en direction des pas, prête à me défendre. Mourir oui, mais pas pour le plaisir d’un misérable mortel cherchant le prestige !
— Dusa ? Duuuuuuuuusa ! Tu es là ?!
Quoi ? Mais qu’est ce qu’elle fait là ? Je m’avance, méfiante, niant totalement les battements enjoués de mon cœur.
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