"Avant j'étais schizophrène, maintenant nous allons mieux". La blague n'est pas de moi, je l'ai lue quelque part et j'en remercie l'auteur, ça m'a bien fait rire.

N'empêche, il est des jours où j'ai l'impression d'être une bête de foire. C'est certainement très exagéré par rapport à la réalité commune mais c'est mon ressenti intrinsèque et lancinant. Combiner à la fois un handicap physique et un autre psychiatrique n'aide pas vraiment à voir la vie en rose la plupart du temps. Mais le temps est incolore, inodore et pressé, il passe que vous suiviez ou non, alors j'écris, je dessine, je m'agite, je m'accroche à tout ce qui me permet de rester dans ma temporalité, en mouvement, vivant tout simplement. Et si écrire peut m'aider en cela, peut-être que lire peut aider aussi et que je peux, en expiant par l'encre mes démons, ancrer aussi d'autres personnes à la vie et au temps ?

J'ai commencé à écrire quelques textes en ce sens, des textes autobiographiques. La mnémonique verbale est en marche. Je vais essayer de résumer les choses, faire la synthèse des faits et gestes principalement essentiels, mais je ne pense pas pouvoir lutter contre ma logorrhée tout du long de mon récit. Ce qui veut dire qu'il y aura sans doute quelques longueurs dans ce que j'écrirai. Si tant est que quelqu'un me lise un jour, j'espère que ces irrépressibles tirades ne décourageront pas de poursuivre la lecture au point de n'y trouver aucun sens ou intérêt. Parce que je vais y investir beaucoup d'énergie et d'émotions, qui me seront sans doute bénéfiques, mais il serait dommage que ce ne le soit qu'à moi quand l'intention de prêter des outils de progrès à la société ou en tout cas à d'autres personnes en souffrance ou en errance comme j'ai pu l'être n'atteigne pas son but. Enfin, c'est probablement utopique mais rien à perdre à essayer, comme on dit.

Tourner la page au sens propre comme au figuré mais pas seulement, car laisser une page c'est se tourner vers la suivante. Le poids du passé n'entraîne pas forcément une fatalité du futur car entre-temps il nous est offert le présent d'où l'on peut moduler les ondes événementielles qui traversent les heures avec nous, en espérant que ces modulations volontaires adoucissent l'avenir. Et j'atteste qu'à force de m'y entraîner j'y arrive de plus en plus. On dirait que je prends même goût à la construction du futur. Je crois que je suis dans le bon véhicule pour ça.

Mais commençons par le commencement avant que mon récit ne déraille en contre-sens.