Chapitre 4.

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     — Nous sommes fautifs ? Finit-il par répéter, après un long moment de calme.

     — Hein ?

Sa question me surprit. Je ne pensais pas que cette conversation continuerait après le silence qui l'avait suivie.

Je le vis ouvrir les lèvres, prêt à me reposer la même question. D'un signe de main, je le coupai pour prendre la parole à mon tour.

     — Oui, répondis-je simplement.

Je ne savais pas réellement ce que je pouvais ajouter de plus. Je venais de lui délivrer le fin fond de mes pensées, nous accusant tous deux de ce qui était en train de se passer.

Nous avions chacun notre vision des faits, qui étaient bien différentes. Et nous connaissant, j'étais à peu près certaine que nous allions défendre nos points de vue respectifs.

     — Donc, tu es en train de me dire que tu as fait exprès de te concentrer sur ta carrière, de me pousser à faire la même chose, pour que nous en arrivions là ?

Sa voix était avait changé de ton, maintenant tranchante et déterminée. Bien qu'elle soit imposante, cette voix qui avait toujours eu le don de me faire monter dans les tours, me laissait indifférente.

Lassée des disputes et des irritations, je me contentais d'ignorer la déformation de mes propres propos qu'il venait de partager.

Bien que je sois déterminée à ne pas lancer une guerre entre nous, j'eus un mouvement de recul. Je me détachai, malgré moi, de son étreinte. Max n'était pas bête, il vit tout de suite ce que j'étais en train de faire. Il relâcha simplement l'emprise qu'il avait sur ma taille afin de m'en libérer.

Un pincement au cœur, je roulai vers le côté opposé du lit. Je venais d'établir une grande distance entre nos deux cœurs, espérant que cela me préparerait.

     —  Je t'ai aimée, tu sais.

     — Tu m'as aimée ? Répétai-je.

Ses mots avaient été de trop, ils venaient de faire déborder le vase. L'imposante boule qui faisait barrage dans ma gorge eut raison de moi, mes larmes commençaient à rouler sur ma peau.

     — Tu m'as aimée, répétais-je à nouveau, pour assimiler ses mots.

C'était dur. Tellement dur. Je n'étais pas prête à entendre cette phrase, cette tournure qu'elle prenait. Pour lui, je faisais déjà partie du passé. Je n'étais qu'une fille parmi tant d'autres. Je n'étais plus celle qu'il aimait, mais celle qu'il avait aimée.

Il fallait que je l'accepte, Max allait s'en aller. Je m'en irais également, quelques heures après lui. Nous nous en irons vers de nouveaux horizons, loin de nos tracas. Loin de nos souvenirs.

     —  Laisse-moi te confier quelque chose, tenta-t-il avec douceur.

Mes joues étaient désormais baignées de larmes. Je ne voulais pas tenter de répondre, sachant que ma voix se montrerait faiblarde.

Max, qui se rendit rapidement compte de mon état, décidait qu'il était temps de m'avouer ce qu'il avait sur le cœur. Accompagner ses mots de douceur avait toujours été quelque chose qu'il adorait. Il portait ses doigts à mes joues, essuyant les perles salées qui roulaient sur ces dernières. Un léger sourire rendait son visage plus chaleureux, il se lançait enfin.

     — Je crois au destin, aussi stupide soit-il. Mais je crois également aux âmes-sœurs et aux âmes qui vivent plusieurs vies.

Sa révélation me fit sourire. Je ne voyais pas réellement où il voulait en venir, mais j'avais envie de me moquer de lui. Jamais je n'aurais pensé que Max était ce genre de personnes, totalement niaises quand il s'agit de l'Amour. Max m'avait toujours renvoyé une image, bien loin de ce qu'il était en train de me confier. 

Il avait toujours eu le don de me faire oublier mes douleurs avec des phrases stupides, des blagues peu conventionnelles. Encore cette fois, il venait de me faire oublier les larmes qui avaient inondé mes joues en me balançant quelques mots. Quelques mots dont je ne savais que penser. Était-il en train de se foutre de ma gueule ? 

     —  Je sais qu'on se retrouvera dans une autre vie. Peut-être que ça marchera. Dans le cas contraire, je te citerai les mêmes mots : Nous nous reverrons dans notre prochaine vie, parce que nos âmes ne savent pas faire autrement que de vivre l'une avec l'autre.

Je ne pouvais plus me retenir, j'explosai de rire. Il s'avérait que ce ramassis de conneries n'était pas si faux, il le pensait réellement. Tout ce qu'il était en train de m'avouer était ridicule, ce contraste entre le Max que je connaissais et le Max qu'il était en train de me montrer était ridicule.

Mais sa figure affichait un air moqueur, me faisant douter de nouveau. Pensait-il ce qu'il disait ou se fichait-il de moi ?

     —  Tu te fiches de moi ?

     — Même pas. Je le pense vraiment.

Un nouvel éclat de rire résonna dans la pièce vide. Ses mots, son attitude et ses révélations me semblaient surréalistes. J'étais tellement loin de me douter qu'il pouvait croire en ce genre de choses.

      — Tu te rends compte que tu es bizarre ? soufflai-je en me calmant.

      — Ça ne t'a jamais empêchée de m'aimer, ces dix dernières années.

Un tendre sourire habillait désormais ses lippes. Sans réfléchir à notre situation, oubliant ce mal qui m'habitait, je laissai mes doigts rencontrer ses cheveux blonds. Parfaitement coiffées, quelques mèches se glissèrent entre mes doigts.

Aucun mot ne sortait de nos lèvres, laissant un agréable silence inonder la pièce.

Je profitai de ce doux moment pour me tourner vers lui. Nous étions là, désormais allongés face à face. Son visage angélique sous mes yeux, mes doigts ne purent s'empêcher d'aller à la rencontre de sa peau. Sa peau si douce sous mes doigts, cette peau que jamais plus je ne pourrai toucher.

Mes doigts glissèrent de ses tempes jusqu'à ses lèvres, que j'effleurai une dernière fois. L'idée de les embrasser ne me venait pas, je n'en avais plus envie. Son regard s'était ancré dans le mien, il avait suffi que j'observe attentivement ses yeux pour y découvrir de la tristesse.

Au coin de son œil droit, je pouvais voir une petite perle naissante. Max allait pleurer. Je ne l'avais jamais vu pleurer, du moins pas sous mes yeux. Il avait certainement dû pleurer lorsque sa mère nous avait quittés, mais il s'arrangeait toujours pour ne pas montrer une once de tristesse ou de faiblesse. Il avait toujours tenu à paraître fort, avec un cœur de pierre, devant moi.

Ses paupières se fermèrent, la perle se mit à rouler le long de sa joue. Elle continuait sa route pendant plusieurs secondes avant de s'écraser sur l'oreiller. Une petite tache d'eau apparut sur ce dernier, alors que d'autres larmes suivirent la première.

Je décidai de ne pas parler. Max était une personne qu'il ne valait mieux pas braquer, je ne voulais pas qu'il s'éloigne de moi. Je me contentai de laisser mes doigts caresser son visage, essuyant quelques perles ici et là.

Alors que je relevai mon visage vers la fenêtre, pour éviter d'avoir un regard insistant, je me rendis compte que la nuit n'était plus là. Le soleil levant m'indiquait qu'il ne nous restait que quelques longues minutes à partager. C'était pour cette raison qu'il s'accordait à se laisser aller dans mes bras, il l'avait vu.

D'ici une soixantaine de minutes, il sera dans son taxi en direction de l'aéroport. D'ici une quarantaine de minutes, nous ne serons plus rien l'un pour l'autre. C'est la raison pour laquelle il laissait ses émotions sortir, sans retenue.

     — Je t'aime, Maxime.

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