Acte 16 : LES CONTES DE L'ÉTOILE EFFONDRÉE - Murphy's law
— Salut chers Troll-spectateurs ! Bonjour Janette.
— Bonjour chers Troll-spectateurs ! Bonjour, cher Marcel. Aujourd'hui, le marché du thé de luxe est à son zénith ! C'est le Nuit Tibétaine qui tient la palme du meilleur thé noir du moment. J'ai réussi à en gratter à notre pigiste, tout à l'heure, il était de bonne humeur.
— Mmmmh ! Il sent très bon, cher Marcel !
— Bon la suite !
*
Terre 0.3
Le cab s'arrête devant un immeuble contemporain. Sheldon pousse Murphy hors du véhicule. Le jeune homme s'est résigné à obéir. Ils traversent une petite place de pavés blancs sertie de cerisiers. Une petite folie de l'architecte paysager du quartier. Le hall du building, encadré de baies vitrées, conçu façon Hollycock House de Frank Lloyd Wright, mène à deux ascenseurs de style Art Déco. Peter, oubliant un instant être l'otage de l'étrange beauté ténébreuse, admire l'esthétique du lieu.
Le chat noir habite un magnifique loft au dernier étage. La porte d'entrée s'ouvre sur un immense salon décoré d'un superbe bar cuivré se déployant sur la gauche, cachant une cuisine équipée. Au centre, un canapé gris argenté en L fait face à une vue sur la Tamise, à couper le souffle. Sheldon jette négligemment ses affaires sur un tabouret haut, métallique, au design organique. Elle avance le long du zinc vers un meuble mural rafiné à deux étagères en acajou laqué, protégé par des panneaux vitrés coulissants, tenue par un lierre de bronze, exposant une bouteille et des flûtes à cognac en cristal. Murphy tourne lentement sur lui même, fasciné par l'environnement dans lequel la jeune femme évolue. Assise au bar, semblant soulagée que son calvaire soit enfin terminé, elle se verse une rincée de Tullamore Dew. Poussant l'autre verre en signe d'invitation, Sheldon savoure son breuvage. Le technicien accepte. Pourtant, il n'aime pas boire. À peine une bière avec quelques amis de la fac, à la sortie d'un examen. Cependant, après une telle journée, la proposition tombe (comme un kiwi d'or sur ta face, je sors) comme une dose de morphine pour un cancéreux en phase terminale.
— C'est du miel ! lance l'étudiant surpris d'apprécier un alcool fort.
— Il n'est pas mauvais. À ce prix, vaudrait mieux.
Murphy finit son verre. Puis faisant le tour de la grande virgule argentée ornant l'espace, s'approche de la baie vitrée.
— Ça fait longtemps que tu habites ici ?
— Deux ans.
Le jeune homme sursaute. Le chat noir se tient juste derrière lui.
— Je suis douée pour les détails. Le métier s'est imposé, ajoute-t-elle, l'air absent.
— Mais c'est quoi ce métier, sérieux ? s'exclame-t-il, un fond de colère dans la voix.
Le souvenir du meurtre de cette pauvre call girl surgit dans sa tête. Elle observe son otage, tendu par ses pensées.
— Viens t'asseoir, ordonne-t-elle sur un ton étonnement bienveillant.
Plongeant ses grands yeux verts dans le regard bleu nuit de Sheldon, il obéit. Jetant un dernier coup d'œil sur la Tamise, elle se retourne, quitte ses Louboutin, perdant au passage dix bons centimètres, puis relevant sa chasuble vient s'assoir sur le jeune homme, sidéré. Elle sourit.
— T'es mignon avec ta tête de chaton. Tu n'as pourtant pas l'air d'avoir beaucoup de pratique.
Il rougit. Elle tire sur la boucle de la ceinture de son jean, dégraffe les boutons, puis plonge sa main dans l'entre-cuisses, gardant un contact visuel intense avec sa "victime". Murphy sent sa température augmenter considérablement.
Je n'ai pas beaucoup de pratique... j'ai vingt-trois ans et toujours le nez dans les bouquins !
— Tu verras, après une journée de merde, ça fait un bien fou, lui susurre-t-elle au creux de l'oreille avant de lui passer la langue dans le cou.
Le jeune homme gémit. Il agrippe brusquement les hanches de sa partenaire, puis tourne la tête pour l'embrasser avec fougue. Simulant un va et vient bestial, il remonte ses mains le long du dos de la belle afin de défaire la fermeture de sa robe. Elle plonge ses doigts dans l'épaisse toison de jais.
Ah, je n'ai pas de pratique ? Je vais te montrer que ce n'est pas ce qui compte ! Tu mérites amplement ta punition, au vu de tes activités suspectes !
— Fais attention, c'est une Prada. Cinq-cents pounds de tissu, je t'enterre à main nues pour moins que ça ! annonce Sheldon le repoussant d'une pression ferme de sa paume contre le torse du brun.
Il lève les mains comme si elle le braquait. Descendant doucement, le chat noir joue avec ses ongles, passe ses doigts sous le T-shirt de l'étudiant.
— Non. Je te sens venir d'ici : « attention à ma chemise made in China, je pourrais t'enterrer pour deux roupies » ! Les mecs et leurs blagues à deux balles.
Les yeux ronds, Murphy déglutit. Elle enlève sa chasuble, puis le déshabille. Le haut seulement. Il se laisse faire. Il la désire. Elle lui fait toujours peur, mais il la désire d'autant plus. Il ose à peine poser ses mains sur cette peau d'albâtre. Que faire ? La prendre comme une brute ? Ce petit haricot d'un mètre soixante-quinze. Il risquerait de la briser. Il décide de lui détacher les cheveux. Ce superbe auburn est sa couleur naturelle. Il veut voir ça. Un roux aussi foncé c'est rare. Sheldon se tend soudainement.
— Et maniaque, avec ça. En effet ton métier s'est imposé, lance-t-il désespéré, lâchant le chignon sans résistance. Obsédée du contrôle !
La jeune femme retire les épingles. De lourdes mèches se déroulent sur ses épaules, jusqu'à sa petite poitrine, cachée par une brassière de dentelle noire. Murphy caresse une boucle comme s'il tenait le graal entre ses mains. Il transpire. Fébrile. La douleur au bas ventre s'en ressent, plus lancinante. Se collant à lui, peau contre peau, elle plonge son visage dans le creux de son épaule virile, mordillant le trapèze, remontant doucement vers la nuque. Glissant ses mains dans le dos elle tente de s'agripper aux hanches du jeune homme. Il enfonce sa tête dans cette toison rêve.
— Tu sens le miel !
À ce moment, il cesse de résister. Il la bascule sur le côté, se débarrassant énergiquement de son jean.
Tu vas l'avoir la pratique ! Tu vas goûter de mon inexpérience et ce sera tant pis pour toi. Fallait pas me chauffer !
Murphy se déchaîne sur Sheldon, qui semble apprécier le réveil de la bête. Les corps s'entremêlent dans un rythme effréné. La belle savoure le sel de sa chair. Le sel d'un amant brutal et enveloppant. À l'écoute de la moindre réaction de sa Lady.
Elle finira bien par crier mon nom.
Les chroniques de l'univers - « Shapes of the past »
D. S. PENRY pour TROLL MAG INIFINI-TEA
*
— Oh, bah, merde alors ! Gaffe au réchauffement climatique, ça devient chaud bouillant !
— Mon cher Marcel, c'est quelque chose ! Qui aurait pu croire que sous ces airs de ne pas y toucher se cachait une tigresse avide de chair fraîche !
— Oh oui, ma chère Janette ! Bon il faut que je me reprenne, trop d'émotions ! À demain chers Troll-spectateurs et ne trollez pas trop devant l'écran !
— Marcel, on a oublié d'annoncer la fête des systèmes stellaires binaires ! Et puis, ce n'est pas à demain, mais dans une semaine ! Alors mon petit Marcel, on a la fièvre ?
— C'est ça, oui... bonne fête les systèmes stellaires binaires ! À la semaine prochaine chers Troll-spectateurs et ne trollez pas trop devant l'écran !
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