Chapitre 20 - Mia

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Je mordille mon doigt tandis que Jacques tape son message.

Jacques : A ou V ?

Moi : Vérité, comme toujours

Jacques : Tu t’es déjà imaginé le faire avec moi ? Je parle de… tu vois quoi…

Je crois comprendre et cela m’inquiète un petit peu. Jacques n’est pas du genre à parler de ça. On n’a jamais eu cette conversation, mais il n’en a jamais manifesté l’envie et moi non plus. Je suis donc un peu choquée par sa question.

Moi : Non et toi ?

Je demande pour me rassurer. Pourtant, quand je vois les points sautiller pour indiquer qu’il tape un texto, j’ai l’impression que mon coeur va transpercer ma poitrine.

Jacques : Non plus

Je soupire de soulagement. J’étais en train de paniquer, et de me demander ce que je devais faire s’il s’était déjà imaginé avoir ce genre de relations avec moi… Lui dire gentiment que ça ne m’intéressait pas ? Envoyer une tonne d’emojis (⓿_⓿) jusqu’à ce qu’il change de sujet ? Lui demander s’il était sérieux ? Le questionner sur ce qu’il imaginait exactement ? Genre, dans les détails ? Non, ç’aurait été dégueulasse de demander ça. Tout aussi dégueulasse que de se l’imaginer, cela dit.

Ce jeu d’action ou vérité devient une torture pour moi. À chaque question qu’il me pose, j’ai peur qu’il sorte un truc embarrassant. Mais non voyons, ça ne lui ressemble pas. Mais ça ne lui ressemblait pas non plus de demander si je m’étais déjà imaginée le faire avec lui. Je stresse. Je sais que je ne devrai pas, mais je me dis qu’à tout moment, il pourrait poser une question indiscrète.

Mon coeur s’accélère. Je finis par envoyer ça :

Moi : Bon, c’était super de jouer à A ou V Mais je suis fatiguée Je vais aller dormir Bonne nuit, à demain, je t’aime mon coeur

Ce à quoi il répond :

Jacques : Repose toi bien à demain je t’aime aussi mon coeur

J’éteins mon téléphone et me glisse sous ma couette. Je lance un regard à Marine qui dort à côté.

On se réveille vers 10 heures. Marine se frotte les yeux et retire de sa bouche des mèches de cheveux.

- Salut.

- Salut.

Je sors de mon lit et discipline mes cheveux.

- C’est bientôt le voyage en Espagne et en Allemagne.

Le lycée organise un voyage d’une semaine à Berlin pour ceux qui font allemand et à Barcelone pour ceux qui font espagnol. Même si les habitants de Barcelone parlent catalan.

Malheureusement, Jacques a choisi allemand, tout comme Marine. Dans son groupe d’allemand, Jacques a Julien et Jordan, et Marine a Alicia, bien qu’elles se connaissent très peu.

En espagnol, j’ai Sarah, ce qui est cool, ainsi que Ethan, ce qui est moins cool. Il y aussi la bande de Claudia, Stacey et Barbara, mais elles ne font pas attention à moi.

On part demain, c’est-à-dire lundi. On doit être à six heures du matin au lycée pour arriver à Barcelone à vingt-deux heures. J’ai déjà préparé mon sac, et bien qu’on soit en janvier, le prof d’espagnol a dit qu’il ferait chaud là-bas, donc j’ai prévu des shorts, des jupes et des t-shirts, ainsi qu’un jean et le gilet de Jacques au cas où.

- Ton sac est prêt ? demande-je à Marine.

- Ouais. J’ai hâte de partir, mais tu vas trop me manquer pendant une semaine.

- La même.

Jacques aussi me manquera.

- On fera des appels, on s’enverra des messages et quand on sera dans le bus, on fera une visio, programme Marine.

- Ouais.

- Enfin bon, je vais rentrer chez moi, perso. Salut Mia, merci on se voit dans une semaine.

Elle me serre dans ses bras et chuchote à mon oreille «Surveille les moindres faits et gestes d’Ethan et fais moi un récapitulatif chaque soir». Je ris mais devant son air sérieux, je grimace. Je vais devoir épier un mec que je déteste pour ma meilleure amie.

Le lendemain

Je suis assise à côté de Sarah dans le bus. Elle grignote son sandwich en jouant à un jeu sur son téléphone.

- Seulement six heures qu’on est enfermés dans le bus. J’ai l’impression que ça fait une éternité, geint-elle. Déjà qu’on est partis en retard.

Le bus a démarré à six heures trente au lieu de six heures quinze à cause d’élèves arrivés en retard.

- On aurait pas dû les attendre, grogne-t’elle en finissant son repas.

Elle sort de sa valise une bouteille d’eau. Elle en boit une gorgée avant de dire :

- Je vais devoir attendre notre retour en France pour boire du Coca.

- Ça va, on revient samedi après-midi.

Ethan est assis derrière nous, tout seul. Il discute avec Jacques depuis le début du trajet. Moi, je n’ai pas encore parler à Jacques. Il ne faut pas que je passe trop de temps penchée sur mon téléphone.

- Mia, t’as un câble USB d’iPhone ? demande Ethan. Il me reste que 14%.

- Oui, j’en ai un, mais mon tél charge. Je n’ai que 2%, moi.

- Comment c’est possible de ne plus avoir de batterie ? Vous ne l’avez pas chargé à bloc hier ? questionne Sarah.

- Si, mais la batterie des iPhone se perd vite, affirme Ethan.

Je confirme. Sarah hausse les sourcils et se reconcentre sur son jeu. Subway Surfer, je crois.

Il est 22 heures 45 quand on arrive en Espagne. Je partage ma chambre avec Sarah, avec qui j’ai déjà échangé sur les diverses tenues et le maquillage que j’ai pris. Même si elle traîne avec des garçons, Sarah est très girly : elle se lève à 6 heures du matin pour poser son maquillage, elle lit des magazines féminins pour suivre les dernières tendances et elle change ses vêtements dès qu’ils sont démodés. Je me maquille très peu, je me contente de mettre du mascara, du gloss une fois de temps en temps ainsi qu’un peu de fard à paupières. Je ne suis pas forcément la mode, je m’habille à ma façon. Je suis très différente de Sarah, et j’ai l’impression qu’elle est beaucoup plus féminine que moi.

Après avoir pris ma douche et m’être fait un masque pour le visage, je m’allonge sur le lit double et consulte mon téléphone.

Jacques : Je suis arrivé en Allemagne. Et toi ? Je lirai ta réponse demain, je suis fatigué. Je t’aime mon coeur, bonne nuit

Moi : Arrivée aussi. Bonne nuit, je t’aime aussi

- T’as de la chance d’avoir un copain comme Jacques. Et un copain tout court, d’ailleurs. Je suis une éternelle célibataire.

- Dis pas ça. Tu te trouveras un mec – ou une meuf – un jour.

- Pas sûre.

Je la regarde s’asseoir à mes côtés sur le lit.

- Tu ne te démaquilles pas avant de dormir ? questionne-je, incrédule.

- Ah… C’est que… comparé à toi, il y a une différence avant/après être maquillée.

- Et alors, je m’en fiche. Et puis, la différence ne doit pas être si grande que ça. Tu m’as pas l’air énormément maquillée. Crois-moi, je m’y connais : je veux devenir maquilleuse professionnelle en institut de beauté. Je me suis enfin décidée. Je me suis renseignée, et j’avoue que je me penche là-dessus depuis mon entrée au collège.

Sarah émet un petit gémissement avant de lever des yeux tristes vers moi.

- En fait… Il fallait que je te dise pas mal de trucs dont personne n’est au courant…

- Vas-y, je t’écoute.

- Mon maquillage, c’est un full face. Je ressemble pas trop à ça, en-dessous. Et avant d’entrer au collège, mes parents ont accepté de m’emmener en Corée du Sud… Juste pour me faire faire de la chirurgie esthétique.

- Euh, pourquoi être allée jusqu’en Corée ?

Sarah semble amusée par ma question.

- J’avais lu que la Corée était le pays le plus fort en chirurgie esthétique. Et que la chirurgie esthétique coréenne était la plus développée.

- Et tes parents ont accepté ? Je croyais qu’ils étaient…

- Oh, ça c’est maintenant. Avant, ils étaient vraiment super sympa, j’étais leur fierté.

Je hoche la tête et invite Sarah à aller se démaquiller, en lui promettant que je n’allais pas juger son visage sans maquillage. Elle revient après cinq minutes et je reste choquée. Elle a exagéré en parlant de différence, mais elle est là, après tout.

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