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Je me baladais, je pensais à la ville qu'on traverse d'un bout à l'autre sans y croire et le ciel s'est soudain épris du soleil comme un personnage Disney. Là, j'avais envie de t'aimer sans savoir laquelle de ses multiples faces le "tu" exposait ce soir, ce soir d'octobre et je m'en rappelle, et je le rumine encore... Il était sept heures, le drapeau français flottait au vent d'automne sur la coupole. Le palais Rohan s'est illuminé sans crier gare et ce que je croyais s'élever merveilleusement haut était en fait tout près du sol, comme si on écrasait le visage du prince-évêque sur le trottoir.
Je marchais sans but et je m'en voulais un peu d'être de celleux qui tournent autour du pot sans jamais plonger la main dans la jarre aux serpents car des métaphores sur l'émoi, on en pond des centaines par jour, il n'y a là rien d'innovant. Mais, comme ce néon blanc dans le canal, sous le pont, abrité du vaste ciel brisé sur toute sa surface par le frisson des choses enfouies ; comme ce néon qu'on n'aperçoit que de nuit, l'amour, lui aussi, est pour moi un animal nocturne et je le raconte mieux en marchant le long du soir. L'amour brûle, tout du jour, dans toutes les bouches à peine s'ouvrent-elles, tel un été infini. Comprends donc que je ne t'aime qu'au creux de larges nappes d'ombres et que je crois en fait si peu en l'amour que je tente en vain d'en cerner quelques notions puisqu'il est omniprésent, un véritable monstre sur vos lèvres. J'aspire à dévorer le monde et qu'on s'empiffre de toute ma personne en retour. Mais le cœur est rarement lucide, c'est comme s'il fallait d'abord me rouler sur le corps pour me permettre de m'y projeter.
J'ai longtemps brodé sur la notion de l'amour et je reste sceptique. Mais je te laisse tout de même ces mots que j'ai mâchonné longtemps dans le simple but de me comprendre et de t'instruire sur moi :
Aime-moi très fort sans me le montrer. Je dois pouvoir distinguer une forme sans être capable d'en colorier l'intérieur, suivre quelques contours dont la majorité sont effacés par l'existence des autres, m'obligeant à rêver le reste.
Questionne-nous sur le choix des couleurs, laisse-nous rendre la feuille grasse ici et vide là. Oublions que les craies ne doivent pas dépasser et hausse donc le ton de ce bleu, sacre-le roi. C'est parfait puisqu'au moindre virage abrupt, je veux t'aimer assez de toute ma tête pour m'en aller et qu'on m'accuse d'être sans cœur. Il faut qu'entre nous, ce soit l'amour flou et ne jamais savoir sur quel pied penser. La constance des sentiments hérisse mes peurs en hallebardes, tout autour de moi. Tangue puis prends pierre, vogue en plein frimas en plein mois d'août et reviens-moi, reviens serrer ma main en hiver quand l'absence de peau donne plus froid que la mort. Et pars, abandonne-moi derrière, sans un regard, fais de moi un pauvre hère. Ainsi, et seulement ainsi, on se sera empiffré de toute ma personne et j'aurai dévoré le monde.
Je me baladais, je pensais à la ville qu'on traverse d'un bout à l'autre sans y croire et le ciel s'est soudain épris du soleil mais j'étais aigrie, comme la méchante d'un Disney.
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