dB 7.4 : Tu te rappelleras, je t'offris ce bouquet
- Sale temps du poète -
Partie 4 : Tu te rappelleras, je t'offris ce bouquet
Un bon orateur ne se raconte pas, il s’assoit et s’essaie. Hermès, sous ta porte, non loin de l’escalier, tu trouveras un bouquet de myrte que, rappelle-toi, je ne t’offris jamais. Dans mon monde, on se contente de peu, comme sourire sans le son, une télé avant l’ère de l’audition. La fin du siècle des hommes sourds.
Je ne peux pas t’avouer à quel point tu m’abîmes. Je peux hocher la tête en réponse aux questions, c’est déjà beaucoup, c’est déjà trop pour une porte de prison blindée. Voir tes doigts trembler sous la lune de midi me brûle du désir de les croquer. Alors je n’en fais rien, je laisse couler les semaines et m’occupe de mon linge sale dans la cachette du petit soir. Récurer la crasse à coups d’ongle et, peut-être, saigner ensuite. On ouvre les boites le jour. Un coup de canif sans crier gare, la boue se déverse, ça fait des taches que j’absorbe les yeux vidés. Qui, de toute manière, cherche les myrtes en travers des marches ? Un mauvais narrateur ne se raconte pas, il digresse et perd l’Ariane.
Hermès, plonge ta main sous l’escalier, tires-en ces cigales et leurs fleurs cannibales. Tu te rappelleras alors, en ta chair tronquée, ce jour que je t’aimais un peu sur une marche et que j’en descendais en hochant la tête. Notez : on peut avoir horreur du mensonge et être son propre dentiste.
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