dB 2 : Nara
Le crépuscule déchire la lumière sur sa peau, un lys blanc dont goutte le miel, et son collier en toc doré dégouline jusqu’au drap. Il en tombe trois pendentifs colorés. Je les fais tinter les uns contre les autres, en déduis que si l’on crache son plastique, il vient alors sertir le pistil des princesses sur les oreillers. J’en ai la preuve vitreuse sous mon œil blême quand elle me fait comprendre qu’elle aussi porte des belles cicatrices.
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Je ne suis pas très douée pour égoutter, j’attends toujours que l’eau des pâtes s’évapore avant d’y mettre le beurre. Et si je m’allonge la joue contre l’étamine de sa clavicule toute jaune de pollen, c’est pour mieux m’imprégner du printemps. On écoute toujours un peu, selon l’humeur, selon l’instant.
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Elle parle au rythme de Pamart, Nara se dessine dans la chambre à l’ombre d’un cerisier auquel on a arraché les branches. Le vin bave sur les lèvres de sa chemise, le tissu régurgite le rouge de sa muqueuse. L’ivresse, le sucre sur ses lèvres sobres toutes roses, un ruban d’ingénue dans un Marivaux qui tourne en boucle sur « de nos jours » et tout ce bazar. Dans ma tête pleine, les flammes lèchent les corsages et sur son bras tout semble faussement calme : au loin la tempête s’enferme seule pour attendre l’opportunité de l’interstice. Elle porterait l’ukiyo comme drapé de kimono sur son corps nu, l’extériorisation de son corps morcelé par l’âme que j’y pose, au crépuscule de Nara, un lys blanc sur la pierre et le bois dont sourd le ciel.
Pour D.
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