SANS SUITE 36 Jour 6 : Défi des cinq sens (2)

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Ai-je bien entendu, il a dit Carly ?

Mon cœur va exploser de joie ! Tant pis pour notre accord ; tant pis pour l’humiliation qui s’ensuivra. Seul compte le moment présent ; seul compte mon désir pour lui.

Angie lui arrache le papier des mains d'un geste brusque et s’assure que mon prénom y figure bien. Dommage, la vipère, tout le monde n’utilise pas la ruse ou le mensonge pour atteindre ses objectifs.

Lukas me regarde toujours, indécis. S’il attend mon accord, pas de problème. Je tourne la tête puis la rejete en arrière pour lui présenter mon cou. Je me lève, alors qu’il se dirige déjà dans ma direction. Sybille lui tend le pot de miel avec une cuillère. Il dégage une mèche de mes cheveux avec douceur et dépose sous mon oreille une goutte, qu’il étale délicatement avec ses doigts. C’est tellement sensuel ! Cela me rappelle des scènes de films, quand le héros vient de sauver la femme qu’il aime, qu’il court vers elle et la prend dans ses bras pour échanger un baiser langoureux.

Lukas m’invite maintenant à nettoyer ses phalanges en les glissant une à une dans ma bouche. Il humidifie ses lèvres et les dépose au bas de mon cou. Je les sens s’ouvrir ; sa langue récupère l’ingrédient au fur à mesure qu'elle remonte sur ma peau. Ses bras m’entourent, me soutiennent. Mes jambes sont en coton ; je me laisse aller contre lui et savoure la générosité de chacun de ses baisers ; une fois de plus, je suis son objet, inanimée, envahie par une douce quiétude. Ses lèvres suivent à présent le contour de mon visage. Ses mains caressent mon dos, à travers le fin tissu de ma robe ; mes bras se posent sur ses épaules. Son souffle est chaud et rapide sur mon menton.

Ma tête se baisse légèrement, à la recherche de ses lèvres que je sais si proches. Elles se jettent sur les miennes, sa langue s’enroule autour de la mienne ; nos bouches s’écrasent, avides d’ajouter le maximum de profondeur à ce baiser. Ses mains s’agitent dans mon dos, elles se posent sur mes hanches, puis sur mes fesses qu’elles poussent pour me serrer plus encore contre lui. Mes doigts trouvent le bas de son tee-shirt, s’insinuent dessous et caressent son dos, son torse ; je sens les égratignures laissées par les épines de roses sur sa peau parfaite. Ma bouche, avide, embrasse son cou tandis que ses dents frottent mon épaule.

Je sursaute quand j’entends les applaudissements des autres. Je les aperçois, tous debout ; ils nous sourient et tapent des mains. Lukas ne desserre pas son étreinte. Sa tête repose sur mon épaule que son souffle effleure, avant de s’écraser dans mon cou. Un regard résigné, puis il se redresse à son tour, son bras toujours autour de ma taille.

— Qu’est-ce qui vous rend tous si heureux ? demande-t-il avec sérieux.

— On a réussi à vous réconcilier, répond son ami.

— Non. Vous êtes juste parvenus à nous donner envie de sexe. J’ai rempli ma mission, c’est tout et notre accord est toujours valable, confesse alors Lukas d'une voix sourde.

Sa main quitte ma hanche et il rejoint sa place, renfrogné. Ses paroles me blessent, mais elles étaient inévitables. Ils ne les auraient pas prononcées maintenant, j’y aurais eu droit après l’avoir satisfait, ou au plus tard à son réveil. Je parviens à me convaincre que cela ne m'atteint pas, que ces mots ne sont que le reflet de la réalité et que cette mascarade touche à son terme.

Sybille s'est déjà emparée d'un papier où il lui est demandé de reconnaitre le nominé en explorant la poitrine de chaque homme, les yeux bandés.

J'aide à la préparation de la scène malgré la fatigue qui s'abat sur moi. J'éprouve un profond désir de me réfugier dans ma chambre, sous ma couette. Les dernières paroles de Lukas me trottent dans la tête ; elles se répètent, telle une litanie. Je voudrais m'endormir pour oublier et me réveiller chez moi, là où mon train de vie laisse peu de temps pour les distractions de ce genre.

John est l'élu. Je remarque qu'Angie ne cherche pas à savoir s'il y a eu triche pour ce fabuleux hasard. Le nominé demande la permission d'enlever son tee-shirt ; acte autorisé puisque, cette fois, le toucher est le sens requis. Les deux autres candidats s'opposent à cette proposition, mais pour des raisons évidentes, ils se voient obligés de se soumettre à la décision du jury, c'est-à-dire, nous, les trois femmes.

Contempler ainsi le torse éraflé de Lukas me rend toute chose ; j'aimerais le redécouvrir encore une fois, à la place de mon amie. Je me force à regarder ailleurs, d'autant plus qu'Angie et John m'observent, et mes yeux se posent sur le pervers. Je suis surprise. Sous ses maillots difformes, j'imaginais un corps moins entretenu que celui que j'admire en ce moment. Sadique, il guette ma réaction, lui aussi. Je détourne le regard pour examiner Mickaël.

Rien d'étonnant à découvrir des muscles sculptés. Il s'est toujours battu, entre ses compétitions et sa rééducation. Trois hommes particulièrement musclés. Bon courage, Sybille ! Lukas est le premier éliminé ; Sybille distingue immédiatement les blessures que je lui ai infligées. Elle n'hésite pas longtemps entre les deux autres probabilités, guidée par son odorat. En effet, l'eau de toilette de John aiguille sa partenaire qui s'assied à califourchon sur lui et l'embrasse tandis qu'elle joue toujours avec ses tétons.

J'éprouve de plus en plus de difficultés à me concentrer. Mes pensées s'échappent ; encore un mélange de fatigue, d'apéritif et de vin. Le sommeil et la lassitude deviennent une obsession. Il faut vraiment que j'aille me reposer. Quelqu'un m'appelle. J'entends des voix qui répètent le diminutif de mon prénom.

— Carlyane !

Un ton exaspéré. La voix de Lukas. Je reprends mes esprits et les regarde sans comprendre ce qu'ils me veulent. C'est encore Lukas, hors de lui, qui m'explique que je suis la nominée. Je ne saisis toujours pas. La nominée de qui ?

— John ! Il doit récupérer un glaçon dans ta bouche avant qu'il ne fonde !!! poursuit-il avec humeur. Tu es avec nous, là ?

— Désolée. Je crois que je vais vous laisser et aller me coucher.

Ils ne partagent pas mon avis. Ils veulent que j'accomplisse ma mission avant de me libérer. Mon cerveau est en ébullition. Cet échange avec John ne m'inspire pas du tout mais d'un autre côté, le regard glacial de Lukas me laisse à penser que cela ne l'enchante guère. À moins que ça ne soit mon comportement qui l'irrite. Serait-il possible, néanmoins, qu'il ressente une pointe de jalousie ?

Je décide de tenter ma chance sur cette hypothèse qui représentera, si je ne me trompe pas, une bien bonne vengeance ; dans le cas contraire, au moins je serais fixée une bonne fois pour toutes. Pourquoi j’éprouve ce besoin d’être rassurée ? Je n'en sais rien du tout et je m'en fiche. Il faut que je sache, c'est tout.

John s'amuse avec son téléphone portable. C'est bien le moment. Je vais remplir un bol de glaçons dans la cuisine et les fais tinter avant de les déposer sur la table. John, interpelé par le bruit, relève la tête, me gratifie d'un sourire éclatant et se léche les lèvres. J'adresse un clin d'œil à mon amie et me reconcentre sur le joueur qui tape une dernière fois sur son appareil.

Un air de musique s'en échappe ; Take me to church, d'Hozier ! Qu'est-ce-que j'aime cette chanson ! Pourtant, elle résonne bizarrement à cet instant. Elle me rappelle Lukas et l'hôtel. Sors de ma tête !

J'essaie de garder les yeux rivés à ceux de John tandis qu'il se rapproche. Il m'enlace et commence à tourner, m'entraînant dans sa danse lente et sensuelle. Puis il s'empare d'un glaçon et le laisse fondre sur ma peau, à la base du cou. L'eau froide qui glisse entre mes seins, provoque un frisson. Sybille relit le défi, irritée ; elle rappelle "notre" partenaire à l'ordre. J'imagine que l'épisode la dérange, chose que je conçois parfaitement. John pose un nouveau cube de glace sur ma langue. Mon cœur est sur le point d'exploser quand son visage se rapproche et que je me rends compte de ce que je suis en train de faire. D'instinct, je recule.

— Tu as accepté, Marie-Madeleine. Trop tard pour faire marche arrière, me rappelle Monsieur Sullivan sur un ton hargneux.

Ce pourrait-il qu'il n'apprécie pas ce qu'il voit ? C'est pourtant l'un de ses petits jeux préférés. Quoiqu'il en soit, il ne m'appelle ainsi que lorsqu'il est mécontent. Un rapide coup d'œil : en effet, il a l'air furieux ; ses yeux lancent des éclairs. Je constate avec satisfaction que ses lèvres forment une ligne mince sur sa mâchoire crispée et qu'il serre les dents.

D'un pas en avant, je me recolle à John et pose mes mains sur ses épaules dénudées. Ses yeux ne se détournent pas lorsque sa tête se penche et qu'il me murmure de ne pas avoir peur. Le glaçon a bien fondu quand nos bouches se rencontrent et que sa langue entame sa recherche. Enfin, il se redresse et prouve à tous qu'il a atteint son objectif.

Les applaudissements se font quelque peu mous et John n'obtiendra de Sybille qu'un bravo désapprobateur. Rayonnant, il m'invite à poursuivre le jeu. Je suis bien forcée de m'avouer que j'ai trouvé cette partie plutôt excitante, malgré l'impression de trahison envers mon amie. C’est sans nul doute lié à la nervosité de Lukas, et non à la sensualité surprenante dégagée par John. Je commence à mieux comprendre l'intérêt de Sybille pour cet homme. De plus, si Monsieur Sullivan l'apprécie autant, et que sa sœur l'accepte, ce n'est pas uniquement pour ses idées de jeux pervers. Auxquels nous arrivons tous à prendre du plaisir à participer...

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