Chapitre 3
Si Johany vivait seul, c'est parce qu'il était d'une timidité maladive. Il n'avait jamais abordé de fille (enfin, jamais lorsqu'il était sobre).
Il attendait plutôt que tout vienne à lui: les assistants dans les magasins, le travail, l'amour...
Il détestait parler en public, et ne le faisait qu'en cas d'absolue nécessité.
Il était bien sorti avec des filles... Deux fois, en fait. Marion Malout en quatrième. Leur couple n'avait pas tenu deux jours. Il y avait aussi eu Astrid Langfort, en terminale. Johany en était très amoureux, et elle le semblait aussi... Mais il fallait dire que Robin Parait était bien plus intéressant que lui. Johany comprenait très bien qu'Astrid ait préféré les bras musclés du boxeur et que du jour au lendemain, elle soit allée s'y réfugier.
Pourtant Johany n'était pas si laid, ni si bête. Quand il était encore au lycée, il entendait parfois quelques filles glousser sur son passage, mais il rougissait instantanément et partait en courant pour qu'elles n'aperçoivent pas ses oreilles couleur pivoine.
C'était cette timidité qui l'éloignait des autres. Il avait un ami. Un seul. Mais cette unité lui suffisait.
Son ami s'appelait Louis Bastion, il habitait à Nantes avec sa copine Estelle Rogers.
Johany leur écrivait régulièrement par messages, mais il préférait de loin les lettres. Le papier qui met tout son temps pour arriver à destination, puis encore pour que la réponse revienne.
C'était bien mieux d'interagir comme ça, selon lui. Ce n'était pas comme une discussion, on n'était pas à chaud, après une semaine (ou plus), de blanc, d'attente. Il fallait se rappeler le sujet. On accordait un temps privilégié à l'autre, dans ce processus désuet. Depuis l'écriture de la première ligne à l'instant où l'on postait la lettre, nos pensées étaient dirigées au destinataire.
Louis avait toujours accepté de jouer le jeu et d'échanger avec lui par voie postale principalement, bien qu'il ne l'avait jamais compris là-dessus. Mais Johany s'en fichait. Du temps qu'il avait un ami.
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